Horacio Ferrer dans sa bibliothèque, Photo Clarín/Lucía Merle
Cette interview accordée à Eduardo Parise est parue dans Clarín, dimanche 2 juin 2013, le jour même des quatre-vingts du Maestro Horacio Ferrer. Jusqu'à aujourd'hui, l'actualité à Buenos Aires, la préparation par ailleurs de mes conférences de cet été, celle du programme culturel que Human Trip peut proposer aux touristes francophones intéressés par la perspective de l'économie durable et de la solidarité ainsi que le monde d'une part de mes activités de la rentrée ne m'ont pas laissé beaucoup de disponibilité pour vous la présenter et vous la traduire mais aujourd'hui, on y va.Cet entretien, parue avant celle que j'ai traduite lundi dernier, en est le complément idéal (voir mon article du 11 juin 2013). Si j'en crois le palmarès des articles les plus lus de la semaine, je suppose qu'elle a suscité quelque intérêt chez mes lecteurs. Celui-ci devrait faire de même. Le voici.
“Es que no hay que disimular la cantidad de años; al contrario…. Llegué. Y me podía haber quedado tantas veces en el camino. Tengo doce operaciones, empezando por la cesárea que le hicieron a mi madre cuando nací y en la que participé activamente con un papel protagónico”, dice y se ríe con ganas, como festejando esa travesura semántica que se le acaba de ocurrir, mientras el sol de la tardecita porteña entra por la ventana de su “bulín de la calle Ayacucho”, en el octavo piso del Alvear Palace Hotel, donde vive hace más de cuarenta años. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
"Pas question de cacher le nombre des années, tout au contraire... J'y suis. J'aurais pu m'arrêter en chemin tant de fois. J'ai eu douze opérations, à commencer par la césarienne qu'on a faite à ma mère quand je suis né et à laquelle j'ai participé activement dans un rôle de premier plan" (1), dit-il et il rit de bon cœur, comme pour fêter cette fredaine sémantique qui vient de lui passer par la tête, tandis que le soleil de ce début de soirée portègne (2) entre par la fenêtre de son Bulín de la calle Ayacucho (3), au huitième étage de l'hôtel Alvear Palace, où il vit depuis plus de quarante ans. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- ¿Qué es eso de cumplir ocho décadas o cuatro veces veinte? - Son ambas cosas y es sorprendente como le digo a Lulú, de quien soy el hombre y a quien no defino como mi mujer porque no la compré en ninguna subasta o remate. Es la mujer con la que comparto la vida desde hace 32 años cuando la conocí en el bar La Poesía, de Bolívar y Chile. - ¿Eso hace a las ocho décadas o a las cuatro veces veinte? - Claro, es una de las vivencias de las ocho décadas. En aquel momento yo tenía 48 años y ella 34. Lo llamativo es que todavía hoy le sigo llevando 14… (risas). Fue un encuentro maravilloso. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Qu'est-ce que ça fait d'avoir huit décennies ou quatre fois vingt ? - Les deux font quelque chose et c'est surprenant, comme je le dis à Lulú (4), dont je suis l'homme et que je ne définis pas comme ma femme, parce que je ne l'ai pas achetée aux enchères ou à la criée (5). C'est la femme avec laquelle je partage ma vie depuis trente-deux ans, depuis que je l'ai rencontrée au bar La Poesía, de Bolívar y Chile (6). - On met ça où, dans les huit décennies ou les quatre fois vingt ? - A coup sûr, c'est un des vécus des huit décades. A ce moment-là, moi j'avais 48 ans et elle 34. Le drôle dans cette affaire, c'est que j'ai toujours quatorze ans de plus qu'elle (rires). Cela a été une rencontre merveilleuse. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- ¿Cómo entró el tango a tu vida? - Creo que también fue destino. Que me gustara el tango no fue muy original porque estaba en la radio y todo eso. Pero creo que la afinidad vital que el tango tiene musicalmente, poéticamente, estéticamente, orquestalmente, es tanta y tan rica que me apasionó de entrada, tanto en Montevideo como en Buenos Aires. Yo tenía casa allá y aquí, que era la casa de la familia Ezcurra, la casa de mi mamá argentina, porteña y sobrina bisnieta de Juan Manuel de Rosas. