Voici un entretien avec R. Burnand, gérant chez Moneta Asset Management, tiré du JDF du 19 avril (propos receuillis par Joël Antoine).
« Les paris macroéconomiques sont souvent aléatoires »
Estimez-vous que la baisse sur les petites et moyennes capitalisations est exagérée ?
Tout d'abord, il faut remettre en perspective la baisse commencée l'été dernier .
Elle atteint 33 %, mesurée par l'indice Small 90, mais les cours avaient triplé depuis 2003. Leur progression depuis cette date représente encore un doublement par rapport à ce qui était le plus bas du cycle boursier précédent. Actuellement, les cours prennent en compte un risque assez important de mauvaises nouvelles, ce qui nous rend confiants sur les niveaux atteints en Bourse.
Les chefs d'entreprise sont moins pessimistes que la Bourse. Qui a raison ?
Nous sommes dans une phase de très net ralentissement de la croissance économique aux Etats-Unis, et il peut s'étendre au Royaume-Uni et en Espagne avec la crainte d'une propagation au reste de l'Europe. La plupart des chefs d'entreprise n'en voient pas encore l'effet dans leurs carnets de commandes tandis que les financiers essaient d'anticiper ce qui se passera dans un an. Ils prennent en compte la baisse du dollar, la hausse du pétrole, la restriction du crédit bancaire, qui sont trois éléments défavorables à l'activité économique.
Comment expliquez-vous la résistance de vos fonds Moneta Micro Entreprises et Moneta Multi Caps, en ce début d'année ?
Nos fonds ont baissé de près de 10 % depuis le début de l'année alors que les indices ont perdu 15 %. Nous avons donc été en partie épargnés. Cette résistance vient de ce que nous avions peu de valeurs financières en début d'année et, en outre, nous avions privilégié des sociétés peu ou pas endettées. Nous sommes des sélectionneurs de valeurs et achetons les actions au cas par cas. Nous passons beaucoup de temps à analyser les sociétés et leurs parties prenantes, à nous forger une opinion sur leurs stratégies et leurs produits. Nous apportons plus de valeur ajoutée en observant ce qui se passe dans la vraie vie économique des entreprises. Nous prenons en compte la vision macroéconomique, mais nous ne voulons pas y passer trop de temps car les paris macroéconomiques sont souvent aléatoires.
L'évolution de la Bourse vous conduit-elle à modifier l'importance de certains critères financiers dans votre jugement sur les valeurs ?
Oui, il faut être pragmatique et s'adapter au marché. En 2003, les investisseurs avaient horreur des sociétés endettées. En 2005 et en 2006, c'était l'inverse car l'endettement apporte un effet de levier favorable à la croissance des bénéfices. Et, cette année, les sociétés endettées recommencent à être délaissées. C'est l'anticipation de ce mouvement qui nous a conduits à sélectionner des entreprises à trésorerie excédentaire et qui sont aujourd'hui en situation de réaliser des opérations de croissance externe dans des conditions favorables.