La mort du village de yourtes près de bougarache

Publié le 17 juillet 2013 par Aiglebleu

 

Une bonne amie que je suis depuis des années, une pionnière du Rainbow et ensuite du mouvement de la simplicité et de la collaboration écologique de la vie en yourte, a vue l’administration française torpiller de nombreuses années de travail et un projet de vie collectif écologique. Son témoignage est émouvant alors j’ai pensé la livrer ici sur le blogue. Une des faiblesses du projet, ce n’était pas des domaines familiaux qui, je crois, sont le seul véritable projet qui a court et long terme va solutionner nos problèmes environnementaux, écologiques et humains. Voici donc le témoignage d’une de nos aînées spirituelles de France.  Lettre ouverte de Louise Chers amis, J’ai été comme vous en état de choc mais tout va vite et aujourd’hui, j’accueille totalement la situation. Beaucoup d’encouragements, de soutiens, de reconnaissance nous ont été adressés, et sachez tout le bien que cela nous fait dans le cœur. Néanmoins, nous avons décidé de quitter les lieux fin août et de ne pas faire appel.  Notre départ, je me l’explique aujourd’hui ainsi. Par la collaboration soutenue avec la mairie et les institutions locales, nous avons été amenés à nous surpasser dans un cadre qui n’était pas le nôtre (surtout administratif). Trop d’envergure et trop de poids sur trop peu d’épaules, cela use. Nous avons été amenés à nous contorsionner dans l’espoir que l’Etat nous accepte … lorsque le verdict est arrivé, la corde tendue a lâché. Nous tous en avons eu les bras coupés et accueillons notre départ aujourd’hui comme une libération après avoir vécu toutes les étapes du deuil.  Fin de la première étape et gratitude pour tout ce que nous avons grandi ensemble et début de la suivante étape. En effet, la foncière Terre de Liens, propriétaire de la terre, a décidé d’engager un bail emphytéotique avec la mairie qui elle-même fera un contrat avec de nouveaux gestionnaires. Cette terre de 3,5 ha est entièrement aménagée avec un circuit d’eau (pompe, cuves et distribution), une rétention d’eau anti-incendie, un parking, un chemin d’accès carrossable, 9 terrassements circulaires, un jardin en permaculture, une serre, 100 arbres fruitiers d’une vingtaine d’essences différentes - tous âgés de 5 ans environ. De plus, le village d’accueil de Cubières est particulièrement dynamique et sympathique. Il nous a accueillis dans un esprit de respect et de convivialité.  Nous vous invitons lundi 12 août à nous retrouver dans la grande yourte dès 10h du matin pour un carrefour d’idées sur la suite possible de cette terre. Ce sera aussi l’occasion d’un marché aux yourtes ; nous revendrons beaucoup de matériel dont vous trouverez la liste ci-jointe. A ce jour, 3 yourtes sont déjà vendues. Il reste 3 yourtes à vendre, la plus grande (9m de diamètre) prix de départ 15.000 euro, la plus petite (4,20 m de diamètre) réalisée par le collectif pour un prix de départ de 2.800 euro. Ainsi qu’une yourte mongole (6m de diamètre) sur plancher isolé, équipée de 2 fenêtres double vitrage, puits de lumière central, le poêle à bois et 1 panneau solaire avec son régulateur, prix de départ 5.500 euro. L’association Vivre Ensemble a 30.000 euro de dettes à rembourser. Cet argent privé a servi à tous les investissements autant en yourtes qu’en matériel. L’association est propriétaire de 5 yourtes collectives (j’ai, au début du projet, donné 3 yourtes à l’association : la grande, la cuisine et une yourte d’accueil).  Votre solidarité, soutien, don, participation seront particulièrement bienvenus. Nous désirons, courant septembre, dissoudre l’association incriminée avec un équilibre des comptes et ainsi empêcher toute poursuite envers moi-même, Présidente, et envers l’Association Vivre Ensemble. Les 17.000 euro de taxe d’équipement réclamée par les impôts devrait s’écraser après que ces derniers apprendront  notre départ définitif … nous l’espérons. Un recours sans réponse jusqu’à présent, a été déposé par notre avocate.  