Un récent sondage (baromètre "web et santé" réalisé par Listening Pharma et Hopscotch Digital) indiquait que près de 96 % des médecins généralistes utilise le moteur de recherche internet Google pour trouver des informations médicales. Et plusieurs fois par jour, pour certains d’entre eux (25%).
Le célèbre « moteur de recherche » est incontournable, il est désormais associé à la recherche d’information santé, tant au niveau du grand public que des professionnels de santé, comme l’atteste ce sondage.
Mais la présence de Google dans la e-santé ne se limite pas à cet usage, loin s’en faut.
Sur ses fondamentaux, via la richesse des informations collectées, l’outil permet d’établir des enquêtes des études de santé publique, de réaliser un suivi épidémiologique. Avec l’exemple de cette étude publiée dans l’American Journal of Preventive Medicine, démontrant la « saisonnalité » des maladies de santé mentale au travers des recherches Google.
Cette enquête menée par l’Université de Californie à San Diego, et ayant analysé toutes les requêtes d’information concernant la santé mentale aux États-Unis et en Australie entre 2006 et 2010, a démontré que les recherches d’information sur Internet concernant les maladies et problèmes de santé mentale suivent un cycle saisonnier.
Les requêtes concernaient divers types de troubles (troubles alimentaires, schizophrénie, trouble bipolaire, TOC, Anxiété…) et le constat est que, dans les deux pays, elles étaient moins nombreuses en été qu’en hiver. Alors que certaines conditions telles que le trouble affectif saisonnier (dépression saisonnière) sont connues pour être associées aux saisons, les connexions entre les saisons et plusieurs autres troubles mentaux majeurs fut surprenant pour les spécialistes.
Fort de cette masse d’information à disposition, les responsables de Google souhaitent proposer d’autres services autour de la santé, soit en optimisant leur moteur de recherche, soit en proposant des services innovants.
Illustration avec les quelques exemples qui vont suivre au sein de cet article, montrant les velléités de la société de Mountain View dans le domaine de la santé.
GOOGLE, un acteur à la recherche de solutions pour notre santé
Pour s’en convaincre, on peut se souvenir du slogan présenté sur le blog officiel Google Inside Search, en février 2012, « Improving health searches, because your health matters » (Améliorer les recherches sur la santé, parce que votre état de santé est important », lors de l’annonce d’un service proposant des diagnostics à partir de la saisie de symptômes.
Proposer un « diagnostic » en ligne, à partir des symptômes indiqués par l’internaute. C’est une des dernières fonctionnalités proposée par Google, depuis le début de l’année 2012 (dans la version américaine de son outil). Plus précisément, l’outil indique une de pathologies concordantes, au regard des informations indiquées. Cela résulte non pas, d’une expertise médicale mais est le résultat d’algorithmes qui analysent les associations de recherches pertinentes les plus fréquentes chez les internautes. D’ailleurs, Google a tenu à le préciser « Cette liste n’est pas rédigée par des médecins et ne tient évidemment pas lieu de conseils provenant d’experts médicaux ».
Histoire de ne pas trop prêter le flanc à des critiques telles que celles émises par les membres du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom), indiquant avoir des « réserves fortes » sur cet outil.
Faire découvrir l’anatomie du corps humain, avec son outil Google Body Browser. Outil de topologie 3D qui dévoile l’anatomie du corps humain de manière ludique, qui peut être d’un apport pédagogique non négligeable pour les professionnels de santé, lors d’explications « plus ou moins techniques » avec leurs patients au cours des consultations.
Le lien pour découvrir cette application en ligne (ne fonctionne pas avec certains navigateurs) : http://bodybrowser.googlelabs.com.
Disponible également, une vidéo de démonstration :
Indiquer le nombre de calories par aliment, en répondant notamment à une série de questions autour de plus de 1000 produits alimentaires. De fait, Google lorgne du côté des conseils en nutrition. Concrètement, si vous tapez le nom d’un fruit ou d’un légume, Google affiche l’histoire de celui-ci, la quantité de protéines, le nombre de calories ou encore un plat populaire en rapport. De nouvelles fonctionnalités seraient à venir autour de ce service.
