- Traduit du serbo-croate par Boris Lazić
- source : Recours au Poème
La flamme du cierge rien n’éclaire, c’est à peine si elle crépite
luttant pour le souffle. Cette chambre est une boite acoustique
où les objets s’interpellent à travers l’obscurité.
Le râle du vieux frigo et le grincement des articulations
"rhumatiques" du lit sont la plus triste des élégies.
Voilé du linceul de l’insomnie, ton corps est un oignon dans le givre,
trop émoussé pour pouvoir penser.
L’arrêt de la vie, simple sagesse de la tique sur la branche,
cette princesse du farniente. L’inaction te pèle,
elle te libère de tous tes mois amoncelés, de la langueur après le passé,
de l’effroi face à l’avenir. Circulation du sang ralentie,
mélasse sucrée, épaisse, dans une ruche scellée par de la cire,
coeur qui paresse autant qu’une volée en hivers. Tu amoindris
le volume d’espoirs et de désirs, tu dissous les souvenirs.
Au bout du compte, sans toi il n’y a plus de douleur, car lorsque tu
te soustrais, humble, au monde, le monde n’a plus sur qui
se jeter. Une matinée limpide. Un pré sous la neige.
Le vent défait le blanc duvet des chardons. Et un corbeau.