Dans ma vie télévisuelle, il y a trois catégories de séries : celles que j’aime bien, celles que j’aime beaucoup et celles dont je suis ultra-fan. Dans cette dernière catégorie, en fait il n’y en a que deux : Code Quantum dans les années 90 et Supernatural aujourd’hui. Si je m’écoutais (et si j’avais encore l’âge) je mettrais des posters des frères Winchesters sur les murs de ma chambre et je me ferais des tatouages Malabar en forme de pentacle anti-démons ^^.
A priori, hormis l’aspect fantastique, pas grand chose de commun à première vue. Et pourtant, en finissant il y a quelques jours la saison 6 de Supernatural pour la deuxième fois, j’ai trouvé de nombreuses analogies, des points communs pour lesquels certainement j’aime autant ces deux séries.
Des héros attachants qui se ressemblent
Les deux séries ont pour premier point commun des personnages pour lesquels on se prend très rapidement d’affection, et qui prennent de la profondeur au fur et à mesure qu’on en apprend sur leur histoire et leurs motivations.
- Je ne peux pas m’empêcher de faire le rapprochement entre les personnalités de Al (Dean Stockwell) et Dean Winchester. Ces deux personnages ont comme caractéristique un grand détachement apparent, une dérision permanente et un côté coureur de jupons. Dans les deux cas, on découvre petit à petit qu’il ne s’agit que d’une cuirasse, un masque pour cacher des fêlures plus profondes. Ainsi, dans le magnifique et émouvant épisode ‘Beth’ (M.I.A) de Code Quantum, on apprend qu’Al avait été dans sa jeunesse déclaré mort à la guerre du Viêt-Nam et que suite à ça, Beth, l’amour de sa vie, s’était remariée et que cela avait influencé tout le reste de sa vie, ses nombreux remariages tout d’abord, et surtout sa participation au projet Code Quantum.
Dans Supernatural, les épisodes flashbacks relatant l’enfance des deux frères éclairent Dean sous un nouveau jour : un jeune garçon sans mère, avec un père chasseur toujours absent, et ayant quasiment dû élever seul son petit frère Sammy. On comprend donc au fur et à mesure que cette personnalité légère en apparence cache un jeune homme accablé dès son plus jeune âge sous le poids des responsabilités.
- En face des deux Dean, on retrouve deux Sam qui représentent la figure du personnage vertueux aux bonnes intentions, même si dans Supernatural, ces bonnes intentions pousseront Sam à faire de mauvais choix.
- La figure du guide : c’est un item important dans les deux séries. Comme Sam ne serait rien sans Al et l’ordinateur Ziggy dans Code Quantum, les frères Winchester ne seraient rien sans leur père et son journal de bord, puis sans Bobby, leur père de substitution, et ses livres, ensuite. Ces figures de père / guide sont un des piliers des deux séries, et j’avoue de ce fait avoir été un peu déstabilisée lors de la disparition de Bobby dans la saison 7, peut-être une façon de dire qu’ils avaient passé suffisamment d’épreuves pour devenir adultes ?
Un monde façonné par les héros de la série
Dans Code Quantum, Sam sauve l’existence de parfaits inconnus, mais il croise également souvent des personnalités (Elvis Presley, Marilyn Monroe, le jeune Michael Jackson, JFK dans un double épisode très prenant, …) et au fil des épisodes, on commence à se rendre compte que nous vivons dans un monde modifié par Sam Beckett. Qui sait d’ailleurs s’il n’a pas investi un jour le corps d’un de nos proches pour changer un futur funeste ?
De la même façon dans Supernatural, nous vivons dans un monde en permanence sauvé du gouffre par les Winchesters. Cela même si l’épisode ‘A french mistake’ (Arrêt sur image), en parachutant les frères Winchester dans un monde parallèle où ils sont acteurs et non chasseurs, et où le surnaturel et la magie n’existent pas, laisse planer le doute quant au monde dit réel.