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Comment le tango a-t-il fait son entrée dans ta vie ? - Je crois que ça aussi, c'était le destin. Que j'aime le tango, ça n'a rien de bien original parce qu'on l'entendait à la radio et tout ça. Mais je crois que l'affinité vitale que le tango possède sur le plan musical, poétique, esthétique, orchestral, est si ample et si riche qu'elle m'a passionnée d'emblée, autant à Montevideo qu'à Buenos Aires. J'avais une maison là-bas et ici et ici, c'était la maison de la famille Ezcurra (7), la maison de ma mère argentine, portègne et arrière-petite-nièce de Juan Manuel de Rosas. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- ¿Hay diferencias entre la vida actual y aquella, cuando realmente tenías 40 o 20? - Pasa que he disfrutado de la vida en todas mis edades. Disfruté de la amistad de mis amigos, de las reuniones en Montevideo o en Buenos Aires. Son cosas que uno trae, la propensión a la conversa, a la reunión, a escuchar música juntos… Igual, hay diferencias entre aquellos días y el tiempo actual. La juventud es un fenómeno espiritual. El decrépito puede ser el cuerpo pero la juventud es un fenómeno espiritual. Tengo un espíritu emprendedor y, para mi bien o para mi mal, sigo inventando cosas, sigo escribiendo y eso es perduración y vocación de una obsesión hermosa que se llama poesía. En este lugar mágico, tengo una bibliotequita de mis poetas predilectos y sigo leyendo poesía para seguir aprendiendo, porque su prodigio es insondable. Y bendigo que el Señor Dios me haya dotado con alguna condición para ser poeta. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Y-a-t-il des différences entre la vie actuelle et celle d'avant, quand vous aviez vraiment 40 ou 20 ans ? - Il se trouve que j'ai apprécié la vie à tous les âges. J'ai apprécié l'amitié de mes amis, les soirées entre amis à Montevideo ou à Buenos Aires. Ce sont des choses qu'on porte en soi, cette propension à converser, à passer du temps avec les amis, à écouter ensemble de la musique... N'empêche, il y a des différences entre ce temps-là et maintenant. La jeunesse est un phénomène spirituel. La décrépitude peut atteindre le corps mais la jeunesse est un phénomène spirituel. J'ai un esprit entrepreneur et pour mon bien ou pour mon malheur, j'invente toujours des choses, j'écris toujours et tout cela c'est la persistance et la vocation d'une belle obsession qui s'appelle poésie. Dans cet endroit magique, j'ai une petite bibliothèque de mes poètes de prédilection et je continue à lire de la poésie pour continuer d'apprendre, parce qu'elle est un insondable prodige. Je bénis le Seigneur Dieu de m'avoir doté d'une certaine condition pour être poète. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- O sea que te definís de profesión poeta… - Soy un poeta por naturaleza. En lo que llamaba declamación, mi mamá era hija de Alfonsina Storni. Entonces, yo vengo a ser nieto de Alfonsina Storni porque aprendí a recitar con mi madre. Eso es tener mucha suerte en la vida. Haber tenido conexión con una poeta tan maravillosa y la posibilidad de trasmitir mis versos recitándolos. Los versos no son para leer, son para oír, como la música. Es el dominio del aire en la música y la poesía que, a su vez, están juntas en el tango. Por ejemplo: “Fue a conciencia pura que perdí tu amor, nada más que por salvarte”(canta). Allí está la palabra y la música unida y es difícil sustraerse cuando uno la escucha. