Jeremy Hackett
Le style anglais ? Jeremy Hackett le connaît sur le bout des doigts. Normal me direz-vous, il l’est (anglais). Un nationalité qui, toutefois, n’a rien d’anodine surtout quand on exerce son premier job chez un tailleur de Bristol. Il a 17 ans et l’avenir devant lui quand il s’y fait embaucher. Mais un an plus tard, il débarque à Savile Row, y apprend les rudiments du métier, sans le sou en poche pour s’habiller. Comme tous ceux de sa génération, c’est donc sur le marché de vêtements seconde main de Portobello qu’il fouine, fouille et trouve les vêtements qui composent sa garde-robe de dandy des grands chemins.Et c’est là qu’il rencontre Ashley Lloyd-Jennings, son futur associé. Tous deux s’étaient mis à vendre des chaussures importées des U.S dans une boutique louée de Covent Garden. C'est un ami parisien qui lui suggére d’ajouter un portant de vêtements au style tradi-britannique, une sorte de “very best of english style” un peu à la manière d’Old England chez soi. L’idée se transforme en succès : la première boutique Hackett, ouvre ses portes sur New Kings Road en 1983, et se voit accueillir une clientèle étrangère soucieuse de dénicher la "pièce" rare. Très vite, les fripes vintage sont vite remplacées par les premiers modèles signés Hackett, dessinés pure tradition british.Même si Monsieur Hackett avoue sans honte avoir une aversion pour les joies du sport, il devient une référence en matière de sportswear... un peu par accident. Deux officiers de l’armée étaient venus le rencontrer (1986), en quête de sponsors pour l’équipe de polo, montée plus tôt dans leur régiment. Idée plaisante, le britannique créé spécialement pour l’équipe des polos, nom Hackett apposé sur le torse. Il s’agissait là des premières et dernières pièces de sportswear de la maison si les vendeurs n’en avaient pas demandé à titre personnel. Et à fortiori, si les clients n’en avaient pas réclamé pour leur propre vestiaire. Le stock -une quinzaine de modèles- était parti en un après-midi.Amusé, Hackett transforme l’essai en réalisation et -en parallèle de ses futures collections sportswear- affiche quelques célébrités à son tableau de chasse : le cavalier William Fox-Pitt, médaillé de concours complet d’équitation à la silhouette typically british(grande, fine, élancée), l’équipe nationale de rugby, un vrai challenge pour les tailleurs qui avaient toutes les peines à prendre leurs mensurations, surtout celles d’un certain Jonny Wilkinson qui provoquait à lui tout seul des files d’attente interminable devant la boutique quand il s’y rendait. Une antithèse du monde footballistique, que la maison ne souhaite pas habiller.Hackett préfère se concentrer sur d’autres figures, ajoutant à son palmarès le soutien aux équipages d’aviron des universités d’Oxford et de Cambridge, à l’équipe de polo du prince William, visiblement pas rancunier envers l’homme qui aurait cherché toutes les excuses du monde pour ne pas disputer un match avec lui. Hackett aurait été jusqu’à prétendre qu’étant gaucher, il était incapable de tenir le maillet. Le prince William lui aurait répliqué que c’était une fausse excuse : il est gaucher lui aussi.
Jeremy Hackett, cinquantenaire, a laissé la direction de l’entreprise à Sven Gaede (ancien Gap Europe). A ses heures perdues il apprécie toujours de fouiner le marché de Portobello à la recherche de tissus de qualité et autres pièces pour décorer son intérieur. Il y a vingt ans, le pouvoir était entre ses mains et celles de son compère Ashley Lloyd-Jennings. Aujourd'hui, le Monsieur reste journellement impliqué dans l’entreprise : Il se passe rarement une semaine sans qu’on puisse le trouver occupé à servir un client dans l’une de ses boutiques. Sa capacité innée à repérer les vêtements et accessoires qui se vendront le mieux est un facteur clé de sa réussite.Fabrice Gil
Hackett17, rue de Sèvres75006 Parist/ +33 1 45 49 18 93www.hackett.com