L’altruisme, le sacrifice et la destinée
Dans les deux séries, il est peu de notions plus importantes que celles de l’altruisme, voire même, dans Supernatural, du sacrifice : sacrifice pour sauver sa famille, sacrifice pour donner une seconde chance à un proche, sacrifice pour sauver le monde. Dans les deux séries, les exemples sont légion où chacun des personnages n’hésitent pas à s’oublier au nom d’un idéal plus grand.
On peut citer dans Code Quantum l’épisode ‘Bond en arrière’ (The leap back) où Al et Sam, frappés par la foudre, prennent la place l’un de l’autre : Sam retrouve enfin le présent mais, au final, n’hésite pas à reprendre sa place de voyageur pour sauver la vie d’Al. On peut également citer le dernier épisode de la série ‘Le grand voyage’ (Mirror image) où Sam révèle à Beth qu’Al n’est pas mort au Viêt-Nam et qu’il reviendra. Sachant qu’il est fort probable qu’avec cette révélation, Al décide ainsi de ne pas participer à l’expérience Code Quantum et que Sam perde le guide de ses voyages temporels (présent alternatif qu’on avait déjà entraperçu avec un autre observateur en lieu et place d’Al aux commandes de Ziggy).
Dans Supernatural, chacun des personnages principaux s’est au moins sacrifié une fois, c’est même une spécificité de la série et on ne compte plus les pactes scellés avec les démons. Les exemples sont nombreux : le père, John, allant en enfer pour sauver son fils Dean (saison 2), Dean y allant pour sauver son frère Sam (saison 3), Sam s’enfermant dans la cage de Lucifer pour sauver le monde de l’Apocalypse (saison 5), sans compter les nombreuses tractations avec l’âme de Bobby, toujours prêt à tout pour sauver ses garçons. Dans cette série, on pourrait même dire que le sacrifice est une seconde nature.
Ce sens de l’extrême dévouement est dû à des relations très fortes entre les personnages. Dans Code Quantum, Al est le seul lien de Sam avec le présent, et ils développent au fil des saisons une relation quasi-fraternelle. Quant aux personnages de Supernatural, ils sont prêts ni plus ni moins à mourir les uns pour les autres. Ainsi, Dean dit un jour à Sam : ‘Watching out for you, it’s kinda been my job, you know. But more than that, it’s kinda who I am’. De beaux idéaux en somme.
Dans les deux séries, chacun des héros sacrifie également sa vie entière pour la mission. Mais si le sacrifice est subi au départ, il finit par devenir un choix et en quelque sorte une acceptation du destin (même si dans Supernatural les personnages se jouent souvent de la destinée, en mettant en avant la notion de libre-arbitre). Sam et Dean vont ainsi devoir renoncer à une vie normale pour accomplir leur ‘job’. Sam en renonçant à ses études de droit lors de la saison 1 après la mort de sa petite amie Jessica et Dean en renonçant à sa vie rangée avec Ben et Lisa en début de saison 6. Hunting things. Save people. Family Business.
Quant à Sam Beckett, il finit également par accepter sa mission d’ange gardien et par-là même par renoncer à jamais à une vie normale. On le comprend par la toute dernière image de la série qui indique que ‘Le Docteur Beckett n’est jamais rentré chez lui’.
La recherche d’un paradis perdu
Dans Supernatural, on parle beaucoup des anges et du paradis. Pourtant, ce n’est pas de ce paradis-là qu’il s’agit. Que ce soit un passé hypothétique si les choses avaient tourné autrement ou un véritable passé heureux, la recherche du paradis perdu est un thème récurrent dans les deux séries, donnant à certains épisodes une coloration nostalgique parfois très émouvante.Dans Supernatural, on pourra citer l’épisode où Dean, dans une illusion créée par un djinn, se retrouve dans un passé parallèle où sa mère ne serait pas morte et où Sam et lui auraient une vie simple et rangée. Ou encore à leurs tentatives d’avoir une vie normale, avec Lisa ou Amelia. Dans Code Quantum, on pense bien sûr au double épisode ‘La famille avant tout’ (The leap home), où Sam se retrouve dans son propre passé, dans son corps d’adolescent, à une période heureuse avant que les malheurs ne s’abattent sur sa famille : une frère mort à la guerre et une soeur mariée à un homme violent.
