Coluche a pour sosie Henri Giraud

Publié le 23 avril 2008 par Stephanesagas

Henri Giraud est un artiste qui avait déjà ses lettres de noblesses avant d’endosser le costume de Coluche et d’entrer en piste sur les planches de Sosyland.

Dès l’âge de 6ans, il s’exprima comme musicien. A partir de là son talent s’est développé pour notre plus grand bonheur comme la palette des couleurs de l’arc en ciel : en tant que comédien, chanteur, homme de théâtre, qui réalise des courts métrages, pratique l’animation, la ventriloquie, le jonglage, la magie, les marionnettes, et... les imitations.

Auteur ou metteur en scène pour d'autres artistes, il est également co-auteur d'une comédie musicale "La belle vie de Sarah Bel" créée en novembre 2006.

Depuis 1987, après plus de 1600 représentations, de nombreuses "premières parties" de vedettes, plusieurs télévisions, et même une participation dans le film "Podium"….Rideau…Voici Monsieur Henri Giraud !

Depuis quand vis-tu dans le monde des sosies ?

Depuis 20 ans. Avant j’étais comédien, mais j’imitais Coluche comme ça, pour les copains. Quand il est mort, j’ai décidé de monter un spectacle hommage. Il m’a fallu un an pour le préparer et le faire connaître. J’ai fait quelques spectacles fin 1987, mais je considère que ça a vraiment démarré en Juin 88.

Comment as-tu travaillé ton personnage ? Quels ont été les contacts nécessaire à prendre, les recherches à faire…expliques-nous ?

Comme je l’ai dit, j’étais déjà comédien et chanteur quand j’ai créé ce spectacle. J’avais donc l’habitude de la scène, de tenir un public. Pour la ressemblance physique, c’est mes parents qui ont tout fait...sourires. Pour le reste, j’étais fan de Coluche depuis ses débuts. Ca n’a donc pas été difficile d’apprendre ses sketches. Je faisais aussi quelques imitations vocales dont celle de Coluche. Jusque là pas de difficulté majeure donc. J’ai travaillé beaucoup la démarche, la gestuelle, et je me suis mis à la guitare pour jouer « misère ». Le plus difficile a été d’apprendre à jouer le « temps des cerises » au violon avec des gants de boxe, mais quel bonheur quand j’y suis arrivé ! C’est le clou du spectacle.

Es-tu perfectionniste dans ton rôle de sosie ?

Bien sûr, c’est une question de respect. Respect pour le public et respect pour Coluche. Je me dois d’être au top pour ne pas décevoir les gens qui sont venus me voir et ne pas galvauder l’image de Coluche. Tout doit être impeccable, l’interprétation bien sûr, mais aussi des détails : les costumes, les accessoires. Il faut aussi avoir un comportement irréprochable en dehors de la scène, avec le public, les organisateurs, sans oublier les techniciens son et lumière.

A-t- il été nécessaire que tu ai un agent ? Est-ce ton conjoint ? Quelles sont vos relations ?

Je n’ai pas d’exclusivité avec un agent, je n’en ai jamais eu. Par contre plein d’agents dispersés dans la France entière m’ont mis dans leur catalogue, ce qui me permet de beaucoup travailler (j’en suis à plus de 1800 représentations à ce jour). Je ne suis marié avec aucun d’entre eux J, mais j’entretiens d’excellents rapports avec eux...sourires. Pareil, question de respect réciproque. Certains sont devenus mes meilleurs amis. Avec l’un d’eux j’ai même co-écrit et monté une comédie musicale qui n’a rien a voir avec Coluche : « La belle vie de Sarah Bel »

Que peux dire tes agents de toi ?

Je ne sais pas ce qu’ils peuvent dire de moi. Ce que je souhaiterais qu’ils disent c’est que je suis un artiste sérieux, qui fait bien son travail, qui ne « se la joue pas star », qui est humble et gentil, disponible avec les gens (public, organisateurs), et pas chi… euh… embêtant.

