A la bonne heure! Enfin un article qui cause du fond. Cet article des Echos de jeudi dernier s'attaque au gaspillage d'argent public pour soutenir des aéroports qui, dans un monde idéal, n'auraient pas lieu d'exister! Un gaspillage confirmé par une analyse de Whichbudget (dont vous constaterez par vous-mêmes que ce ne sont pas des anti-aéroports) en ces termes: "Selon la cour des comptes française, la plupart des aéroports français survivent grâce au financement public. Entre 2000 et 2006, les aéroports de France ont reçu environ 590 millions euros d'argent public, ce qui représente plus de 100 euros par passager. Ces montants devraient même augmenter à l'avenir à cause de tous les investissements nécessaires en termes d'environnement et de normes de sécurité".
Alors pourquoi tant d'argent? D'abord parce que la France compte, comparativement à ses voisins, un nombre hallucinant de "vrais" aéroports (171 pour 65 millions d'habitants). L'Allemagne et ses 82 millions d'habitants n'en compte que... 19 (des vrais)! Même l'Espagne dénoncée dans cet article n'est pas au niveau de la France.
Une déduction rapide pourrait être de dire que la France a une politique décentralisée des transports. Une telle analyse serait hélas un contre-sens. Car en regardant de plus près les chiffres, on constate que l'essentiel du trafic aérien se concentre à Paris (Roissy: 61,5 millions de passagers, Orly 27,2 millions sans parler de Beauvais considéré pourtant comme le troisième aéroport parisien). Viennent ensuite Nice avec 11,2 millions de passager, Lyon avec 8,4 millions et Marseille avec 8,2 millions (chiffres 2012). On tombe ensuite très rapidement jusqu'aux aéroports toujours subventionnés, mais dont on cherche désespérement les passagers. A titre d'exemple, St Brieuc dont la fiche wiki annonce: "l'aéroport a accueilli 4.610 passagers en 2008, 3.508 en 2009 et 581 en 2010 avec un déficit de 600 000 euros pour le budget 2010".
La France a donc une politique tout à fait exemplaire (sic): concentration du trafic sur 2% du territoire et baronnies aéroportuaires qui se plument pour savoir qui est l'aéroport "de province" le plus gros! La sacro-saint couple Etat-villes contre la logique dite "régionale". Métropoles, vous avez dit métropoles?
En Bretagne, Nantes détrône largement tous ses concurrents avec plus de 3 millions de passagers. Mais contrairement à beaucoup d'idées reçues, c'est Brest qui est en seconde place avec son million de passagers. Plutôt que de soutenir ces deux plate-formes (située à deux extrémités de la péninsule), on continue pourtant à renflouer les pertes de Lannion, St Brieuc, Quimper et même Lorient ou Rennes. Chacun veut son petit aéroport. L'UDB a déjà demandé la fermeture des aéroports de Quimper, de St Brieuc et de Rennes. Les opposants à Notre-Dame-des-Landes feraient bien de se pencher sur ce problème également. Car si une nouvelle plate-forme aéroportuaire est discutable (j'en conviens parfaitement), l'existant est scandaleux.
Cet article cependant laisse espérer quelques rationnalisations bienvenues. Il confirme qu'il est plus qu'urgent d'élaborer un vrai schéma aéroportuaire et pas se
contenter d'un schéma régional multimodal des déplacements et des transports qui ne fait qu'additionner l'existant sans aucune prospective, ni aucune vision. C'est ce que demande l'UDB au Conseil
régional depuis 2005 sans succès jusqu'à présent. Sauf que si Bruxelles interdit l'aide structurelle d'ici 10 ans, il y a fort à parier que certaines structures vont couler d'elles-mêmes! Les CCI
ne paieront pas et si les collectivités ne mettent pas la main à la poche, elles accéléreront la chute des aéroports inutiles. Autant anticiper, non?
Un tel schéma doit être élaboré avant toute construction d'un nouvel équipement! En termes plus clairs: Notre-Dame-des-Landes doit attendre. Au préalable, il faut fermer les infrastructures inutiles du type Quimper, St Brieuc, Lannion, Lorient ou Rennes, ensuite redistribuer les liaisons en supprimant les vols vers Paris et pour finir étudier l'opportunité ou non d'une nouvelle infrastructure. L'Allemagne qui, je me répète, compte moins d'aéroports que la France a plus de gros aéroports internationaux! Elle complète ce réseau par un maillage ferroviaire qui contraste singulièrement avec l'étoile ferroviaire française. Pour beaucoup, aider les gros est une hérésie, mais en terme aéroportuaire, c'est pourtant une politique écologiste! Mieux vaut en effet soutenir de grosses structures bien réparties que des dizaines de petites. Pourquoi? Parce que la consommation carbone est plus importante au décollage et à l'atterrissage donc il faut réduire les sauts de puce, les correspondances pour privilégier les lignes internationales voire intercontinentales.
L'Allemagne fédérale l'a compris. Chez nous, on préfère aller à Paris. Misère...
Pour rappel: ma position sur NDDL.