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Est-ce à dire que tu te définis comme poète de métier... - Je suis un poète par nature. Pour ce qu'on appelait déclamation, ma mère (8) était fille de Alfonsina Storni (9), je me trouve donc petit-fils de Alfonsina Storni puisque j'ai appris la récitation avec ma mère (10). C'est là avoir eu beaucoup de chance dans la vie. Avoir un lien avec une poète aussi merveilleuse et la possibilité de transmettre mes vers en les récitant. Les vers ne sont pas faits pour être lus, ils sont faits pour être écoutés, comme la musique. C'est le règne du souffle dans la musique et la poésie qui, elles aussi, sont liées dans le tango. Par exemple : "Fue a conciencia pura que perdí tu amour, nada más que por salvarme" (chante-t-il) (11). Les mots et la musique ne font qu'une et il est difficile de la laisser de côté [la musique] quand on l'écoute. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- Acabás de salir de un problema grave de salud. - Sí, fue algo serio porque estuve muy grave (un golpe en la cabeza por una caída obligó a una operación delicada). Pero tengo una glándula que me funciona siempre: la de la voluntad. Puse mucha para mejorarme porque creo que a los médicos hay que ayudarlos, hay que chamuyarlos, orientarlos, porque el enfermo es uno y uno quiere ser curado. Entonces, hay que abrir las compuertas, ser dócil, escuchar y dejarse llevar. Eso es el significado de la palabra “paciente”… Sí... el paciente inglés. Soy el paciente criollo, pero dio resultado. Volvamos al tema de los 80. ¿El número redondo golpea? Para nada. Es lo mismo cumplir 79, 80, 81. Lo que pasa es que uno tiene la perspectiva de lo vivido desde una torrecita más alta. Y puede verlo en perspectiva y pensar con satisfacción que las macanas han sido pocas. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Tu sors tout juste d'un grave problème de santé. - Oui, ça a été quelque chose de sérieux puisque j'ai été gravement malade (un coup à la tête à la suite d'une chute m'a obligé à subir une opération délicate). Mais j'ai une glande qui ne m'abandonne jamais : celle de la volonté. J'en ai mis beaucoup pour aller mieux parce que je crois que les médecins, il faut les aider, il faut leur faire un brin de causette, les orienter, parce le malade c'est toi et toi, tu veux guérir. Alors il faut ouvrir la maison, être docile, écouter et se laisser faire. - C'est le sens du mot patient... Eh oui, le patient anglais. Moi, c'est le patient criollo, mais ça donne des bons résultats. - Revenons à vos quatre-vingts ans. Le chiffre rond, ça frappe ? - Pas du tout. Avoir 79, 80 ou 81 ans, c'est la même chose. Il se trouve qu'on voit le vécu mis en perspective depuis une tourelle plus haute. Et qu'on peut le voir en perspective et penser avec satisfaction qu'il n'y a pas eu de gros pépins. (Traduction Denise Anne Clavilier)
¿Y qué se ve en esa perspectiva? La paz de no haber hecho ninguna hazaña al revés. Y la felicidad de haber hecho las cosas bien o, al menos, haber intentado hacerlas bien. Y tener una impecable foja familiar y de amigos. La perspectiva permite ver para atrás, y también para adelante… Siempre miré mucho lo que estaba por venir. Y ahora está introducida la figura de la muerte Pero la figura de la muerte está siempre. Es la única certeza que uno tiene desde que nace Es verdad, te puede pisar un colectivo, pero es más probable que una persona mayor capote. Tiene que ver con la perspectiva con que se miran las cosas y siempre me importó eso. Siempre busqué disfrutar lo que tenía de gentil, de bueno, de esperanzado y de ilusionado. Siempre he sido un iluso al que se le dieron muchas cosas de sus ilusiones. Es muy grande tener una compañera como Lulú, un hábitat como éste, haber emprendido una novela sorprendente de poder fundar una Academia Nacional. Hay que tener mucho tarro, buena compañía y perseverancia para poder ver que yo, que no nací en la Argentina pero que me siento muy argentino, pueda ofrecerle a la Argentina una Academia Nacional del Tango. