Une lettre adressée à l'Observatoire des Droits de l'Homme de Tizi-Ouzou par un citoyen de Ath Douala, nous la publions intégralement.
L'amertume me pousse à bout
Un pays qui a occulté son histoire à travers le déni de ses enfants, une méthode criminelle des politiques usurpateurs, une patrie livrée à des mutants, les mêmes qui ont changé un destin qui aurai pu être meilleur pour tous les enfants d'Algérie.... ma souffrance est loin d'être une référence pour ces milliers de concitoyens pour qui la période coloniale est moins douloureuse que celle enduré entre 1963 jusqu'à aujourd'hui.
Issu d'une famille révolutionnaire, d'un père commissaire politique avant même la révolution, ce dernier que j'ai vu se faire massacré par l'armée française devant mes yeux. Encore enfant j'étais obligé de quitter ma mère et mon village pour des raisons sécuritaires que j'ignorais à l'époque. Privé de l'affection familiale et otage d'un destin sur lequel je n'ai eu aucun contrôle alors que j'avais à peine 6 ans mais le patriotisme chez nous et comme tous les enfants de cette région phare d'Algérie est innée.
Après l'indépendance confisquée j'avais intégré le centre des enfants de chouhada où là encore une fois la souffrance était mise pour le kabyle que je suis; des maltraitances et des violences endurées jusqu'à ce que je réussisse le brevet d'études.
D'un père chahid et d'une mère mal en point j'étais contraint de subvenir aux besoins de ma famille au point d'oublier ma propre personne.
L'amertume me pousse à bout j'ai le temps de mourir et de revenir que je n'ai pas où loger mes enfants alors que depuis 1977 je cours derrière les services sociaux mais la multitude de dossiers ont eu pour seul réponse des sourires hypocrites au moment où mes enfants sont jetés et sans abri.
En 1986, pour des raisons de santé j'avais quitté mon travail car les séquelles laissées par la période coloniale ont été fatale, et invalide que j'étais devenu l'article 33 qui protège les enfants de chouhada n'était qu'une notion à la faveur des portes drapeaux des bourreaux au pouvoir....pourtant j’avais envoyé trois dossiers aux insistances concernées mais à ce jour aucune réponse!
Devenu premier patriote de ma région en 1995 et père d'un GLD, l'amour de la nation surgi et l'espoir aussi. Mais six ans après j'étais surnommé squatteur car longtemps privé de ce qui me revient de droit, un F3 pour mes quatre enfants, sans électricité, sans eau et 11 ans après les institutions de la région me menacent d'expulsion (heureux les martyrs qui n'ont rien vu).... au moment même où les ennemis d'hier sont rémunérés, les terroristes indemnisés, les mêmes qui ont infligé les souffrances à notre grand peuple... les ennemis que nous avons combattus et qui sont devenus les heureux récompensés. Aujourd'hui je vie sous l'ombre d'une menace d'expulsion et une retraite d'invalidité dépourvue de richesse ainsi q'une paie militaire que je n'ai pas perçu depuis au moins 3 ans.
Ils osent nous parler du nationalisme, réconcilier nos enfants avec la patrie, eux qui ont vécu au quotidien, nos souffrances et nos désespoirs, comment aujourd'hui nos enfants n'embrasseront pas les extrêmes ? Comment voulez-vous que nos enfants ne rêvent pas d'un avenir meilleur vers d’autres horizons ?...
Je suis témoin de mon temps, témoin d'une période où la politique des libérations a triomphé grâce aux sacrifices des hommes et d'une période où l'attente est devenue une seconde nature et enfin témoin de lois à la faveur des enfants de chouhada dont les droits, légaux, ont été confisqué par un état coupable d’injustice et un pouvoir public qui se moque totalement d'appliquer les lois de la république.
Des questions surplombent mon esprit, pourquoi créer des lois pour les piétiner ensuite ??...Qui est le premier coupable de la violation des lois dans notre pays ??
Comme disait feu DJAOUT "je suis le déterreur de l’histoire insoumise et de ses squelettes irascibles enfouis sous vos temples dévastateurs, je me tiendrai hors de portée de votre bénédiction qui tue, vous pour qui l'horizon est une porte clouée, vous dont les regards éteignent les foyers d'espoir, transforment chaque arbre en cercueil. Je suis de L’autre race, celle des hommes qui portent jusqu'aux tréfonds de leurs neurones des millénaires de soleil".
LAKSI Said
Beni Douala (Tizi Ouzou)