Front de gauche en souffrance

Publié le 19 juin 2013 par Despasperdus

Les dernières législatives partielles confirment que le Front de gauche ne profite pas du discrédit d'un PS qui emporte toute la gauche dans sa chute. Seul le FN progresse en voix et en pourcentages, comme nous l'écrivions hier. Un constat préoccupant mais somme toute prévisible.

Dans "Législatives : la mayonnaise Front de gauche ne prend pas", le taulier des Chroniques du Yéti estime que la stratégie du Front de gauche (FDG) souffre des maux suivants:

  • trop réformiste au plan économique, le plein-emploi, la croissance, la répartition par l'impôt, le SMIC à 1500 euros ? Tous ces éléments de L'Humain d'abord, le programme du FDG, s'inscrivent dans une logique de partage, de réduction du temps de travail, de redistribution des richesses, de progrès sociale qui va à rebours de la logique libérale et productiviste. Réformiste ou révolutionnaire, le FDG revendique surtout un changement de paradigme qui dépasse la seule posture d'opposant et les idées stéréotypées de nos adversaires. En oûtre, le FDG a approfondi sa réflexion depuis la présidentielle sur l'écosocialisme et la VIème République, soit deux axes cohérents qui constituent plutôt des atouts de conquête pour sortir de la logique austéritaire et des institutions de la Cinquième République. Au FDG de présenter, d'expliquer et de convaincre ce qui n'est pas évident dans l'urgence d'une élection partielle où une bonne partie de l'électorat entend sanctionner les forces gouvernantes et zr l'urgence de répondre aux mauvais coups du PS avec sa politique austéritaire de régression sociale.
  • pas assez radical sur l'Union européenne ? je ne sais s'il prônait la sortie de l'euro, le FDG deviendrait plus populaire. Le POI ne l'est guère. Il n'empêche que le FDG devrait envisager publiquement tous les scenarii possibles s'il arrivait au pouvoir, un autre euro mais aussi, en cas d'échec, la sortie de l'euro.
  • trop inscrit dans le spectacle médiatique ? Qu'on le veuille ou non, échapper au médias dominants est une chimère. Et illusoire de croire qu'en employant un langage policé, ces derniers deviendraient complaisants. Les médias dominants sont les chiens de garde d'un système que le FDG combat. Par conséquent, le FDG doit être présent dans tous les médias, quelle que soit l'émission, pour toucher tous les publics, instiller le doute, faire réfléchir et convaincre. Le 1er passage de JL Mélenchon à l'émission des paroles et des actes a donné une visibilité et une popularité jusque-là inconnues à nos idées, et boosté sur le terrain la campagne présidentielle du FDG : ça peut choquer mais pourtant, c'est un constat.

En fait, le FDG me semble handicapé par deux causes :

  • Sa jeunesse. Le FDG n'a que 4 ans d'ancienneté alors que le FN en a 10 fois plus. En 2012, le FDG a réalisé son 1er score national à deux chiffres alors que celui du FN date de 1984. Plus ancien, plus connu, plus implanté, le FN recueille les fruits de son travail, de la complaisance des médias dominants et du soutien de l'oligarchie. Se substituer aux associations existantes pour aller à la rencontre des citoyen-ne-s en souffrance comme le dit l'ami Partageux ? Il le faudrait assurément, mais dispose-t-on vraiment les forces militantes pour être présent sur tous les terrains ?
  • Sa structure : Le FDG n'est qu'un cartel de partis et de micro-partis qui apparaît comme une association de circonstance. Cette forme n'est guère adaptée pour lutter efficacement contre un parti monolithique comme le FN, pour décider collectivement, pour agir et pour donner la meilleure visibilité à nos actions et à nos idées. Ii est impossible en abordant cette question de faire l'impasse sur le PCF. Ce dernier veut-il seulement sauver sa peau, à l'instar du parti radical, ou aller au-delà de lui-même pour faire triompher les idées qu'il porte avec le FDG ? Tant que le PCF fera le grand écart entre l'autonomie du FDG au plan national et la dépendance au PS au plan local, le FDG aura du mal à apparaître aux yeux du plus grand nombre comme une force politique unie et crédible prête à gouverner.

Alors, que faire ? Je vous renvoie aux billets du Cri du peuple, Mauvaise passe pour le Front de gauche, et d'A gauche pour de vrai, Villeneuve Sur Lot: le choc FN pour toute la gauche dont je partage les analyses.

Pour conclure, gardons-nous de la sinistrose. D'abord, n'oublions pas que SYRIZA était encore plus mal loti que le FDG avant le 1er des 9 plans d'ajustement structurel, dits plans d'aide, de la Grèce. L'électorat de gauche s'est détourné du PASOK pour rejoindre le FDG grec. Il a mis du temps, trop de temps. Mais il s'y est mis. Nul doute que le même processus se produira en France à mesure que le PS décevra car ce dernier n'est finalement qu'une étoile morte pour la gauche mais peu s'en rendent compte encore car elle continue de briller.

Ensuite, les élections partielles sont défavorables au FDG parce qu'il ne bénéficie pas d'un effet "marque" comme le FN qui garantit à n'importe quel candidat qui se présente avec l'étiquette frontiste d'obtenir un score honorable en capitalisant tous les déçus.

Enfin, le véritable test aura lieu aux prochaines européennes qui marqueront une étape importante, voire décisive pour le FDG . La campagne sera à la fois très médiatisée nationalement et très militante. Le FDG pourra populariser l'écosocialisme et la VIème République. Ces élections devraient être bien plus favorables au FDG que des élections locales, partielles et guère médiatisées. Elles devraient permettre au FDG de prendre le leadership de la gauche, ce qui ouvrira de nouvelles perspectives...