Là ou il n’y a pas d’hommes, tâche d’être un homme. Cette michna extraite du Traité des pères est peut-être la plus difficile à mettre en oeuvre, tout au lon de sa vie. Pourquoi? Parce que nous sommes tous, hélas, de salauds.
En acte, ou en puissance.
Vous en doutez? Alors achetez vite ce livre de Claude Lussac (pseudonyme), paru en 2007 , et qui s’intéresse à ce qui caractérise le salaud en entreprise, ce livre faisant l’impasse sur la cohorte de salauds qui jusque là ont animé les soirées de l’humanité, de Cro-Magnon qui a buté Néanderthal à Caïn qui a buté son frère.
Le livre lui-même est structuré en trois parties. Dans la première, l’auteur passe en revue les différents postes de salaud au sein de l’entreprise: du DG au directeur financier, en passant par le DRH, les commerciaux, les actionnaires, les syndicalistes, etc. Tout le monde peut être le salaud d’un autre, il suffit d’y mettre un peu de bonne volonté, ce qui n’est pas si difficile, apparemment.
La seconde partie, qui mériterait quelques mises à jour à l’heure où Twitter et Facebook dominent les médias sociaux, s’intéresse à l’apport essentiel du web dans les comportements de salaud: de l’anonymat au mail en copie cachée, nombreuses sont en effet les techniques qui permettent d’étendre le périmètre fonctionnel d’un salaud en entreprise. Les plus jeunes y acquéreront les rudiments du comportement de salaud, les plus expérimentés y perfectionneront leur style.
La troisième partie, enfin, part du postulat quentrep’on ne naît pas salaud, mais qu’on le devient au fil du temps et de son expérience, ne serait-ce que par la loi qui veut qu’en entreprise, on cherche à progresser en éliminant ses semblables. L’auteur y aborde la notion de salaude, préférée à celle de salope, évidemment trop restrictive et fortement connotée.
Enfin, le livre s’achève sur une étonnante fable qui illustre parfaitement les comportements en entreprise.
Inutile de préciser qu’on rit beaucoup à la lecture de ce livre d’environ 150 pages, qui témoigne d’une longue expérience en entreprise. L’auteur y fut-il l’un des salauds dénoncés au tout début, en quête de rédemption? Ce livre est-il, au contraire, un recueil de bonnes pratiques jamais mises en oeuvre, et le fruit de l’expérience acquise à observer les comportements les plus bas de l’espèce humaine? Nul ne le dit…
PS: la première partie est celle qui m’a le plus interloqué. J’ai enfin compris que, quoiqu’on fasse, on est toujours le salaud d’un autre.