Est-ce que cela a modifié ton quotidien ? Qu’en penses tes intimes, amis, famille et collègues ?

Ca a modifié mon quotidien parce que j’ai abandonné mon premier métier (technicien de laboratoire d’analyses médicales) pour ne me consacrer qu’au spectacle. Mais ça n’a rien modifié, au quotidien, dans le regard des gens, parce que autant j’accentue la ressemblance avec Coluche au moment du spectacle, autant je l’atténue hors scène. Ce qui fait que dans la rue, personne ne se retourne sur mon passage. C’est très confortable. Mes amis, ma famille savent bien sûr quel est mon métier. Mais je ne les gonfle pas avec ça, je ne cherche pas à toujours ramener la conversation la dessus. Finalement, à part avec ma femme et les enfants, on en parle peu. Ce qui les embête le plus c’est que je ne suis jamais là lorsqu’ils m’invitent le week-end.

Vis-tu au boulot ou dans ta ville en sosie ? Pourquoi ?

Oups ! J’ai anticipé la question ! Je n’ai aucune raison de me balader « en Coluche » dans la vie. Je ne suis pas Coluche. J’interprète le personnage de Coluche sur scène, pas quand je fais mes courses. Ce n’est pas un dédoublement de la personnalité, c’est un travail de comédien imitateur.

Comment vis-tu quand tu es en représentation de ton personnage ?

Là par contre je le joue à fond. La voix, les gestes, la façon de marcher, la posture, tout devient du Coluche. Même ma façon de réagir. Je dis ou fais des choses quand je suis dans le personnage que je ne ferais jamais quand je suis moi-même. Même mon vocabulaire change. C’est étonnant. Quand je joue le personnage longtemps, comme sur un tournage par exemple, il me faut du temps pour en sortir. Ca aussi c’est étonnant.

Quelles sont les bons souvenirs avec tes fans ?

Je n’ai que des bons souvenirs. Le plus émouvant, mais qui se répète souvent, c’est quand des mecs, des gros costauds, viennent me voir la larme à l’œil pour me remercier.

Le meilleur des meilleurs souvenirs, c’est un silence. J’étais tournée en première partie des Zouc Machine. Un soir, on a eu 7000 personnes. A la fin de mon passage, je fais un sketch que j’ai écrit en hommage à Coluche. A un moment il y a beaucoup d’émotion et à chaque fois il s’installe un silence que je coupe avec une grosse vanne. Mais là, le silence total de 7000 personnes debout sur une place qui ne bronchent pas, c’est magique ! L’émotion était palpable ! Tu voudrais que ça ne s’arrête pas ! Tu te dis : tu les as eus, ils sont tous dans ton trip ! C’est inoubliable

Ton regard a-t-il changé à l’égard de l’original, depuis que tu le représentes ?

Oui et non. J’étais fan, donc déjà convaincu par le personnage de Coluche avant de le jouer sur scène. Ce qui me surprend, c’est que je me rends compte que sa popularité, l’amour que les gens ont pour lui, tout ça est intact 21 ans après sa disparition ! Même des jeunes qui ne l’ont pas connu vivant connaissent le personnage, ses sketches ! Combien d’artistes, et surtout d’humoristes peuvent en dire autant ?

As-tu eu l’occasion de rencontrer ton héros ? Comment cela s’est-il passé ? Gardes-tu des contacts ?

Malheureusement non, c’est un de mes grands regrets.

Je l’ai vu sur scène, et c’est un fabuleux souvenir. J’étais avec des copains. On riait déjà avant le spectacle, on a ri beaucoup pendant et longtemps après. C’était à la grande époque des « interdits ». Quelle soirée !

As-tu décelé des ressemblances dans vos vies respectives entre l’original que tu représentes et toi-même ? Qu’en penses-tu ?

