Ainsi, quand les réglementations imposent généralement, au mieux, aux organismes publics d'ouvrir leurs données aux développeurs d'applications, les services de sa majesté mettent en place un cadre légal préparant l'obligation pour un certain nombre d'entreprises du secteur privé de mettre à disposition de leurs clients, sur leur demande, les données qui les concernent, sous une forme exploitable par des outils informatiques. Seront visés en priorité les services utilitaires, les opérateurs de télécommunication et... les banques, pour les transactions sur les comptes courants et cartes de crédit...
Auparavant, le programme "midata" fédérait déjà, depuis 2011, les actions volontaires de publication (sécurisée) de données, afin d'offrir aux consommateurs une meilleure visibilité sur leurs propres comportements. Actuellement, plus de 20 grands fournisseurs l'ont rejoint, parmi lesquels figurent, entre autres, RBS, Lloyds Bank, Visa, MasterCard...
Ces deux volets convergent dorénavant vers une nouvelle initiative complémentaire, le "midata Innovation Lab" ("mIL"), dont la vocation est d'accueillir des entreprises et autres organisations qui souhaitent concevoir et développer des services utiles aux consommateurs, fondés sur les informations auxquelles ils ont accès. Pour ce faire, un millier de britanniques ont accepté de partager leurs données, constituant ainsi un échantillon représentatif permettant de tester de nouvelles idées.
La vision de "midata" est que les participants à ce laboratoire produisent des solutions que chaque consommateur puisse utiliser, en l'alimentant avec ses propres données (qui restent donc privées), pour obtenir des conseils et des recommandations dans ses choix de la vie courante, en fonction de son historique. Il pourrait s'agir, par exemple, d'une application explorant et analysant les informations des communications téléphoniques pour optimiser l'abonnement sélectionné ou, plus simplement, d'un outil de représentation intuitive de la consommation électrique du ménage.
Avec cette expérience, le gouvernement poursuit au moins 2 objectifs importants pour l'avenir du pays : d'une part, renforcer le pouvoir des citoyens sur leur vie quotidienne et, d'autre part, promouvoir la culture des données ouvertes dans les entreprises, à la fois dans leur production et dans leur utilisation. Ce point est même jugé critique en raison du pouvoir de transformation de l'exploitation de l'information dans tous les secteurs de l'économie. Pour les organisations participantes, la promesse de valeur du "mIL" est de disposer d'un jeu de données incomparable pour développer leurs modèles.
Il faut avouer que la démonstration est plutôt convaincante : avec, notamment, une fédération de sources d'information plutôt riche, une promesse d'accompagnement des entreprises impliquées, un environnement propice à la collaboration, une cible de particuliers naturellement appétente à des outils d'"aide à la consommation" et une supervision publique garante de la protection des individus, les amateurs d'open data sont bien servis et ils devraient être nombreux à profiter de l'opportunité (en fait, plus d'une vingtaine de sociétés sont déjà embarquées dans l'aventure).
L'organisme à l'origine de ce laboratoire reste prudent et est tout à fait conscient de l'aspect expérimental de sa démarche et des risques d'échec auxquels il doit faire face. Mais il est évident que le jeu en vaut la chandelle, d'autant que les moyens mis en œuvre restent probablement raisonnables. Alors, même si nos gouvernements sont incapables de suivre un tel exemple, peut-être des grandes entreprises pourraient-elles au moins en tirer quelques leçons utiles pour leurs programmes d'innovation ?