Jean-Yves Bordier, c’est la crème de la crème. Un peu mon idole aussi : ne pas avoir à choisir entre le beurre et l’argent du beurre…c’est une certaine idée du bonheur, non ? Le beurre, Jean-Yves, ça le motte, et nous, on boit du petit lait…
Jean-Yves n’a vraiment beurre de rien. Y compris venir à Bruxelles un 14 juillet avec six mottes de beurre sous le bras dans une ambiance surchauffée. Tout ça pour quoi ? Tout ça pour filer un coup de main à son ami eurocrate, et mettre en valeur sa belle région d’adoption auprès de centaines d’expatriés venus manger et boire leurs impôts nationaux sous les yeux de notre Ministre du Budget et de son aéropage perlant. Sans beurre et sans reproche, Jean-Yves a plus que joué le jeu, tartinant inlassablement ses merveilles sur du pain amoureusement grillé par son épouse derrière un stand aux couleurs de Saint-Malo. Jean-Yves ne compte vraiment pas pour du beurre.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, Jean-Yves est un parigot pur jus. Un parigot devenu malouin depuis 1985 après s’être engagé dans la marine marchande à Paimpol, par ce qu’il voulait voir le monde. Et puis, parce que sa vérité était ailleurs, Jean-Yves a remis pied à terre et, à la suite de son père fromager, a pris les manettes de la baratte. Pourquoi ? Parce qu’il voulait d’abord faire un beurre d’exception mais surtout parce qu’il voulait « inclure le monde d’hier dans le monde d’aujourd’hui », mêler tradition et modernité, et surtout « faire tout l’inverse de ce qu’on lui disait, parce qu’il avait besoin d’apprendre». Je prends ça comme un conseil.
Donc, Jean-Yves a mis son beurre à l’ouvrage. A sa première composition, il a ajouté des algues, paillettes iodées piratées à ses rivages rocheux. Puis Jean-Yves a poursuivi ses voyages, en avion cette fois. Au Japon en 1995, il a découvert le yuzu, cet agrume citronné depuis porté aux nues depuis par Alain D. (non, pas Alain Delon…) et ses compères cuisiniers trois étoiles. Et hop, shake your butter, make a motte, here is the star! Depuis, ces deux onguents culinaires se goûtent tout au long de repas des gourmands de la capitale, laissant parfois de côté les crustacés et autres poissons dans l’assiette pour cet or en barre.
Le secret du beurre de J-Y ? Une base aérienne, légère, moelleuse, un goût parfait, et puis un je ne sais rien d’inventif, de twist transgressif. Le piment d’Espelette pour une touche sudisto basque sur la pêche du jour, le sel fumé pour un brunch parfait arrosé de Lapsong (Alain) Souchong, et surtout les graines de vanille, qui donnent au beurre une texture gourmande de pâte à cookies qu’on imagine parfaite sur une poêlées de Saint-Jacques. Qui beurre dîne.
Battant le beurre tant qu’il était chaud, et porté par un buzz médiatique amplement mérité, Jean-Yves a multiplié les trouvailles. Les dernières en date, le beurre de brebis, subtil en goût et d’une jolie jaune pâle modeux 2013, le beurre maître d’hôtel revisité au poivre du Sichuan, parfait pour le pavé du samedi, et une nouveauté 2014 dont on vous taira la composition… pour mieux vous faire saliver…hmmmm. Vous pourrez rater votre dîner, mais tant que vous poserez Bordier dans vos raviers, ce sera succès assuré. Ça vous plait ? C’est Jean-Yves qui l’a fait !
Jean-Yves est fidèle à sa réputation. Dispo, souriant, rigolard, Jean-Yves vous conte (crème) fleurette de gaieté de beurre, même sous 35 degrés à l’ombre. Pas de quoi lui coller une œil au beurre noir….tiens, d’ailleurs, c’est une idée, ça, un beurre aux truffes…Soooo Noël 2013 ! Jean-Yves, on s’y met ?
Bref, Jean-Yves nous fait battre le beurre, et on lui passerait volontiers de la pommade s’il était encore un beurre à prendre. A quand le beurre d’artichaut ?
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Où ? A Bruxelles, uniquement chez ROB, le royaume de la Gastronomie (un mélange entre Dean & Deluca et la Grande Ep’). Et sinon, en France dans toutes les bonnes épiceries, crémeries et fromagers hype
Quand ? A tous les repas, le beurre Bordier, ça va avec tout !
Avec qui ? En l’occurrence, là, avec Aurélie, Jérôme, Jocelyn, Estelle et 500 autres expatriés Français venus célébrer le 14 juillet au Parc du Cinquantenaire. Sinon, avec Philou chez O’Breizh.
Dans votre ipod : Bread and butter, Claude François
A vos pieds : des escarpins rouges de Patricia Blanchet