Depuis le 20 avril dernier, se joue au théâtre de l’Œuvre une pièce de Henry de Montherlant. Demain il fera jour narre l’histoire de deux parents issus de la bourgeoisie : Georges Carrion (Michel Fau) et Marie Sandoval (Léa Drucker) dont l’enfant «bâtard» Gilles Sandoval (Loïc Mobihan), dit Gillou, veut entrer dans la résistance. Nous sommes en 1944. Georges Carrion est avocat, et son comportement n’est pas très clair durant cette guerre. Quant à Marie Sandoval, elle est une mère sur-protectrice, qui aime son fils plus que tout, et qui lui accorde absolument tout.
Le texte de Henry de Montherlant est évidemment travaillé dans les détails. On entre dans l’intimité d’une famille bourgeoise avec un enfant déterminé, qui ne désobéit jamais, et qui attend d’obtenir la permission de son père pour entrer dans la résistance. On voit également l’attitude des parents, les retournements de situation, les superstitions, l’amour des parents pour leur enfant, et la peur du pire… Le père à son fils :
Je veux dire : à condition que tu le fasses avec prudence, et sans prendre des risques exagérés.
Les acteurs sont formidables. Michel Fau est imposant. Léa Drucker est terrible. Tous deux forment sur scène un couple impressionnant. Au début, un jeu calme durant les discussions sur leur quotidien, et sur leur fils. Georges Carrion (Michel Fau) semble dans une position de supériorité, il est sarcastique, ça lui va parfaitement. Marie Sandoval (Léa Drucker) est positionnée dans ses idées, elle n’en démord pas, et reste inférieur à cet homme. Mais petit à petit la tension monte, jusqu’à exploser, et les rôles semblent s’inverser. Michel Fau apparaît décoiffé, ruisselant, désemparé. Et les traits de Léa Drucker dans la colère et la tristesse impressionnent. Les deux acteurs laissent admiratifs.
Quant aux décors, nous sommes dans le salon d’un appartement parisien et bourgeois. Et ce qui est le plus saisissant, ce sont les jeux de lumière. Tout au long de la pièce, l’atmosphère tendue est renforcée par une lumière tamisée qui accentue le regard maquillé en noir de tous les personnages, et par les jeux d’ombres sur le mur du fond. Le jeu va même jusqu’à une panne d’électricité, sans doute l’acmé de cette pièce.
"Demain il fera jour" à voir, donc.
Lugné-Poë, fondateur du théâtre de l’Œuvre / ©Myriam Thibault
Beau programme / ©Myriam Thibault
«Demain il fera jour.» Et qu’est-ce qu’on fera, quand il fera jour ?
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