Non. En fait on est même très différents. On est tous les deux fils d’ouvriers, mais il a grandi en banlieue parisienne, moi dans une petite ville de province, c’est très différent. Il a perdu son papa très tôt, j’ai eu la chance de garder le mien jusqu’à ses 90 ans. Il a fait plein de petits boulots pour s’en sortir, j’ai suivi un parcours scolaire normal jusqu’au DUT, puis j’ai travaillé au labo de l’hôpital de Roanne. Il a « brulé la vie par deux bouts », moi je suis plutôt sage (pas d’alcool, pas de cigarette). Il ya plein d’autres différences.

La principale étant sans doute que lui, il avait un fabuleux talent !!

As-tu déjà bluffé avec ta ressemblance ? Allez, vas-y…

Jamais ! D’abord parce que je n’ai interprété le personnage qu’après sa mort, donc il était difficile pour moi de me faire passer pour lui ! D’autre part, je crois que si ça avait été possible, je ne l’aurais jamais fait, sauf peut être pour un canular genre « surprise sur prise »

As-tu un petit secret, que tu pourrais aimablement nous délivrer, une passion secrète ?

J’aurais voulu être sosie de Mylène Farmer, mais c’était impossible : je suis brun J. Mes secrets je les garde pour moi. Ma passion, qui n’est pas secrète, c’est ma tribu : ma femme et mes quatre enfants. Je suis prêt à tout pour eux.

Quel regard portes-tu sur ta carrière de sosie ?

J’ai réussi un truc super précieux : j’arrive à vivre de ma passion : la scène. Bien sûr, la partie « sosie » représente 80% de mon activité, mais je fais d’autres choses. Je joue dans d’autres spectacles. J’écris beaucoup, pour moi (à la manière de…), pour d’autres artistes ou pour des troupes.

Pour le coté « sosie », je crois restituer une image fidèle de Coluche, respectueuse du personnage. C’est en tous cas les retours que j’ai de la part du public.

Jusqu’où géographiquement es-tu allé pour te produire…racontes…

Le plus loin que je sois allé jouer, c’est en tournée à La Réunion. Malheureusement, je suis arrivé là-bas au plus fort de la crise du Chikungunya. Je n’ai pas pu profiter comme je l’aurais voulu des magnifiques paysages de l’île, et surtout les spectateurs n’étaient pas nombreux à se risquer le soir, en plein air, sous les projecteurs, à la merci des moustiques ! J’espère y retourner un jour, dans de meilleures conditions.

As-tu côtoyé des stars ? Quels sont les échanges que vous avez eu ?

Tout dépend ce qu’on appelle « star ». Si on parle de Johnny ou Céline Dion, alors non. Si on parles des vedettes des années 70 ou 80 alors oui, et un paquet : C.Jérome, Herbert Léonard, Patrick Juvet, Patrick Hernandez, Alain Turban, Marie Myriam, Jean-Marie Bigard, Fanny, Patrick Topaloff, Début de Soirée, Jane Manson, Jean-Luc Lahaye, André Lamy, Boney M., Jacques Maillot, Dave, Les Forbans, Les Vagabonds, Jean Roucas, Fabienne Thibault, Carlos, François Valéry, Stone et Charden, Peter et Sloane, Alan Williams (Les Rubettes), Zouc Machine, etc…

Ca s’est toujours bien passé, même si, lors de notre première rencontre et avant de me voir sur scène, certains étaient dubitatifs sur ma prestation. Ils avaient tous connu le vrai Coluche et étaient inquiets de ce que j’allais en faire. Après avoir vu la réaction du public, même les plus septiques ont changé d’avis et sont devenus très sympas avec moi. Je suis même devenu ami avec certains.

Es-tu allé sur des plateaux télés ? Comment cela s’est-il passé ?

J’ai participé à quelques émissions telles que « Double jeu » animée par Thierry Ardisson, et des reportages ont été tournés sur moi, notamment pour « Thé ou café » l’émission de Catherine Ceylac. J’ai aussi été contacté par de nombreuses émissions de télé-réalité, mais je les ai toutes refusées.

Globalement je suis très méfiant des émissions où on ne nous demande pas de montrer ce qu’on sait faire, de parler de ce qu’on fait, mais où on est juste jugé par un jury ou par le public sur notre apparence. Comment montrer en quelques secondes ce qu’on fait sur 1h30 de spectacle ?

