Qui dit nouvelle semaine dit nouveaux films – et nouvelle thématique ! Cela ne vous aura sans doute pas échappé mais je suis très sensible aux films militants (preuve en est : No trône actuellement en haut de mon palmarès 2013). Mercredi, je me suis donc laissée tenter par deux films éminemment engagés : The Bay de Barry Levinson (aka le papa de Rain Man et le producteur délégué de la série Oz !) et Diaz, un crime d'état de Daniele Vicari (La Nave Dolce, Il mio paese) que je ne connaissais pas pour ma part.
Le premier évoque en filigrane la crise écologique actuelle et l'irresponsabilité des gouvernements à ce sujet, le second dénoncequant à lui l'une des répressions européennes les plus odieuses et l'impunité des bourreaux face à la justice italienne. Bien que les thèmes soient différents, il est intéressant de noter que Barry Levinson etDaniele Vicari ont tous deux recours à la même méthode : points de vue multiples (avec de nombreux personnages) et chronologie bousculée.
En revanche, ils n'ont pas le même rapport au réel : The Bay s'appuie sur quelques éléments véritables qui le rendent plausible mais demeure un faux documentaire, Diaz, un crime d'état s'appuie lui en revanche sur des faits avérés. Reste à savoir lequel m'a le plus convaincue...
- The Bay (Barry Levinson) Une chronique terrifiante centrée sur un cataclysme écolo-endémique survenu le 4 juillet 2009 à proximité dela baie de Chesapeake et étouffé par le gouvernement. Un faux documentaire extrêmement réaliste du fait des éléments vraisemblables sur lesquels il s'appuie et du casting composé quasi exclusivement d'inconnus. La variété des personnages tend qui plus est à renforcer le caractère épidémique du mal qui frappe la station balnéaire et donc sa crédibilité. L'horreur est également rendue plausible grâce au found footage qui permet de diversifier la narration au moyen de différents supports probants (rushs journalistiques, caméras de surveillance, sms/mms, vidéos via téléphone portable, caméscope personnel...) et également grâce au sujet (thématique environnementale) qui s'avère d'actualité. Barry Levinson prouve ainsi qu'il maîtrise à merveille la mécanique de la peur : d'abord sensorielle – la première partie du film est essentiellement suggestive, avec notamment un hors-champ tout à fait brillant – puis visuelle et gore, la tension est permanente. Le réalisateur aurait toutefois dû employer autant d'énergie pour créer cette angoisse que pour expliquer ou justifier certains faits. Certaines de mes interrogations (comme la non contamination de la journaliste) sont en effet restées sans réponse. Quoi qu'il en soit, une production solide et effrayante, au montage limpide et accessoirement, un plaidoyer écologique efficace.
En deux mots : hyperréaliste et angoissant.
Le petit plus : pour réaliser The Bay, Barry Levinson s'est inspiré d'un fait réel : la dégénérescence de la flore sous-marine de la baie de Chesapeake, actuellement considérée comme "morte". Afin (je suppose) de générer un électro-choc chez ses potentiels spectateurs, il a également imaginé un parasite qui serait une forme évoluée de l'isopode, un crustacé connu dans les milieux scientifiques pour dévorer la langue des poissons.N'hésitez pas si :
- vous adorez les documentaires anxiogènes ;
- Les dents de la mer vous a traumatisé (on y retrouve le même procédé, toujours aussi efficace d'ailleurs : l'insouciance d'une communauté face à un danger qui vient de l'eau) ;
- vous ne savez pas ce qu'est un isopode (à la fin de The Bay cet horrible parasite n'aura plus de secrets pour vous) ;
- vous n'êtes pas fan du found footage (c'est-à-dire de l'utilisation massive de vraies fausses pellicules dans un long-métrage) ;
- les longs métrages aux enjeux environnementaux ne vous intéressent pas ;
- vous êtes un brin hypocondriaque (je le suis également et je peux vous dire que je n'en menais pas large en quittant la salle) ;
- vous n'avez jamais entendu parler des incidents de Diaz (c'était également mon cas et cela m'a d'ailleurs atterrée, nous devrions tous en avoir connaissance) ;
- les intrigues aux multiples points de vue ne vous dérangent pas ;
- vous désirez en savoir plus sur la législation italienne – et ses dérives – sous Berlusconi ;
- vous êtes hypersensible à la violence (je m'offusque pourtant rarement mais là c'est vraiment insoutenable, j'ai failli quitter la salle) ;
- votre attention s'égare facilement lorsque la chronologie est malmenée ;
- vous déprimez un peu en ce moment (pour affronter une telle atteinte aux droits démocratiques, mieux vaut avoir le moral) ;