Prenez une carte de Bretagne, trouvez-en le point le plus éloigné de la mer : c’est là où je vous emmène, en plein cœur de l’Argoat.
C’est un pays de bocage, vallonné, très vert, à l’habitat fortement dispersé. Le paysage n’est pas spectaculaire mais a beaucoup de charme. Les Montagnes Noires (qui culminent au roc de Toullaëron à… 318 mètres – ça reste raisonnable) sont propices à toutes sortes de randonnées fort agréables. Le breton est encore assez pratiqué par les personnes âgées et les jeunes militants bretonnants : à Carhaix, la « grande » ville située un peu plus au nord, plus d’un quart des élèves suivent leur scolarité en filière bilingue ou immersive (réseau Diwan). L’élevage de cochon y règne en maître. Le territoire est à la limite sud de la Bretagne « qui a toujours voté à gauche » (mon prof’ de breton avait une théorie farfelue sur le clivage droite / gauche breton : selon lui, les communes votant à gauche étaient situées sur les anciennes terres des Rohan qui ont toujours trahi la Bretagne en se vendant aux Français ou aux Anglais pour leurs propres intérêts ; un étudiant en mal de thèse pourrait se pencher sur la question). Tout ça pour dire que nous sommes vraiment en Bretagne profonde.
Je voudrais aujourd’hui attirer votre attention sur une petite commune du sud du centre de la Bretagne : le Faouët. Elle abrite 2 866 habitants selon l’INSEE… et un riche patrimoine.
Le Faouët – Les Halles
Le centre bourg lui-même, et particulièrement ses halles du XVIème siècle. Admirez la charpente et le clocheton octogonal surmontant le faîtage. La longueur du bâtiment est elle-même imposante, plus de 50 mètres, ce qui démontre d’ailleurs que le village fut densément peuplé. L’endroit propose également un musée dédié à la peinture bretonne. Je ne peux malheureusement rien vous en dire, ne l’ayant pas visité, mais la documentation touristique dit que c’est bien (en même temps, ils ne vont pas dire le contraire).
Le Faouët – Chapelle Saint-Fiacre
Le village de Saint-Fiacre (en Bretagne, en gros, à partir de trois maisons, c’est un village), situé à quelques kilomètres du bourg, réputé pour sa chapelle du même nom. Elle a été érigée au XVème siècle, l’âge d’or de l’architecture sacrée bretonne : en granit, au clocher pignon ouvragé, aux transepts de taille très inégale. La chapelle est surtout remarquable pour son magnifique jubé en bois polychrome qui a échappé aux affres du temps et des destructions volontaires. C’est un véritable catéchisme en image, très figuratif et très réaliste : scènes de l’ancien et du nouveau Testament, anges chevelus, bestiaire imagé, représentation des péchés capitaux. Je ne vous en dis pas plus, allez voir, il y a des détails assez amusants.
Saint-Fiacre – Le jubé
C’est beau et moins fréquenté que mon troisième coup de cœur : la chapelle Sainte-Barbe.
Le Faouët – Sainte-Barbe
Déjà, le site est impressionnant : la chapelle est construite à flanc de falaise, dominant l’Ellé que l’on entend sourdre dans la forêt profonde et humide. En arrivant par le haut du site, où est situé le parking, regardez d’abord la tour cloche, avec une vraie grosse cloche que vous pouvez faire sonner à qui mieux mieux. En descendant l’escalier monumental, observez le modeste oratoire Saint-Michel, posé en équilibre sur un éperon rocheux.
En contrebas, se dresse la chapelle Sainte-Barbe. Désorientée pour des raisons pratiques, de petite taille au sol, mais d’élévation… élevée, elle fut construite au XVIème siècle et remaniée (légèrement) au cours des siècles suivants. L’austérité du granit et du lieu est contrebalancé par une décoration soignée : pinacles ouvragés, vitraux somptueux, retables richement décorés, statuaire élégante. Quand il fait beau, c’est magnifique, quand le temps est brumeux, c’est envoûtant, quand il pleut, et bien c’est glissant.
Le Faouët – Chapelle Sainte-Barbe
A quelques centaines de mètres, légèrement en contrebas de la chapelle, au beau milieu de la forêt, vous trouverez une mignonne petite fontaine, le type même de fontaine sacrée des vieux celtes païens, et quoique christianisée, ayant longtemps conservé des pratiques pas très orthodoxes, genre, « A la sainte Barbe, invoquez la sainte, faites trois fois le tour de la fontaine à cloche-pied en claquant vos sabots tenus au-dessus de la tête, puis crachez trois fois dans la fontaine et vous n’aurez plus mal au crâne jusqu’au bout de l’an ».
Le Faouët – Fontaine Sainte-Barbe
Comme quoi, quand vous visiterez ce charmant petit coin, joignez l’agréable à l’utile !