En état d’ébriété, les hommes n’hésitent pas à utiliser des termes lourds de sens, comme « bourré », ou « ivre », les femmes ont recours à des termes plus imagés, comme « pompette » ou « éméchée ». La sémantique de l’ébriété est l’objet de cette étude originale, avec un tout autre objectif que littéraire ou social. Comprendre le langage naturel que les buveurs utilisent pour décrire l’ébriété apporte des données objectives sur leurs perceptions subjectives et permet de mieux cibler les actions de prévention. Ces conclusions, publiées dans la revue Alcoholism: Clinical & Experimental Research, mettent en évidence des perceptions et donc des risques différents chez les hommes et chez les femmes.
Car les hommes n’hésitent pas à traduire par le choix des mots, le caractère excessif de leur consommation, alors que les femmes traduisent leurs excès en termes plus modérés. Une sous-estimation sémantique typiquement féminine qui s’explique aussi par un jugement social plus sévère vis-à-vis des femmes en état d’ébriété.
Mais tout cela constitue un ensemble complexe d’indicateurs physiques et cognitifs qui traduit une perception du degré d’intoxication, explique Ash Levitt, chercheur à l’Université de Buffalo. Une précédente étude de la même équipe avait déjà étudié comment les individus utilisent des termes d’intoxication en langage naturel pour se décrire. Ici, l’étude en ligne a été menée auprès de 145 étudiants d’université, assignés au hasard à affecter différents qualificatifs à différents personnages représentant différents degrés d’intoxication. L’étude montre que les termes utilisés en langage naturel sont appliqués à l’identique en fonction du sexe des personnages. Ainsi, un terme comme « pompette » sera attribué, indifféremment par les participants hommes ou femmes, plus fréquemment à un personnage féminin, même si son degré d’ivresse est très élevé. Un terme comme « bourré » sera attribué, indifféremment par les participants hommes ou femmes, à un personnage masculin même s’il a juste consommé de manière modérée.
Travailler sur la perception : Les inexactitudes dans la description de l’intoxication peuvent-elles prédire les conséquences d’un excès d’alcool, et différemment chez les hommes et chez les femmes ? Dans un premier temps, les chercheurs estiment possible de travailler sur le caractère « inacceptable » d’être bourré ou saoul chez les hommes, et d’accroître la sensibilisation sur les dangers d’une sous-estimation de son degré d’intoxication chez les femmes. Plus concrètement, ces premières remarques suggèrent que les femmes peuvent, en cas d’excès d’alcool sous-estimé, avoir un risque accru d’accident, d’agression sexuelle, ou d’autre situation à risque. Car cette sous-estimation féminine est probablement l’expression d’une surestimation de la capacité à gérer de telles situations. Et chez les hommes, ajoutent les auteurs,ce langage « lourd » peut parfois devenir une sorte d’excuse ou de justification pour des comportements inacceptables.
Source: Alcoholism: Clinical & Experimental Research 10 JUL 2013 DOI: 10.1111/acer.12200 Gender Differences in Natural Language Factors of Subjective Intoxication in College Students: An Experimental Vignette Study (Visuel © Eugeny Savin – Fotolia.com)
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