RENTREE LITTERAIRE 2013- parution 5 septembre
Editions Liana Levi
Un roman magnifique, mon premier coup de coeur de la rentrée.
Voici en avant première, le deuxième roman de Lionel Salaün, l'auteur du Retour de Jim Lamar, roman "américain" très remarqué à sa sortie en 2010, l'histoire d'un vétéran du Vietnam qui revient dans son village natal du Missouri après des années d'absence. Un retour difficile, non désiré par ceux qui sont restés....
Dans son deuxième opus, il s'agit encore de l'histoire d'un retour d'un homme mais dans la France traditionnelle des quartiers et des banlieues de province, des années 50 aux années 80.
Le Bel-Air est le bistrot du coin, où l'on boit le café ou le ballon de blanc sur le zinc, où l'on écoute le juke-bo, où l'on joue au baby-foot, où l'on se raconte les ragots du jour. A côté, sur la colline, la cité du coin, où vivent artisans et ouvriers. C'est dans cette cité de province qu'on grandi Franck et Gérard. Le premier, seul avec sa mère, le deuxième dans le café Bel-Air de ses parents, Monsieur et Madame Lecreux.
Franck, le solitaire, le révolté, l'amoureux. Gérard, le débonnaire, le futur bistrotier, qui, comme son père, casserait bien du "crouille". C'est le début de la guerre d'Algérie et leurs chemins vont diverger. Des années plus tard, au début du roman, alors que les pelleteuses détruisent les barres de la cité, Franck revient au Bel-Air s'expliquer avec Gérard....
Une très belle histoire d'amour et d'amitié gâchée sur fond de roman d'apprentissage et de roman social. Lionel Salaün restitue avec brio l'atmosphère et la sociabilité des années 50 : le racisme ordinaire au sein d'une communauté de petites gens, envenimé par le débat sur la guerre , les bruits et les odeurs du café du coin. Il y a les rancoeurs des vieux, ceux qui ont vécu la chute de la Nation France à la débâcle de 40 et à Dien Bien Phû, et les rêves des jeunes sur lesquels pèse la menace de l'enrôlement.
Un fusil, une jeune femme aimée, la guerre....Tous ces éléments vont se rencontrer mais pas de la manière dont on l'attend...
C'est en ça que réside la talent de conteur de Lionel Salaün. Le récit est habilement construit (le passé entre la boucle du présent, au début et à la fin) et nous réserve à chaque fois des surprises, loin des stéréotypes. Les personnages secondaires sont hauts en couleur : il y a l'image traditionnelle du cafetier et de l'adjudant raciste mais aussi le formidable personnage de Monsieur Louis, gentleman perdu dans la Cité, qui conduira Franck sur les chemins de la liberté, à ses risques et périls.
Et que dire de l'écriture ? Simple et en même temps fougueuse, qui dit les bruits et les odeurs mais aussi les visages qui reflètent les émotions. Des phrases qui disent la fougue de la jeunesse et aussi la révolte et l'amertume.
Un beau récit romanesque qui pourra émouvoir les plus âgés comme les adolescents.
Le site de l'auteur : www.lionelsalaun.fr