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Et qu'est-ce qu'on voit dans cette perspective-là ? - La paix de n'avoir à son actif aucune action sens dessus-dessous. Et le bonheur d'avoir fait les choses bien ou au moins d'avoir essayé de les faire bien. Et avoir d'impeccables états de service de famille et d'amitié. La mise en perspective permet de regarder en arrière et aussi devant soi... J'ai toujours beaucoup regardé ce qui m'attendait. Et maintenant la figure de la mort est entrée dans le paysage. Mais la figure de la mort, elle est toujours là. C'est la seule certitude qu'on a depuis notre naissance. C'est vrai, un bus peut t'écraser, mais c'est plus probable qu'une personne âgée chavire. Cela dépend de la perspective dans laquelle on regarde les choses et c'est quelque chose qui m'a toujours importé, ça. J'ai toujours cherché à faire mon miel de ce que [la vie] avait d'aimable, de bon, de porteur d'espérance et de rêve. J'ai toujours été un rêveur qui a beaucoup reçu de ses rêves. C'est très imposant d'avoir une compagne comme Lulú, habiter un lieu comme celui-ci, avoir entrepris ce roman aussi surprenant que de pouvoir fonder une Académie Nationale (12). Il faut avoir de la corde de pendu, être bien accompagné et avoir de la persévérance pour qu'on puisse un jour me voir, moi qui ne suis pas né en Argentine mais qui me sens très argentin, en mesure d'offrir à l'Argentine une Academia Nacional del Tango. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- Tal vez ese sea tu mayor logro. Ahora, ¿cuál es tu asignatura pendiente? - Muchas… la poesía. Quiero seguir escribiendo poesía. Después de mi larga enfermedad, de la que estoy totalmente sano y repuesto gracias a los médicos que me operaron y los enfermeros que me atendieron y gracias a mi médico personal que es Arturo Famulari, estoy contento porque me sanaron y me reiniciaron en el camino de la vida, de la existencia. Entre existir y vivir hay unas diferencias importantes pero para poder vivir primero hay que existir. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- Peut-être est-ce là ta plus grande réussite. Mais maintenant, qu'est-ce que tu as comme pain sur la planche ? - Plein de choses... La poésie. Je veux continuer à écrire de la poésie. Après ma longue maladie, dont je suis totalement rétabli (13) grâce aux médecins qui m'ont opéré et aux infirmiers qui se sont occupé de moi et grâce à mon médecin personnel qui est Arturo Famulari, je suis ravi parce qu'on m'a guéri et fait reprendre le chemin de la vie, de l'existence. Entre exister et vivre, il y a des différences importantes mais pour pouvoir vivre, il faut d'abord exister. (Traduction Denise Anne Clavilier)
- De la larga serie de tangos que hiciste, ¿cuál es el mejor? - Sin dudas “Balada para un loco”, porque eso fue un cambio de estética, una cosa aventurada, audaz. Fue una canción con ritmo y estética de un tango muy renovado. Fue un triunfo muy lindo que el público finalmente la adoptara como una expresión de un tango diferente. Piazzolla también lo disfrutó mucho. - ¿Y el próximo tango no podría ser el mejor? - No lo sé. Tengo un montón de tangos en ciernes, pero los tengo allí, en una especie de verborario o de sortilegio por ser. Siempre tengo ideas y nunca me canso de buscar novedades en el tango porque por su armonía, su ductilidad, su temática, siempre permite hacer cosas nuevas. Horacio Ferrer, interviewé par Eduardo Panise, in Clarín
- De la longue suite de tangos que tu as faits, lequel est le meilleur ? - Sans aucune doute Balada para un loco, parce que ce fut un changement d'esthétique, une chose aventureuse, audacieuse (14). C'était une chanson avec un rythme et une esthétique de tango très rénové. Cela a été un triomphe très chouette que le public a fini par adopter comme une expression de tango différente. Piazzolla lui aussi l'a beaucoup aimé. - Et n'est-ce pas le prochain tango qui pourrait être le meilleur ? - Je ne sais pas. J'ai un tas de tangos en gestation mais je les ai ici, dans une espèce de verbier (15) ou de sortilège à venir. J'ai toujours des idées et je ne me lasse jamais de chercher des nouveautés dans le tango parce que son harmonie, sa plasticité, ses thématiques permettent toujours de faire des choses nouvelles. (Traduction Denise Anne Clavilier)
Pour aller plus loin : lire l'article complet de Clarín.
