Michael Kohlhaas : Moyen-Âge Mads in France

Par Unionstreet

Au XVIème siècle dans les Cévennes, le marchand de chevaux Michael Kohlhaas mène une vie familiale prospère et heureuse. Victime de l’injustice d’un seigneur, cet homme pieux et intègre lève une armée et met le pays à feu et à sang pour rétablir son droit.

Il existe des films qui, a priori, peuvent faire peur. Je ne parle pas là de films d’épouvante, mais de film de plus de deux heures, présentés à Cannes. Des films qui se déroulent au Moyen-Âge, des films à costumes donc. Avec un casting international de surcroît, obligé de parler français, cela donne Michael Kohlhaas aka le film auquel tu assistes avec l’horrible pressentiment que tu vas vite t’emmerder. Les premières minutes ne sont pas rassurantes : des hommes à chevaux veulent passer un péage, mais un seigneur en décide autrement. S’ils veulent passer, ils doivent laisser en gage leur deux plus beaux chevaux. Peu de dialogue, longs plans de paysages, accent à couper au couteau … Deux heures ça va être long.

Alors ne nous mentons pas. Long, le film l’est, bien évidemment. Le film met du temps à démarrer et la fin semble ne jamais arriver. Pourtant il se passe quelque chose de l’ordre du magique. Les paysages ventés des Cévennes sont grandioses, on imagine que le tournage à du être ardu avec tant de vent. La nature paraît immense et dangereuse, puis paisible et ensoleillée. Capable d’être paisible mais dangereux, c’est ce qui caractérise Michael Kohlhaas interprété par le toujours génial Mads Mikkelsen. S’exprimant dans un français parfait, il est un mari, un père, ivre de vengeance. Il fera sa propre justice, quitte à être lui même injuste afin de récupérer ses biens. Toute une notion psychologique ô combien intéressante.

Si Arnaud des Pallières accorde beaucoup d’importance aux dialogues (modernes), il laisse un peu de côté les costumes et les décors. Et tant mieux, c’est ce qui faisait défaut à La Princesse de Montpensier. Il laisse le soin à son immense acteur de porter le film sur ses épaules. Le reste du casting est par ailleurs très réussi, que ce soit la  gamine ou Denis Lavant. Mais Mads Mikkelsen a ce quelque chose dans le regard, cette rage, cette soif de vengeance qui donne un intérêt immense au film. La scène de fin, d’une force absolue, est l’une des scènes les plus marquantes de 2013.

L’autre grande force du film, en plus de l’excellence de son interprétation, est la scène d’assaut , où Michael Kohlhaas veut se venger, qui amène la violence au spectateur sur un magnifique plateau. La tension fait rage. Dommage alors que le film nous perde dans les méandres d’un scénario de talion qui n’en finit pas. Mais pour sûr, les montagnes dangereuses terrassées par un vent divin font de Michael Kohlhass un film français présenté à Cannes qui en 2013 aura été symbole de fierté nationale. Il rejoint La Vie d’Adèle, L’Inconnu du Lac, La Fille du 14 Juillet ou Les Rencontres d’après minuit dans la longue liste des films français de 2013 qui ont du culot et du talent à revendre. Si vous en doutiez, allez voir Michael Kohlhaas. Mads Mikkelsen, son regard, son accent et ses pommettes saillantes (et son talent, oui, je suis jaloux) tâcheront de vous convaincre. Et au final, il y a eu plus de peur que de mal. Un beau aux questionnements toujours actuels.

Sortie le 14 août 2013.

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