On y est monté, juste pour tremper nos mouches, le type de la météo nous avait prévenu… le temps ne serait pas clément...mais à ce point, on ne s’y attendait pas. L’Aubrac que j’aime tant ressemblait à une prairie normande parsemée de touches jaunes vives qu’étaient les genets en fleurs. Pas le moindre pélerin, personne à l’horizon, des bourrasques de vent apportaient une pluie qui cinglait le visage, un vrai temps d’automne. Le Bès, lui était en ordre et on s’y est précipité comme des enfants. Note première rivière, nos premières truites, instantanément, je ne sentais plus le froid et j’avais rajeuni de…40 ans… (hé oui!) mais sur le Bès, rien, pas la moindre activité, bien sûr quelques sedges traversaient l’eau noire en tortillant, mais aucun ne se faisait gober. La nymphe ? Vous êtes fous ! On est sur le Bés ! Tout en sèche, toujours ! Les truites n’avaient pas faim, on les comprend, avec ce que la flotte leur amène dans la gueule, elles ont eu assez pour se nourrir pendant plusieurs mois ! Autant les autres années, à peine votre mouche passe-t-elle le long de la rive (vraiment près) qu’il faut des réflexes de karatéka pour férrer ces noiraudes. Là, rien, toutes les berges sont passées au peigne fin tous les courants, tous les gourds… rien, le froid a calé tout le monde. De toutes façons, elles ont le ventre plein et je ne vois pas ce qui pourrait les faire monter. Nous aurions peut-être du essayer les autres ruisseaux, le Riou Mau, Greuzette… plus à l’abri. Je tente un dernier lancer au gourd de la bouteille, un pléco. Paf ! à peine posé, déjà saisit ! Ha, elle n’est pas bien grande, mais pour ici, c’est une Grosse ! Ventrue comme une truite normande, grasse et douce sous les doigts. Je comprends le peu d’intérêt que les truites ont porté à nos mouches. Elles sont gavées comme des veaux pour la foire ! En remontant des gorges, fier de ma prise, Jacky me rappelle un vieux dicton, »Bès est capricieux, Bés tire par les pieds, attention de ne pas y glisser » ! Et paf ! avec mes belles semelles de feutre toutes neuves, tel un danseur à la patinoire, je fais une double boucle piquée et j’atterrris dans la bouse de vache sur laquelle je venais de glisser. Il faut toujours rester humble, sinon on est humilié. Plus tard, Jacky en a fait trois sur le Riou Mau, mais des plus petites. Heureux et transis nous nous sommes réchauffés « Chez Remise » ou Fred et Isabelle nous on servi de la bonne soupe, comme en hiver. Nous étions le premier jour de l’été et je puais la bouse.