J’avais fait du premier tome de Rose Morte un coup de coeur et j’avais grande impatience de découvrir la suite. J’ai été agréablement surprise de voir que deux siècles s’étaient écoulés depuis le précédent, ce qui donne une grande possibilité de renouveler le contexte: nous voici maintenant en France, pendant les prémisses de la Révolution, au cœur d’une société vampirique et aristocratique, donc doublement prise en haine. On devine en arrière-plan de l’histoire les agitations qui pourtant ne viennent pas inquiéter le comte plus que ce qui se passe dans son propre camp. L’ancrage historique est donc un délice à suivre encore une fois, et l’on se délecte de suivre cet univers à la fois élégant et ravagé. La langue particulièrement soignée, riche et soutenue avec un petit accent désuet, contribue à faire de ce roman une véritable plongée dans une autre époque, comme rares sont ceux qui savent le faire.
J’ai beaucoup aimé retrouver une Rose rebelle, revancharde, pleine d’un désir d’indépendance et refusant obstinément de se plier aux ordres arbitraires de son mentor, même si l’on devine que cette révolte est exacerbée par les sentiments bafoués qu’elle porte à son mentor. La souffrance de Rose, ses hauts et ses bas, ses explications et ses non-dits, sont un fil conducteur du roman qui nous tiennent en haleine efficacement, même si l’on se demande un peu ce qu’attends Artus pour lui fournir des explications bien légitimes. Comme dans le premier tome, j’ai été particulièrement touchée par Adelphe, personnage plus doux et plus nuancé que son frère, plus accessible aussi, plus proche du lecteur. Cependant, contrairement à d’autres lectrices, je n’ai pas du tout adhéré à Vassili, le prince Slave. Je l’ai trouvé trop soumis, trop loyal, trop effacé, bref: souvent inutile, à part pour exciter la jalousie et le mécontentement de ses hôtes. Quant à Artus, je me suis régalé à le voir en méchant, plein de sous-entendu à souffler le chaud et le froid, mais il faut dire qu’en matière de littérature j’ai un faible pour les sales types.
Concernant l’intrigue, j’ai cependant un petit bémol à apporter: j’ai eu bien du mal à la suivre. Qui est qui, qui est dans quel clan, qui complote contre qui… les personnages, leurs origines, leurs races se multiplient et j’aurais bien eu besoin d’un petit aide-mémoire pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants politiques de l’histoire. Mais je sais que l’auteur a anticipé cette difficulté et prépare justement cet aide-mémoire sur le site internet du roman. Par contre, ce qui fonctionne particulièrement bien, ce sont les flash-back sur la vie de Rose pendant les deux siècles écoulés, son apprentissage de sa vie d’immortelle notamment. J’ai regretté que ces passages ne soient pas plus nombreux et qu’ils n’incluent pas davantage Vassili, ce qui aurait pu développer un peu plus sa relation avec Rose qui nous tombe dessus à la première page sans avoir été vraiment construite. De même, on découvre, à la fin du tome, beaucoup de chose sur l’histoire d’Artus et d’Adelphe et leurs familles (et Céline Landressie parvient encore à nous surprendre en les amenant là où on ne les attend pas), mais j’ai regretté que ces informations ne soient pas davantage distillées dans le roman, pour le rééquilibrer un peu, comme elle avait su si bien gérer la progression dans le tome 1.
La note de Mélu:
Ne soyons pas chiche, cela reste un excellent roman que j’ai dévoré à pleine dent (sans mauvais jeu de mot). Merci infiniment à Céline Landressie et aux éditions de L’homme sans nom pour cette superbe lecture.
Un mot sur l’auteure: Céline Landressie est une auteure française, geek convaincue. D’autres de ses oeuvres sur Ma Bouquinerie:
catégorie “nombre”