j’ai été plutôt effaré d’assister à ce vol, sombre et bas, d’ une nuée de rapaces médiatiques, prêts à se jeter sur les cadavres de Bretigny comme des mouches sur de la viande froide… Sans la moindre pudeur, ni la moindre distanciation, à mon sens plus convenable dans ce genre de circonstances, où il s’agit d’être prudent. Ces charognards de l’information et d’internet se sentaient de surcroît d’autant plus exempts de toute critique qu’ils brandissaient le drapeau blanc de l’indignation.
j’ai vu ce bal de grands et petits oiseaux noirs sur le net, à travers facebook, twitter, et mon fil d’informations en continu, qui tantôt faisaient du rase-mottes, à flairer je ne sais quoi, puis sembler reprendre de la hauteur pour mieux fondre soudain sur tout et n’importe quoi, n’importe quelle broutille, sans même parler de proie qui serait la bonne pour se faire mousser et prouver je ne sais quelle vérité militante et politique ridicule, sur la base d’informations tout à fait partielles, et pour certaines éhontément partiales. Pour beaucoup, tronquées. Même mouvement et même registre que ces gens que j’exècre qui s’arrêtent ou ralentissent sur les autoroutes pour regarder le spectacle d’une dés-incarcération en espérant secrètement sans jamais se l’avouer voler une image bien sanglante qu’ils pourront rapporter à leurs amis du sud ou de Bretagne sans omettre le moindre détail… le plus volontiers choquant. Méprisable curiosité morbide… A laquelle se rajoute ici, en l’espèce, le délire à tendance paranoïde, et l’hystérie collective à base de désinformation, si possible la plus mesquine, la plus dérisoire… Je me suis senti un peu moins seul en rencontrant l’ami Seb sur twitter, au travers de cette observation, que de nombreux blogueurs consciencieux ne doivent comprendre que trop bien….
Nous n’avons effectivement pas les mêmes valeurs que ces gens là, que veux tu mon cher Seb… Il est d’ailleurs plutôt significatif de constater à quel point, alors que l’événement n’a absolument aucune dimension politique, mais purement technique et accidentelle (on sait maintenant que c’est une pièce mécanique défaillante, nommée éclisse, qui est en cause) les droitards les plus vulgaires se sont jetés sur leur petit os à ronger pour désigner l’ennemi à la vindicte populaire… d’un côté comme de l’autre. Mentalité affligeante là où nous devrions simplement et humainement pleurer ces morts, hors de toute querelle politicienne… Mais il fallait du sang, de la chique et du mollard. Des gueux l’ont trouvé et leur sang bien plus pur que le nôtre n’a fait qu’un tour. Il a suffit de quelques rumeurs (non, il n’y a pas eu de caillassage de la police), pour déclencher une levée de boucliers dorés dont l’origine n’est probablement pas la banlieue est… Ils se sont tous levés en masse pour dénoncer avec une virulence d’autant plus forte qu’ils ne savaient rien le retour des sauvageons chers à un certain souverainiste "de gauche".
La version de l’un des journalistes présents sur place :
Bref, quand on n’a rien à dire, qu’on ne sait pas, ou que les versions des faits sont contradictoires, on attend d’en savoir plus, que les informations se recoupent et qu’une vérité se dégage plus clairement. Et en attendant, on se la ferme. ça vaut mieux pour tout le monde. Plutôt que de se comporter en charognard de l’info en titrant pour faire du chiffre dans le compteur à visites uniques dans son camp sur le retour des barbares, les salopards de Bretigny ou au détroussage de cadavres, là où il y aurait eu, probablement, des vols. (à confirmer).
Et qu’on s’entende bien : je ne tente pas ici de minorer les faits, de détourner pudiquement le regard, dans une posture de bobo totalement ignorant de certaines réalités sociales (si vous saviez…), ou de travestir la réalité au profit de mon camp politique. C’est au delà de tout ça : j’ai observé, farfouillé sur le net comme à mon habitude, tenter de recouper les infos par divers biais, et je sais, moi…. que je ne sais rien.
Et d’ailleurs, quand bien même cela se serait passé, l’indignation, la polémique facile et le crachat permettent habilement de ne surtout pas s’interroger sur ses propres responsabilités politiques quand à la construction sociétale qui permet ce genre d’actes, et la production collective de tels individus… Et quand on est de droite, qu’on prône la seule réussite par le fric et le mérite personnel plutôt que les valeurs d’évolution collective, de solidarité, et qu’on vit dans le XVIème, on ferait mieux de fermer sa gueule, ça vaudrait mieux.