De multiples références à la culture américaine
Chacune à leur façon, les deux séries sont très ancrées dans la culture américaine et les clins d’oeil sont très nombreux, ce qui les rend si agréables à regarder.
Dans Code Quantum, Sam se balade dans plusieurs décennies de l’histoire américaine et il est parfois amené à croiser des personnalités : c’est donc lui qui apprendra le Moonwalk au jeune Michael Jackson, ou qui inspirera la chanson Peggy Sue à Buddy Holly. Certains épisodes font également référence à d’autres films ou séries cultes : l’épisode ‘Au revoir mon ange’ (Good night, dear heart), par exemple, largement inspiré de l’ambiance Twin Peaks ou encore l’épisode ‘L’ange’ (What a wonderful leap) qui n’est pas sans rappeler les films de Frank Capra.
Dans Supernatural, les clins d’oeil parcourent également toute la série, des faux noms utilisés par Dean et Sam quand ils se font passer pour des agents du FBI, qui sont souvent empruntés à des artistes rock américains, aux hommages aux classiques du cinéma fantastique américain (Un jour sans fin, Retour vers le futur, Ghost, les films de zombies…).
En attendant God(ot)
Dans les deux séries, même si c’est à mots couverts dans Code Quantum, le rôle de Dieu est important. On subodore à la fin de la série que c’est Lui qui guidait les sauts de Sam et qu’Il est incarné par Al le barman dans le tout dernier épisode.
Dans Supernatural, le personnage de Dieu (qu’on ne voit jamais et dont on suppose qu’Il serait parti, voire même mort) incarne la figure du père absent, en parallèle avec le père absent des Winchesters.
Ainsi, à partir de simples séries d’aventures fantastiques, on atteint parfois une dimension presque spirituelle :
- à la fin de la série dans Code Quantum, où le Al’s bar est une sorte de métaphore du paradis et où Sam est intronisé ange gardien
- à la fin de la saison 5 dans Supernatural – qui devait être initialement la fin de la série – avec le sacrifice de Sam pour remettre Lucifer dans sa cage et arrêter ainsi l’apocalypse, dans une scène d’une grande force émotionnelle.
Enfin, on ne peut pas passer à côté de l’omniprésence du prénom Sam(uel). Prénom des héros tout d’abord : Sam Beckett / Sam Winchester. Mais aussi le grand-père des deux frères, Samuel Campbell, le fameux Samuel Colt, inventeur de l’arme du même nom, et même l’ange Samandriel dans la saison 8 qui peut être considéré lui aussi comme un ‘Sam’.
Si on se penche un peu sur le prénom Samuel, on apprend que sa forme ancienne ‘Shemuel’ peut être interprétée au sens de "Le nom de Dieu". Par ailleurs, on peut lire dans le portrait chinois du prénom que les Samuel sont épris de merveilleux et de magique et qu’ils se passionnent pour l’étrange, le fantastique, la science-fiction. Ils savent également faire preuve d’un sens poussé du dévouement envers ceux qu’ils aiment ou envers une noble cause et ils sont très altruistes. Voilà qui décrit bien les Sam des deux séries.
Enfin, dans Code Quantum, le nom de Sam Beckett rappelle bien sûr l’auteur de la pièce ‘En attendant Godot’. Même si l’écrivain s’en est toujours défendu, on ne peut pas s’empêcher de voir en Godot un jeu de mots sur le mot ‘God’… et la boucle est bouclée !
En conclusion, deux séries très différentes, donc, mais dont les grandes thématiques se rejoignent beaucoup. Et puis, comment résister aux ‘puppy eyes’ des deux Sam ? ^^
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