J'ai enfin vu une oeuvre mythique du cinéma : "Monika et le désir" d'Ingmar Bergman, film datant de 1953 également connu sous le titre "Un été avec Monika". En suédois original : "Sommaren med Monika".L'histoire d'une "garce", une jeune fille manipulatrice qui fait fi de toute convention morale et sociale pour agir d'abord et seulement en fonction de son désir. Face à elle, une jeune garçon un peu rêveur, un peu niais, qui ne demande qu'à rentrer dans le moule sociétal, mais qui se laisse d'abord entraîner par l'énergie et le non-conformisme de la jeune carnassière. Un film étonnament libre dans le contenu et la forme, on imagine les remous qu'il a créés lors de sa sortie dans les années 1950. Les jeunes acteurs sont époustouflants de candeur, de fraîcheur, de sensualité. Leur échappée dans la nature, idyllique d'abord et qui devient descente aux enfers ensuite, est filmée avec une clarté, une intensité, un naturalisme extraordinaires. Il y a aussi de la part du réalisateur et narrateur une volonté de raconter ses personnages et leurs errements sans porter de jugement explicite. Monika n'est pas condamnée, elle existe tout simplement, désarmante, elle se laisse guider par son instinct et ses envies. On sent une fascination certaine chez Bergman vis-à-vis de ce personnage à la fois libre et vicelard, fascination sublimée dans ce célèbre plan de regard-caméra dans lequel Monika - Harriet Andersson semble interpeller le spectateur directement et longuement. Elle est dans un bar, flirte avec un homme, la caméra se rapproche pour cerner son visage, les lumières s'éteignent, Monika nous fixe, nous regarde, qu'est-ce qu'il y a dans ce regard, de l'affront, du désespoir, de l'arrogance, de la cruauté? En tout cas, aucune once de tendresse.Une oeuvre immanquable.