De quoi est peuplée l'attente ?
Elle est peuplé de verre brisé semé entre l'estomac et l'épine dorsale de ceux qui sont déjà tout cassés de l'intérieur.
Elle est peuplée de faux espoirs et de vrais fantômes, de vrais mensonges et de fausses déceptions, le tout perçu au travers d'un filtre obscurcissant. Et la vie qui s'admire et se hait dans un miroir déformant.
L'attente est la pire ennemie de la paix intérieure, une tourmente qui se plaît à saupoudrer des grains de sable dans les rouages d'une existence que l'on croyait bien huilée, et dans les yeux insomniaques de quiconque a osé regarder de trop près la possibilité de l'aventure.
L'attente est une traîtresse aux symptômes incongrus et qui se manifestent au moment où on les attend le moins. Car elle est sournoise et l'on oublie qu'elle est là. On croit l'avoir domptée et installée comme une enfant sage sur un moelleux canapé, mais elle se fait soudain tigresse échevelée pour nous assaillir et nous foudroyer. Elle nous saute à la gorge, y fait gonfler une boule de plomb jusqu'à ce qu'elle explose de larmes et retombe pesamment tout au fond du ventre. C'est là que se nichent toutes les attentes qui ont pourri de ne jamais être exaucées.
Alors, l'attente se nourrit de regrets, de rancœurs, d'étoiles filantes fusillées en plein vol.
Qui n'a pas connu l'attente ne connaît pas la joie des arcs-en-ciel après la pluie.