Wellington accusé d'inaction face à l'extinction du dauphin le plus rare de la planète

Par Memophis

Le Maui est le dauphin le plus rare de la planète. Il ne reste plus que 55 cétacés adultes de cette espèce qui vit uniquement au large de l'île du Nord de la Nouvelle-Zélande. Et les défenseurs de la vie sauvage pressent Wellington d'agir enfin pour éviter qu'il disparaisse à jamais. 
De petite taille (1,7 mètre au maximum), gris et blanc, le dauphin Maui tient son nom d'un demi-dieu polynésien. Au vu du nombre réduit de survivants, les experts estiment probable son extinction d'ici 2030 si aucune mesure d'urgence n'est prise. Il n'a été observé que dans les eaux peu profondes en bordure de la côte occidentale de l'île du Nord. 
Et cinq de ces cétacés sont tués tous les ans par les pêcheurs, lors de prises accidentelles, explique Liz Slooten, professeur de zoologie à l'Université d'Otago, citant un rapport d'experts commandité par le gouvernement. 
"Ces dauphins sont au bord de l'extinction. Si on ne fait pas quelque chose tout de suite, jamais ils ne survivront", prévient-elle. 
Selon Wellington, les filets maillants, ces filets de nylon fixés verticalement et laissés dans l'eau pendant de longues périodes, sont la principale cause de disparition des dauphins. 
Les associations écologiques pointent du doigt l'exploitation minière des fonds sous-marins, y compris la surveillance sismique. 
L'an dernier, quelques restrictions ont été prises en matière de filets maillants et de pêche au chalut, dans la zone de vie des dauphins Maui. Mais le gouvernement a refusé de les interdire complètement, comme le recommandait la Commission baleinière internationale (CBI). 
Il a préféré ouvrir une enquête pour la mise en place d'un programme de sauvegarde, qui doit évaluer les risques pour les dauphins et ceux encourus par "les communautés de pêcheurs si la pêche est interdite". 
L'enquête a pris fin en novembre mais rien n'a été annoncé et le gouvernement est accusé d'immobilisme par les écologistes. 
"Immobilisme" 
"Le temps est un facteur essentiel avec des populations aussi basses, leur nombre peut chuter d'un coup", s'inquiète Karli Thomas, membre de Greenpeace. "Nous craignons que le gouvernement fasse trainer les choses jusqu'à un point de non-retour. Attendre qu'on n'en parle plus, faute de survivant, n'est pas une solution". 
Le Maui est à l'ordre du jour de la réunion du comité scientifique de la CBI, qui se tient actuellement et jusqu'au 15 juin à Jeju, en Corée du Sud. 
Sur la côte de l'île nord néo-zélandaise, les pêcheurs démentent être la cause de la disparition du mammifère marin. Ils se voient comme le bouc émissaire des défenseurs de l'environnement. 
En 25 ans, il n'y a eu qu'un seul dauphin Maui pêché par accident, assure Keith Mawson, un représentant de l'industrie de la pêche de cette région. Et encore, il s'agissait sans doute d'un cousin du Maui, le dauphin Hector, assure-t-il. 
C'est son industrie qui est menacée de disparaître si les restrictions à la pêche se multiplient, alors que sont ignorées d'autres causes potentielles de la mort prématurée des cétacés, telles que la toxoplasmose des dauphins, déclare ce propriétaire d'une usine de transformation de poissons. 
"Vous pouvez éliminer tous les droits de pêche le long de la côte ouest, ça ne garantira pas la survie du dauphin", ajoute-t-il. 
L'affaire du dauphin Maui nuit à l'image de la Nouvelle-Zélande, réputée pour sa nature sauvage et intacte. Le pays, qui vante ses paysages "100% purs" dans les campagnes touristiques à travers le monde, doit agir rapidement, estime la Société pour les mammifères marins. 
"Les gens viennent ici parce qu'ils savent que nous sommes respectueux de la nature, c'est l'image que nous cherchons à promouvoir", rappelle Phil McCabe, qui possède une agence de tourisme. 
"Si on commence à sacrifier des espèces pour quelques dollars, il ne faudra pas longtemps pour que le monde s'en aperçoive", déclare l'homme, également fondateur d'un organisme de défense de la nature et de lutte contre l'exploitation minière sous-marine. 
L'inaction de Wellington risque de lui valoir une image d'hypocrite, renchérit Liz Slooten, la zoologue de l'université d'Otago. "Les Japonais n'ont pas manqué de noter que nous les critiquons pour la pêche à la baleine, quand il en reste beaucoup de par le monde, mais nous ne bougeons pas le petit doigt pour sauver nos propres dauphins de l'extinction".