Intervenir dans la relation médecin-patient, en investissant dans une entreprise spécialisée en e-santé telle que One Medical Group, via son fonds d’investissement Google Ventures. Google souhaite ainsi se positionner, via ce type d’entreprise, dans les solutions facilitant la gestion de la relation entre les médecins praticiens et les patients. Avec des fonctionnalités telles que la prise de rendez-vous en ligne, une meilleure personnalisation des soins, le renouvellement des prescriptions ou encore de la consultation en ligne ou sur mobile des résultats d’analyse médicale.
Proposer une analyse de son code génétique via la société de biotechnologie 23andMe, dont la co-fondatrice est Anne Wojcicki, épouse de Sergey Brin, l’un des 2 fondateurs de Google. Près de 4 M$ auraient été investi par Google dans 23andMe. Cette société propose une analyse du code génétique de ses clients. Pour certaines maladies ayant un marqueur génétique reconnu ou simplement supposé, et s’il s’avère présent, le client est ainsi informé du risque à développer cette maladie.
Mettre à disposition des professionnels de santé des lunettes connectées, les déjà fameuses Google Glass.
Bien avant leur commercialisation auprès du grand public, près de 2000 prototypes des Google Glass sont fournis à des testeurs dans diverses situations. Des professionnels de santé, comme ces 2 chirurgiens américain et espagnol ont testé, ces derniers jours, la retransmission d’actes chirurgicaux filmés par les lunettes connectées de Google.
Aux États-Unis, cela a permis de suivre par téléconférence, la pose d’une sonde gastrique par endoscopie sur un patient.
En Espagne, le 21 juin dernier, c’est une greffe de cartilage sur un patient, qui a été diffusé sur Internet et suivi par des médecins situés aux États-Unis, en Europe et en Australie.
Dans ce cadre de diffusion, les lunettes devraient permettre une meilleure coopération à distance lors des interventions, un suivi facile des actes chirurgicaux et un outil de télé-éducation. Mais le cran au-dessus est déjà envisagé avec notamment une application qui permettrait au médecin de surveiller le rythme cardiaque de son patient rien qu’en regardant son visage. Ou d’avoir automatiquement ses données médicales, toujours à partir de l’observation de son visage.
On aborde là, la fonctionnalité qui commence à faire polémique autour des Google Glass ; la reconnaissance faciale.
Sans rentrer dans le débat de la protection des données privées et en restant purement sur le champ des possibles, concernant la pratique médicale des professionnels de santé, cela peut révolutionner le diagnostic en temps réel, la médecine d’urgence, les actes chirurgicaux.
A titre d’information, tous secteurs d’activité confondus, selon Business Insider, les Google Glass pourraient rapporter plus de 10 milliards de dollars en 2018 (pour un prix de vente fixé autour de 500 dollars, actuellement le prix des Google Glass est de 1 500 dollars).
Tous ces services et outils semblent bien partis, mais cela n’a pas toujours été le cas, et Google a également connu des échecs dans le domaine de la e-santé.
L’échec de Google Health
Sans doute l’échec le plus flagrant de Google dans la e-santé, fut l’expérience de son Google Health entre 2008 et 2012, destiné surtout aux internautes d’outre-Atlantique. Une tentative de dossier médical personnel en ligne.
Service permettant, avec l’accord de son utilisateur, de stocker les résultats d’examens de santé, gérer, d’enregistrer ses traitements en cours et partager ses données médicales, avec des acteurs de santé comme des hôpitaux, des pharmacies ou des services en ligne de santé.
Google Health fut également une réponse directe à HealthVault ; l’offre similaire, dispensée par Microsoft aux Etats-Unis, depuis octobre 2007.
Quoi qu’il en soit, le taux d’adoption de l’outil ne fut pas celui escompté et le service ferma, faute de n’avoir pas réussi à s’intégrer dans le quotidien de millions d’utilisateurs potentiels.
Il serait intéressant d’étudier les raisons de cet échec (sujet pour un futur article éventuellement).
Des raisons à cet intérêt pour la santé ?
A l’image des Gates et leur engagement dans la santé et les causes humanitaires, les fondateurs de Google se sont-ils pris de passion pour le domaine de la santé ? Ou faut-il voir un lien avec les « petits » problèmes de santé de Larry Page. En effet, celui-ci était resté plusieurs semaines sans pouvoir parler, souffrant d’une paralysie partielle des cordes vocales. Ou tout simplement, le marché mondial de la e-santé et les milliards de CA qu’il représente fait-il partie intégrante de la stratégie de diversification de Google ?
Et vous, qu’en pensez-vous ?