Cette semaine, il s’est passé sur le plan économique plusieurs choses importantes, qui ne peuvent qu’alarmer ceux qui ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre. Évidemment, pour les Français, tout est passé inaperçu, leurs médias étant en service minimum depuis plusieurs années du côté économique.
Ainsi, en Chine, on a assisté mercredi et jeudi à un véritable blocage interbancaire, tout à fait similaire à ce qu’on avait pu observer en septembre 2008 à la suite de la chute de la banque Lehman Brothers. Dans la foulée, la banque centrale chinoise a démenti toute faillite bancaire (tout en intervenant, semble-t-il, à hauteur de 50 milliards de Yuan, soit plus de 6 milliards d’euros), ce qui n’empêche pas de se demander pourquoi le marché interbancaire chinois s’est à ce point crispé en quelques heures. En France, seuls quelques timides articles dans la presse firent mention de la panique observée, tentant de l’expliquer par la volonté du gouvernement chinois d’assainir son marché bancaire, un peu trop lâche dans les conditions d’octroi de crédit.
En pratique, peu importe la raison : la situation s’est à l’évidence dégradée en Chine, qui n’est plus un petit marché exotique loin des centres d’affaires occidentaux. Par voie de conséquence, les places boursières européennes et américaines se sont elles-mêmes assez vite tendues. Le bilan de la semaine est assez bien résumé dans cette interview de Chris Martensen, gérant de fonds :
On notera au début de la vidéo (2:08) qu’après avoir constaté que tout le monde est actuellement en train de vendre et de se jeter sur le dollar américain et que tout ceci ressemble fort à l’année 2008, le gérant pose la question : « Si ce n’est pas une crise de liquidité, qu’est-ce que c’est ? » ; il confirme en outre sa prédiction effectuée en avril de cette année d’un krach des marchés boursiers de l’ordre de 40% (vers 2:45) et s’étonne, vers 7:08, de la capacité plus que réduite des planificateurs centraux à réellement influer sur les tendances macro-économiques.
On ne peut pas lui donner tort : les effets cumulés des bidouillages monétaires de la BCE et de la Fed n’ont pour le moment permis que de conserver les marchés artificiellement haut, sans que les bases économiques s’assainissent le moins du monde. Les dettes des pays occidentaux sont encore plus énormes, la fragilité du système bancaire internationale s’est même accrue suite aux expériences chypriotes qui ont été vues comme une magnifique répétition pour le reste des pays à risques (à tel point, d’ailleurs, que les banquiers de ces pays sont toujours très nerveux lorsqu’il s’agit d’établir des plans opérationnels pour gérer les faillites bancaires, comme en atteste l’échec des dernières négociations entre les ministres des finances de l’UE).
Cette redirection des flux financiers sur le cash américain explique en partie l’érosion nette du prix de l’or ces derniers jours, redirection à laquelle il faut ajouter … un nouvel appel de marge dont le timing est particulièrement judicieux puisqu’il permet à JPMorgan, le teneur du COMEX, de limiter la casse alors qu’il fait face actuellement à une demande exceptionnelle de livraison physique d’or, au point que les stocks officiels sont à leur plus bas historique. Encore une fois, les mouvements violents constatés sur le métal précieux, dont j’avais déjà parlé il y a quelques mois, sont logiques à mesure que les marchés, monétaires notamment, se crispent dans des proportions de plus en plus fortes.
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Pendant ce temps, en France, le président Hollande, dont chaque apparition publique est ponctuée de pluie, d’orages ou de tornades, persiste à voir dans l’avenir une amélioration notable de la situation. Et si l’on en reste aux seuls éléments économiques et financiers, force est de constater qu’au mieux, il ment (puisque dans ce cas, il connaît la situation réelle), ou au pire, c’est un parfait crétin (dont l’optimisme camoufle mal une totale incompétence).Ici, on pourrait s’attarder par exemple sur les problèmes informatiques récents du progiciel Chorus, qui permet à l’État français de gérer sa dépense (pour rappel, on parle d’un milliard d’euros par jour). Certains y verront un petit souci passager (comme, sans doute, pour le logiciel Louvois), d’autres comprendront que la façon dont a été mise en place les progiciels de l’État et leurs difficultés actuelles sont superbement bien couplées aux problèmes de trésorerie inévitables que ce dernier rencontre alors que les dépenses vont bon train et que les rentrées fiscales, elles, commencent à pâlir.
Ce ciseau dépenses en hausse / entrées fiscales en baisse est parfaitement visible lorsqu’on regarde le faisceau d’informations suivantes : d’un côté, le gouvernement va par exemple tout faire pour baisser les rétributions des livrets A, tout en réintroduisant discrètement, dans la composition des revenus (et donc, des impôts afférents), les variations de valeur des contrats d’assurance-vie en euros (par ici la bonne soupe). De l’autre, on observe actuellement une baisse de la collecte sur ces mêmes livrets. C’est logique, puisqu’ils rapportent et rapporteront de moins en moins. Si l’on ajoute l’agacement des partenaires européens, avec la grogne des Commissaires européens (et de certains financiers influents) devant une France qui ment et triche sur son économie, si l’on comprend qu’au moindre frémissement des taux d’emprunts des bons du Trésor français (comme actuellement sur les bons américains), tout va partir en sucette bien plus vite que ce peut gérer un Moscovici manifestement pas à la hauteur, on ne peut pas afficher l’optimisme quasi-béat du Hollande aux commandes d’un pays atone.
En février, j’estimais, au vu de certains indicateurs peu réjouissants, qu’un grain majeur arrivait. Mon impression se confirme…