Les mots n'ont plus de sens.
Le débat politique se nourrit sur deux
chemins parallèles, que se contredisent parfois. Celui des idées,
des principes, des positions qui guident l'esprit et la morale. Celui
de l'action, de la mise en oeuvre ou en pratique, de la confrontation
au réel.
Le débat politique n'a de sens que si
les mots ont un sens, si l'on sait nommer ce que l'on voit, ce que
l'on sait, ce que l'on vit. Or force est de constater que la France
de 2013, malgré une année de sevrage sarkozyste, s'est encore plus
profondément enfoncée dans une confusion parfois totale.
La droite classique n'a plus rien de
classique. Elle continue de se dissoudre lentement dans le Front
national. A force d'user et d'abuser des mêmes diversions
électorales – immigration, identité, insécurité-, elle valide
peu à peu les instruments idéologiques de la frange la plus
ancienne et la plus détestable de notre communauté.
La gauche n'est pas mieux lotie. Celle
du pouvoir assume une gouvernance difficile sans voir qu'elle
s'éloigne de son électorat sur quelques fondamentaux couteux. Celle
d'opposition croit utile de surjouer l'outrance pour provoquer la
prise de conscience. La seconde accuse la première d'être
l'antichambre d'un néolibéralisme violent ou, pire, de la Réaction
fasciste. On pourrait pleurer de cette guerre des gauches qui débute
par un dialogue de sourds.
Les mots n'ont plus de sens. D'un bord
à l'autre, parfois proches, les mêmes formules ne désignent plus
les mêmes phénomènes. Les constats ne sont plus partagés. Le seul
point d'accord est d'être en désaccord systématique.
La démarche de Sarkofrance était de
convaincre le plus grand nombre que Nicolas Sarkozy avait tort.
Passés quelques moments de flottements euphoriques, les victorieux
de 2012 ne doivent plus convaincre qu'Hollande a raison mais
chercher les points d'alliance et de convergence. La période est à
la nostalgie. A défaut de comprendre le futur, on aime se réfugier
dans l'histoire: le Front populaire de 1936, le Conseil National de
la Résistance de 1944, la victoire de 1981, le faux « tournant »
de 1983, le drame du 21 avril 2002.
Justement, l'histoire nous apprend que
la gauche et la France n'ont jamais gagné par la division.
Jamais.
Billet publié sur 365mots.com. Merci à Custin d'Astrée.