(1) Il y fait une allusion très discrète au début de Balada para el año 3001, un tango écrit pour Astor Piazzolla, traduit en français dans Deux cents ans après, le Bicentenaire de l'Argentine à travers le patrimoine littéraire du tango, Tarabuste Editions, janvier 2011. (2) Allusion à la phrase la plus célèbre de Horacio Ferrer : "Las tardecitas de Buenos Aires tienen ese... ¿que sé ho? ¿Viste? Salis de tu casa", etc. C'est le début de Balada para un loco, qui date de 1969, et que les Argentins aujourd'hui ne laissent jamais passer, sur scène, sans interrompre pour applaudir avec frénésie. Balada para un loco est traduit en français, p 316, dans Barrio de Tango, recueil bilingue de tangos argentins, Editions du Jasmin, mai 2010 (et ce tango est repris sur le disque Melopea offert avec le livre : il y est récité par Horacio Ferrer accompagné au piano par Osvaldo Tarantino). (3) Titre d'un célèbre tango écrit par Celedonio Esteban Flores, lui aussi traduit dans Barrio de Tango, ouvrage cité. Etant donné qu'on retrouve cette allusion à plusieurs reprises dans les célébrations des quatre-vingts ans du poète, je suppose que c'est lui qui présente ainsi la suite qu'il occupe dans cet hôtel du quartier de Recoleta. Cela lui ressemble bien. (4) L'artiste peintre Lucía Michelli, surnommée Lulú, comme un personnage du tango des années 1930... (5) Ce commentaire suit toujours le nom de Lulú dans la bouche de son mari. C'est un vrai rite chez lui. Et en plus, c'est élégamment vrai. (6) Ce bar existe toujours à la même esquina, que Horacio Ferrer situe à San Telmo comme presque tout le monde à Buenos Aires (en fait, Bolívar y Chile se trouve encore officiellement dans le quartier de Monserrat). Horacio Ferre a fait une allusion limpide à cette rencontre dans la valse Lulú (musique de Raúl Garello), un des rares textes sans jeu de mot ni néologisme dans sa vaste production poétique, et dont vous trouverez une version bilingue espagnol-français dans Barrio de Tango, ouvrage cité. La Poesía a été reconnu d'intérêt culturel par la Legislatura Porteña au printemps 2009 (voir mon article du 25 septembre 2009). (7) La famille Ezcurra est une grande et très ancienne famille patricienne de Buenos Aires. Dans les années 1820-1850, elle a joué un rôle historique et politique très important en Argentine. C'est de cette famille qu'étaient issues deux sœurs qui furent respectivement l'épouse de Juan Manuel de Rosas (1793-1877) et la maîtresse de Manuel Belgrano (1770-1820). C'est peu de dire que Horacio Ferrer est fier d'appartenir à cette famille qui a joué un grand rôle dans la fédération argentine. Sur le plan historique, il y a bien sûr plusieurs maisons Ezcurra à Buenos Aires, tout dépendant de la branche de la famille concerné et de l'époque que l'on considère. (8) En Argentine, on dit plus facilement Mamá et Papá là où en France, en Belgique, en Suisse, on emploie un Mère ou Père moins intime. (9) Grande poète argentine, connue notamment pour son appartenance au cercle des intellectuels et artistes qui fréquentaient assiduement le Gran Café Tortoni de Avenida de Mayo, au-dessus duquel la Academia Nacional del Tango dispose de son siège social. Elle était née en Suisse, dans le canton italophone de Lugano, en 1892, et elle s'est suicidée, pour éviter de mourir d'un cancer qui venait d'être diagnostiqué, en se noyant dans l'océan à Mar del Plata en 1938. Elle a laissé un grand héritage littéraire et esthétique. (10) Le style du récitant qu'est Horacio Ferrer est tout à fait particulier que vous pouvez écouter dans les deux enregistrements de lui que Litto Nebbia a intégré dans le disque offert avec mon anthologie Barrio de Tango, ouvrage cité. (11) Les trois premiers vers de Confesión, musique de Enrique Santos Discépolo et texte de Enrique Santos Discépolo et Luis César Amadori, présenté en version bilingue dans Barrio de Tango, ouvrage cité, p 188. (12) Cette fondation a été une vraie saga en 1990. Horacio Ferrer en ruminait l'idée depuis de longues années lorsque l'occasion s'est présentée soudain avec l'obtention providentielle d'une audience auprès de Carlos Menem, qui venait tout juste d'arriver à la Casa Rosada. C'est le seul truc positif qui restera des deux mandats par ailleurs catastrophiques de Menem : il a permis la fondation de la Academia Nacional del Tango et ensuite il s'est occupé de couler le pays entier. (13) C'est très nettement l'impression que me laissent ces deux interviews ultra-brillantes et où il est en pleine possession de ses moyens intellectuels et cognitifs, de son humour, de sa spontanéité, de sa culture et de sa mémoire. Je reconnais parfaitement l'homme que je connais, avec sa verve et son dynamisme. Chapeau, l'artiste ! (14) Les historiens du tango date de 1969 et de ce morceau le renouveau de la poésie du tango, après la première date qui est sans doute 1916 avec Mi noche triste de Pascual Contursi et les années 30 avec l'apparition de Homero Manzi qui invente deux thèmes essentiels dans le répertoire du tango, celui du quartier et celui de la nostalgie. (15) La spécialité du Maestro : le néologisme. Il forme ici son terme sur le modèle de substantif herbier, en espagnol. Pour une fois, ça marche aussi en français. Au grand soulagement de la traductrice.