Titre original : Mystic River
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Clint Eastwood
Distribution : Sean Penn, Kevin Bacon, Tim Robbins, Laurence Fishburne, Eli Wallach, Emmy Rossum, Marcia Gay Harden, Laura Linney, Kevin Chapman…
Genre : Drame/Policier/Adaptation
Date de sortie : 15 octobre 2003
Le Pitch :
Jimmy, Sean et Dave sont amis d’enfance. La disparition de la fille de Jimmy, Katie, va les réunir et faire resurgir de vieilles blessures…
La Critique :
Clint Eastwood est un réalisateur que l’on a tendance à porter aux nues, malgré ses engagements politiques ambigus et son aspect sombre qui semble n’avoir pas eu de réelle incidence sur sa carrière et la considération dont il a bénéficié tout au long de sa carrière, qu’il s’agisse de son statut d’acteur ou de metteur en scène. Et ce n’est pas ce film qui contredira le consensus établi. Adapté du roman éponyme du célébrissime Denis Lehane, un maître du roman noir qui a notamment écrit Gone Baby Gone ou encore Shutter Island, Mystic River s’imposait comme la matière parfaite pour un Clint qui sait à merveille créer des atmosphères sombres et cultiver des personnages complexes avec une certaine intelligence doublée d’élégance. Le résultat est à la hauteur des attentes tant pour les lecteurs du roman que pour les fans d’Eastwood.
La force du film repose sur ce trio de personnages, autour duquel l’ensemble de l’intrigue s’articule. Trois individus qui forment littéralement le point de gravité du scénario. Une histoire pleine de noirceur qui nous est dévoilée par petites touches au fil du métrage.
En effet, la mort atroce de Katie va faire remonter à la surface un événement traumatisant pour les trois enfants devenus adultes et qui semblent ne s’être jamais remis de l’enlèvement de Dave et du viol qui a suivi. Cet incident a complétement imprimé la trajectoire des ces trois personnages qui ont pris des voies différentes et qui font se télescoper à nouveau lorsqu’on nouveau drame frappe à leur porte…
Ces personnages étant le cœur du récit, ils doivent être incarnés par d’excellents acteurs, capables de leur donner vie de manière crédible, subtile et juste. Et de ce côté, Eastwood a sorti l’artillerie lourde : Sean Penn est réellement brillant, dans son rôle de voyou brisé par la mort de sa fille qui se réfugie dans une vengeance délétère et qui semble lui coller à la peau. De toute façon, Penn est fait pour incarner des personnages borderlines. Tim Robbins est également parfaitement juste dans son rôle de victime qui essaie tant bien que mal de recoller les morceaux.
Le seul bémol serait à adresser au personnage de Kevin Bacon, qui apparait comme étant assez creux et vide, se contentant de son rôle de policier droit dans ses bottes malgré un problème conjugal dont on ne sait rien. Dommage qu’il n’ait pas été développé plus avant, car il peine à se hisser au niveau des deux autres et encourage moins d’empathie. Car c’est là que le film est fort. Quand on éprouve de l’attachement pour ses personnages, même si l’on réprouve leurs actes.
Le scénario fait entièrement de convergences et de cycles et d’ailleurs particulièrement soigné et permet de retrouver ce petit détail qui fait la saveur des films d’Eastwood : les rapports humains. Regardez Million Dollar Baby ou Un Monde Parfait : ne s’agit-il pas finalement de simples rencontres, de collisions entre des êtres qui ont plus en commun qu’on ne pourrait le penser de prime abord ? Certaines séquences sont particulièrement touchantes, de différentes manières. Celle où, par exemple, Jimmy comprend que c’est le cadavre de sa fille qui gît dans le parc est poignante tout comme celle où les anciens amis se remémorent le jour de l’enlèvement de Dave. Bref, une intrigue noire mais qui échappe aux clichés et au manichéisme ambiant dans le cinéma hollywoodien.
La mise en scène est simple, efficace et élégante. Elle souligne à merveille ses liens particuliers qui unissent les personnes. La photographie est, une fois n’est pas coutume, crépusculaire quoi que plus sombre que d’ordinaire. La bande-son est encore à porter au crédit de Clint et de son fils, qui font un très bon boulot avec des thèmes sobres et parfaitement à propos.
@ Sacha Lopez