EN FINIR AVEC LA SOUS-NUTRITION
En octobre dernier, la FAO faisait un triste constat: les progrès en matière de réduction de la faim dans le monde ralentissent depuis 2007-2008. En cette veille de Journée Mondiale contre la Faim, samedi15 juin, nous devons nous poser la question: combien de plus? Combien d'autres personnes le monde laissera-t-il souffrir de la faim et la sous-nutrition, se vider de leurs forces au point parfois d'en perdre la vie?
Chaque jour ce sont 10 000 femmes et enfants de moins de cinq ans qui décèdent des conséquences de la sous-nutrition. Mais qu’est-ce que cela signifie réellement, la sous-nutrition ?
Le premier aspect de ce drame est assurément individuel, et les plus jeunes en sont les premières victimes : 45% des décès d'enfants de moins de cinq ans sont liés à la sous-nutrition. Ceux qui survivent peuvent voir leur développement irrémédiablement entravé : entre la conception et les 2 premières années de vie, la sous-nutrition provoque en effet des séquelles irréversibles qui peuvent impacter l’individu pendant toute sa vie. Elle affecte les capacités physiques et cognitives, et de ce fait la réussite scolaire et professionnelle. Elle expose également les plus jeunes à d’autres maux comme la cécité, liée au déficit de vitamine A, et affaiblit le système immunitaire ; augmentant le risque d’autres maladies.
Aujourd’hui encore 9 enfants sur 10 souffrant de sous-nutrition aigue sévère, la forme la plus grave de sous nutrition, n’ont pas accès à un traitement. Pourtant, ces deux dernières décennies ont vu des progrès importants dans le domaine de la prise en charge de la sous nutrition, et ce à moindre cout : mieux que jamais, on sait soigner ce mal.
Mais ce combat souffrirait d’être réduit à son seul aspect individuel et gagnerait à être appréhendé dans une approche globale et étatique. Car la sous-nutrition n’est en effet pas seulement un drame individuel pour ceux qui la subissent ou en meurent. C’est aussi un tourment économique pour les pays qu’elle touche. La Banque Mondiale estime à 2 à 3% du PIB le cout économique de la sous nutrition. La nutrition ne doit donc plus être regardée comme un bénéfice du développement, mais comme son préalable indispensable. Lutter contre la sous-nutrition c’est avant toute chose sauver. Mais pas seulement. C’est aussi soutenir le développement des pays. C’est pour faire passer ce message porteur d’avenir qu’Action Contre la Faim vient de lancer la campagne «Nutrir»: http://nutrir.actioncontrelafaim.org. « Nutrir », qu’est-ce que cela signifie ? C’est un néologisme créé par Action Contre la Faim. Nutrir, ce n'est pas seulement faire en sorte qu'un individu mange à sa faim. C'est faire en sorte qu'il reçoive les nutriments variés essentiels à son plein développement. Et en faisant cela, on fait bien plus que nourrir : on soutient le développement des pays.
Bien sûr, la facilité serait de continuer à fermer les yeux. Croire qu’il s’agit d’une lutte désespérée, comme si elle avait toujours existé et existera toujours. Pourtant, les chiffres révélés l’an dernier par la FAO nous le montrent : combattre la faim est possible. Au cours des 20 dernières années, et en dépit d’un ralentissement depuis 2007-2008, la FAO a dénombré130 millions d’estomacs criant famine en moins.
Oui, en finir avec la sous-nutrition et la faim est possible. Loin d’être une utopie, un rêve irréalisable, une barrière infranchissable. Au virage historique de la lutte contre la faim dans le monde, nous devons mettre un terme à ce fléau car aujourd’hui, nous pouvons réserver un autre futur à ces milliers d’enfants.
Dorian Dreuil
© Illustration : JEAN MICHEL OUVRY (LEZILUS)Retrouvez l'intégralité de la Tribune sur le Journal Toulousain