Photo L'Osservatore Romano
Lundi, le Pape a reçu à Rome en audience privée le cacique Qom Féliz Díaz, accompagné de son épouse ainsi que du Prix Nobel de la Paix argentin Adolfo Pérez Ezquivel, qui avait déjà été reçu en avril, et du Père Francisco Nazar, vicaire épiscopal pour les peuples amérindiens du diocèse de Formosa, la Province homonyme du nord-est de l'Argentine.Le cacique Díaz milite actuellement pour le respect des droits de sa communauté sur ses terres ancestrales et pour le respect de sa culture. Un conflit politique l'oppose au Gouverneur de Formosa, sur lequel il a, en vain jusqu'ici, réclamé la médiation de la Présidente Cristina de Kirchner, qui n'a toujours pas accepté de le recevoir (elle semble vouloir ne surtout pas désavouer le Gouverneur, qui est de son camp politique).
Cette entrevue romaine n'avait pas d'autre but, semble-t-il, que de braquer le projecteur sur la situation des Améridiens qui luttent pour la reconnaissance de leurs droits non seulement en Argentine mais sur tout le sous-continent. Les trois personnalités ont ensuite donné une conférence de presse où il apparaît que le Pape n'interviendra pas dans le différent politique argentino-argentin mais espère sans doute inciter Cristina de Kirchner à faire un geste pour pacifier une situation de notoriété publique depuis plusieurs mois et que dénoncent les Indiens qoms depuis de nombreuses années.
Página/12, très kirchnériste mais proche par ailleurs des revendications des peuples originaires (comme on les désigne désormais dans le politiquement correct argentin), a rendu compte de manière très objective de la rencontre, en employant systématiquement l'expression complète de Pape François (alors que dans les articles hostiles, les journalistes de ce quotidien parlent sans aménité de "Bergoglio" tout court).
Clarín et La Nación y sont eux aussi allés de leur article, sous la plume respective de leurs correspondants à Rome, en mettant Cristina en joue tout en glosant sur l'appel répété du Pape au dialogue entre les différentes sensibilités politiques. C'est La Nación qui a fait cependant le plus fort dans l'acrobatie politicarde : l'article sur le Pape qu'elle a mis en relief ne concerne pas l'audience accordée à Félix Díaz mais le récit quelque peu allumé d'une soi-disant guérison miraculeuse d'une Argentine établie en Espagne et qui aurait été guérie d'un cancer (1) après une Audience générale où le Pape, à peine installé, l'a prise dans ses bras. Et le voici déjà fort expéditivement canonisé !
Pour aller plus loin : lire l'article de Página/12 lire l'article de Clarín sur la rencontre elle-même lire l'article de Clarín sur l'analyse politique du fait (anti-kirchneriste bien entendu) lire l'article de La Nación, qui met à disposition de ces lecteurs une vidéo de la conférence de presse donnée après l'entretien lire l'article de Radio Vatican en espagnol (très succinct) lire l'article de Radio Vatican en français (un tout petit peu plus dissert) Et pour le folklore, l'article azymuté de La Nación sur le prétendu miracle.
(1) Cette dame était alors sous protocole de soins. Donc pour le miracle, on repassera. Il ne peut pas y avoir de déclaration de guérison inexplicable lorsque le malade est en cours de traitement. Et en plus, là, il s'agit d'un vivant. Tout en nous réjouissant de l'amélioration que cette dame déclare connaître dans sa santé (et après tout pourquoi pas ? la joie, la fierté, le patriotisme sont des médicaments très puissants), passons à autre chose.