Ca peut être très dévalorisant, surtout qu’on n’a aucun moyen de contrôle sur le montage. Et risquer de foutre en l’air le travail de 20 ans sur 2mn d’émission, je pense que ça ne vaille pas le coup. C’est juste mon opinion personnelle, et je ne juge absolument pas les sosies qui participent à ces émissions. Comme dit la chanson : « chacun fait fait fait c’qui lui plait plait plait »

As-tu tourné dans des films ? Quelles sont tes impressions ?

J’avais tourné plusieurs courts métrages avant de jouer Coluche. Depuis, j’ai tourné dans « Podium » le rôle du sosie de Coluche. Je suis resté 5 jours sur le tournage, tourné plusieurs scènes, il n’en reste que quelques secondes dans le film.

J’ai aussi été choisi récemment pour jouer le personnage de Coluche dans « Rien dans les poches » un film de Marion Vernoux pour Canal +, produit par Alain Chabat, avec Emma De Caunes. Cette fois deux jours de tournage, mais une scène avec Emma. Je pense que cette scène restera au montage.

A chaque fois, ça a été des expériences très enrichissantes. La découverte d’un autre monde, de rapports différents avec les gens, de rythmes de travail différents aussi. C’est tout à fait autre chose que le spectacle sur scène. J’ai hâte de pouvoir renouveler l’expérience. Si des producteurs ou metteurs en scène lisent cette interview…sourires 

Travailles-tu avec d’autres sosies ?

Bien sûr, très souvent. Pas assez à mon goût car j’adore être avec d’autres artistes, mais c’est un plaisir à chaque fois. Certains sont devenus au fil des années de véritables amis.

Je regrette qu’aucun producteur n’ait l’idée de faire une tournée genre « Age tendre et tête de bois » juste avec des sosies. Je suis sûr que ça marcherait (et ça coûterait moins cher)

Fais-tu des tournées ? Comment t’organises-tu ? C’est avec d’autres sosies ?

J’ai fait quelques tournées en effet, mais pas avec des sosies. J’ai fait une vingtaine de dates avec les Zouc Machine, une quinzaine avec les Vagabonds, et une trentaine avec Fabienne Thibeault. C’est un vrai bonheur. Outre le plaisir sur scène, avec un public souvent très nombreux (plusieurs milliers de personnes), tu as le temps de tisser des liens avec les autres artistes. C’est ça aussi l’intérêt de notre métier : rencontrer plein de gens différents, les découvrir, les comprendre.

Quels conseils donnerais-tu à quelqu’un qui atterrit à Sosyland ?

Je ne sais pas si je suis qualifié pour donner des conseils. Je dirais juste : « N’oublie pas que la vedette, c’est l’original, pas toi. Reste humble et conscient de ta vraie place »

As-tu une prestation prochaine à nous transmettre ?

Je joue mon spectacle tous les week-ends à travers la France, mais on peut noter que je jouerai cet été sur les ferries de la SNCM entre Marseille ou Toulon et la Corse. Et puis guettez la sortie de « Rien dans les poches » sur Canal+ à la fin de cette année

As-tu réalisé quelque chose d’artistique comme un disque, un film… ?

Oui, j’ai enregistré un CD de cinq sketches écrits « à la manière de… ». Des textes que j’ai écrits en essayant de garder le ton de Coluche. L’un de ces sketches a été écrit avec Yann Moix spécialement pour le film « Podium ». On n’en entend que deux répliques dans le film, mais ce sketch « la sositude ça n’existe pas » parle avec humour de notre métier.

Ton site et comment te contacter :

Mon site : www.henrigiraud.com.

J’ai aussi un espace sur MySpace : http://myspace.com/henrigiraudsosiedecoluche

Sur les deux on peut laisser des commentaires. On peut aussi m’écrire à giraudhenri@aol.com

Je te remercie et te souhaites tous mes voeux à Sosyland !