D'abord il y eut le rêve pendant quelques semaines :
Évolution du CAC 40 sur 6 mois
[ Source : Boursorama.com ]
Évolution du Dow Jones sur 6 mois
[ Source : Boursorama.com ]
Puis vint le réveil au mois de mai 2013, avec une correction marquée sur l'ensemble des marchés et en particulier celui des obligations d'État :
[ Source : Natixis ]
Ceci résulte pour une grande partie des déclarations du président de la Fed, Ben Bernanke, évoquant l'arrêt programmé des politiques monétaires expansionnistes menées par la Banque centrale américaine.
Qu'appelle-t-on une politique monétaire expansionniste ?
Ces politiques monétaires consistent, pour les Banques Centrales, à créer massivement de la monnaie (voir l'évolution de la base monétaire ci-dessous) pour acheter des actifs financiers sur les marchés, dans le but d'augmenter le prix de ces actifs et de faire baisser les taux d’intérêt à long terme.
[ Source : Natixis ]
Ainsi, aux États-Unis, la Fed achète à la fois des titres publics et privés (risqués !), le tout pour 85 milliards de dollars par mois ! Au Japon, comme je l'avais expliqué dans ce billet, c'est carrément un doublement de la base monétaire qui est prévu d’ici la fin de 2014, ce qui signifie que la Banque du Japon va augmenter ses achats d'obligations d'État et même acquérir des actifs plus risqués (ETF, fonds communs immobiliers,...).
L'objectif est que lorsque la richesse (immobilière et/ou financière) des ménages augmente grâce à cette hausse des prix, ces derniers se remettent à consommer et à investir. C'est ce que l'on appelle l'effet de richesse, qui est beaucoup plus marqué aux États-Unis et au Japon qu'en Europe.
Les risques d'une politique monétaire très expansionniste
Tout d'abord, l'ouverture de cet abreuvoir à liquidités financières a rendu la taille des flux de capitaux internationaux préoccupante. En effet, cet argent, loin de servir l'économie réelle, sert surtout à la spéculation internationale, ce qui a en retour des conséquences négatives sur les fluctuations des taux de change.
De plus, cette politique monétaire, en faisant augmenter les prix des actifs, crée un risque de retournement des prix si elle devait s'arrêter. C'est précisément ce risque dont les investisseurs ont prix conscience avec les déclarations de Ben Bernanke, d'autant plus que les banques se sont gavées de produits financiers en tous genres...
Ce type de politique monétaire place donc le banquier central devant un dilemme cornélien : fermer l'abreuvoir à liquidités financières, au risque de provoquer un krach financier, ou poursuivre ces injections massives de fonds, qui certes permettent à l'économie américaine de ne pas couler grâce aux effets de richesse mais déstabilisent considérablement les marchés et peuvent déboucher sur de l'inflation. Voilà pourquoi les économistes évoquent souvent le risque d'irréversibilité d'une politique monétaire expansionniste.
En outre, des achats massifs d'obligations publiques font monter leur prix, donc baisser les taux d’intérêt à long terme. Ceci incite les investisseurs à se reporter sur des actifs financiers plus risqués pour obtenir une meilleure rentabilité, ce qui a pour conséquence un écrasement artificiel de la prime de risque (le retour des célèbres bulles)... et une prise de risque excessive !
Peut-on sortir de ces politiques monétaires actuellement ?
En raison de la situation très dégradée de l'économie réelle, c'est-à-dire tout sauf l'économie casino sur les marchés financiers, essentiellement due à la poursuite des politiques d'austérité, il est difficile de prévoir un arrêt de ces politiques monétaires expansionnistes.
Deux graphiques pour s'en convaincre :
Commerce des marchandises de certaines économies, flux trimestriels, 2010T1-2012T4
Indices du volume corrigés des variations saisonnières, 2010T1 = 100
Évolution des salaires réels
[ Source : Natixis ]
Donc rien à attendre de la demande extérieure et encore moins de la demande domestique au vu du chômage et de la faiblesse des salaires réels...
En définitive, tant qu'on ne changera pas le logiciel global de pilotage de l'économie basé sur le triptyque austérité-compétitivité-inégalité, aucune amélioration ne sera possible !