Enfin, à propos de la nouvelle loi envisagée par le ministre Cécile Duflot, cette loi arrivera trop tard pour nous. Elle permettra, nous l’espérons de tout cœur, que la yourte soit reconnue comme habitat, acceptée sans permis de construire, sans raccordement aux réseaux et sans besoin d’accord du préfet ou du sous-préfet (c’est par le renouvellement du sous-préfet qu’est arrivé notre procès). L’accord total et entier de la mairie n’a pas suffi dans notre cas pour nous protéger d’une telle issue.  Je rejoins entièrement l’initiative intègre et courageuse de défense de la vie en yourte, menée par :  www.collectifyourtesnature.org. Vous y trouverez une contre-proposition à la loi Cécile Duflot qui montre toute la pertinence de leur réflexion. Soyez assurés de la perfection de tout ce qui arrive ; mon expérience après l’incendie de ma première yourte en 2000, et moultes déménagements non choisis de tout le village de yourtes, y compris ce dernier. A chaque fois, la vie m’a proposée une vie plus large et plus enrichissante. Et je vis tout cela comme le grand jeu de la vie qui libère celui qui acquiesce. Mon profond engagement de 13 ans pour ce projet prend fin ici.  Merci à tous les piliers, woofers, visiteurs, officiels, administratifs, coéquipiers qui ont participé à cette aventure et ont donné de leur énergie et de leur amour pour révéler la beauté et l’abondance ici présentes. J’ai tenu la barre de ce navire, et cela n’a pas toujours été facile, douloureux parfois, enthousiasmant toujours. Des graines ont été semées, et en leur temps et en leur heure, elles prendront vie. Merci à Sylvie Romieu et aux habitants de Cubières qui auraient tant aimé que nous restions sur notre terre par désobéissance civile … Rien n’arrêtera le mouvement des yourtes, ni la justice, ni le pouvoir des lois. Ce mouvement est exactement une réponse élégante aux difficultés actuelles de logement .Non ,rien n’arrêtera la vitalité de ce mouvement car il est  exactement une solution locale à un désordre global  Parmi toutes les bonnes raisons pour lesquelles vivre en yourte me tient à cœur, c’est son charme.  J’ai écrit un livre qui s’intitule « Qu’il fait bon vivre dans ma yourte ». Ce sont des poèmes dans l’esprit des haïkus, accompagnés de dessins et croquis de l’instant (voir pièces jointes). Il sera prochainement édité. Je vous livre quelques-uns de mes poèmes : Désormais je choisis la radio silence Trop de bruit sur les autres fréquences Je relègue la boite à musique au fond de ma garde-robe Et j’écoute petite pluie,  sur l’écran de mon poêle,  Jolie flamme danse Le feu d’automne a gagné le feuillage. * * * Elle, si vulnérable qu’un simple couteau pourrait la mettre en pièces L’autre, si massif et défensif sur son pic rocheux imprenable Elle, si légère et innocente  Lui, si fier et arrogant Elle, si douillette et en pleine rondeur Lui, aux angles de pierres froides Je choisis sans hésiter la yourte * * * Après le repas de crêpes Les enfants couchés sur les peaux de mouton Autour du poêle Des peintures hautes en couleur Accrochées au feutre Bien au chaud, La mère ourse s’endort satisfaite  Sous son baldaquin Ce livre sera vendu par souscription, et vous en serez informé prochainement. Joie d’être en vie, en bonne santé, joie d’être libre d’engagement à nouveau, joie de ne rien avoir à prouver …  Je me donne une année sabbatique et pars en voyage. Si vous avez une belle idée où je pourrais poser ma yourte à mon retour et vivre simplement, faîtes-le moi savoir. Offerte à l’amour du monde, je vous honore et m’incline. Louise