Tu seras un whistleblower, mon fils

Publié le 15 juin 2013 par Allo C'Est Fini

La grande mode cette année, c’est celle du whistleblower, en bon français le « souffleur de sifflet ». On connaissait le joueur de flûte, les adeptes du pipeau, mais quelle est donc cette nouvelle espèce de musicien? Il s’agit, tout simplement, de ces individus qui, témoins de processus ou de comportements anormaux voire illégaux, décident de vendre la mèche et de dénoncer au grand public ce qu’une omerta de bon aloi cache depuis longtemps.

Cet article adopte un ton discourtois et rigolard, mais il faut bien admettre qu’il y a de quoi frémir. Car les whistleblowers qui prennent le risque de dévoiler des secrets dont certains sont d’état prennent des risques inconsidérés. Je ne serais pas étonné, d’ailleurs, que nous ne soyons confrontés qu’à la partie émergée des whistleblowers, la partie immergée étant passée de vie à trépas sans que nous n’ayons eu le loisir d’entendre leurs témoignages.

Qu’ils s’appellent Bradley Manning ou Edward Snowden, les whistleblowers ont tous quelques caractéristiques communes. Plutôt autour de la trentaine, plutôt américains, plutôt des hommes (j’offre une bière à celui qui découvre la première whistleboweuse chinoise de plus de 50 ans …), ils ont été confrontés à des secrets d’état disais-je (Fernandel aurait dit des « tas de secrets ») et ont été choqués par les mensonges que ces secrets couvrent. Tortures dans les geôles américaines en Iraq, surveillance effrénée d’Internet par la NSA, que du lourd, pour alimenter la presse et faire trembler dans les chaumières.

Paradoxalement, certaines institutions, loin de s’en effrayer, incitent à devenir whistleblower. Il existe, par exemple, un institut – américain aussi – qui pousse à devenir « vendeur de mèches ». Le NWC (National Whistleblower Center) propose assistance et formation aux whistleblowers en herbe, afin de les aider à franchir le cap de la première dénonciation. Il propose même une carte interactive pour pouvoir, un peu partout sur la planète, se renseigner sur le cadre légal dont dispose notre apprenti. Voici par exemple ce qui est proposé pour les candidats au whistleblowing en France…  De même, le site intègre un blog consacré aux pratiques de whistleblowing, très intéressant d’ailleurs.

Tout cela pourrait prêter à sourire s’il ne s’agissait pas de choses éminemment sérieuses. Car nos démocraties sont minées par la corruption dont le coût représente plusieurs milliards d’euros de perte par an, par les scandales sanitaires de toutes sorte (scandale des prothèses PIP, scandale du Mediator, etc.), et par les manipulations belliqueuses de quelques chefs d’état prêts à investir quelques centaines de milliards de dollars dans des guerres insensées pour protéger le coût de leurs trajets en voiture…

Alors s’il y a une formation que l’on devrait imposer à tous, petits et grands, hommes et femmes, ingénieurs et commerçants, politiques et militaires, c’est bien celle du whistleblowing