Longtemps ai-je aimé ce film.
Il faut dire que le savoureux mélange de ses ingrédients hors normes avait de quoi enflammer mon enthousiasme et calmer mes attentes. Une grande partie de ce qui a trituré mes méninges
adolescentes et fasciné mon regard de jeune cinéphile prenait corps dans ce troisième volet d’une saga désormais incontournable, scellant dans le marbre un véritable mythe vivant.
Tout d’abord, la Quête. Ni plus ni moins que de celle du Graal. D’abord présentée en des termes similaires à celle de l’Arche dans le premier épisode (en gros, il s’agit de la quête ultime de l’artefact ultime), elle prend par moments, et à grands renforts de petites phrases insistantes, des allures d’accomplissement psychique, transfigurant le but et le chercheur. Bien que toujours fortement ancrée dans la tradition judéo-chrétienne, la mystique liée au Graal s’enrichit en outre de toute une mythologie guerrière liée au cycle arthurien. Il est patent que les scénaristes aient voulu rehausser le ton et réajuster le tir après un Temple maudit jubilatoire mais déroutant : efficacité avant tout, avec un itinéraire clair parsemé d’embûches quasi-initiatiques, dans une progression très ludique avec son lot de fausses pistes, de chausse-trappes, d’énigmes et d’adversaires coriaces, ainsi que des alliés aussi improbables qu’obscurs (une confrérie défendant le Graal). Il faut bien entendu aller sur le terrain, et c’est reparti pour un périple sur trois continents, en des lieux somptueux plutôt bien mis en valeur (ah, le temple de Petra en Jordanie !). Toutefois, tout le dynamisme et l’ingéniosité d’Indy se trouvent soudain implémentés par un élément incongru.
Et c’est là qu’intervient l’atout numéro deux de la Dernière Croisade : ce « rat de bibliothèque » qu’est le père, Henry Jones Sr. Impossible de ne pas penser à Guillaume de Baskerville lorsqu’on tombe sur l’individu, malgré un caractère plus candide, plus ouvertement antinomique de son rejeton, ceci afin de créer un duo insolite dont les étincelles stimulent le film.
Car, bien que les ingrédients soient de très haute tenue, l’ensemble, objectivement, peine à tenir la route. C’est vrai, je plaide coupable : j’ai longtemps adoré ce film, régulièrement émerveillé par la verve de Sean Connery, l’énergie de Ford, les paysages extraordinaires et quelques trouvailles énormes (l’autographe d’Hitler !). Mais je dois à présent reconnaître que sous cet humour bon enfant nettement plus présent se cachent mal quelques faiblesses malencontreuses, résultant sans doute d’un cahier des charges très lourd (après tout, il fallait « boucler la boucle » et édifier un monument à la gloire de l’aventurier en déflorant ses origines, tout en plaisant au plus grand nombre). Alors on a droit à des facilités parfois gênantes, des raccourcis scénaristiques inhabituels et quelques ficelles trop grosses : là où Belloq se livrait à un rituel hébreu pour ouvrir l’Arche, où les rituels des Thugs se faisaient dans leur langue, on a ici un chevalier français du Moyen-Age qui s’exprime dans un anglais moderne sans aucun souci.
Si cela n’entame pas la magie réjouissante du film ni son charme incroyable, je dois avouer qu’il y perd un peu de sa majesté, de son aura, à l’image de son finale trop trivial pour la grandeur promise.
Lire également : l’avis de Vladsur son blog.
Ma note (sur 5) :
4
Titre original
Indiana Jones & the Last Crusade
Mise en scène
Steven Spielberg
Production
Lucasfilms & Paramount, distribué par UIP
Date de sortie France
18 octobre 1989
Scénario
George Lucas, Menno Meyjes, Jeffrey Boam & Philip Kaufman
Distribution
Harrison Ford, Sean Connery & Denholm Elliott
Durée
127 min
Musique
John Williams
Photographie
Douglas Slocombe
Support
Blu-ray Paramount region All (2012)
Image
2.35:1 ; 16/9
Son
VOst DTS HD-MA 5.1
Synopsis : L'archéologue aventurier Indiana Jones se retrouve aux prises avec un maléfique milliardaire. Aux côtés de la cupide Elsa et de son père, il part à la recherche du Graal.