À ta claire fontaine, voulant me désaltérer, j’ai trouvé ton eau si belle que tu refusas de m’en donner. Il y a longtemps que je voudrais qu’on m’aime. Jamais cela n’arrivera si je continue à m’oublier! C’est quoi, cette version-là? C’est celle que je fredonnais, l’autre jour, à une femme assoiffée d’amour… de soi!
Voici ce qu’elle me demanda de vous raconter.
La détresse lui asséchait la voix : Il y a six mois, quand fiston a quitté la maison, j’ai décidé d’avoir de nouvelles amies. Depuis, ça va de mal en pis. On accepte mes invitations, puis on annule sans raisons. Plus j’insiste, plus on me fuit. Comprends-tu quelque chose?
Sentant une force sous sa fragilité, j’osai : C’est la Loi de l’attraction-répulsion. Plus tu as soif de leur amitié, plus elles hésitent à satisfaire ton besoin. D’instinct, on met de la distance là où l’on craint l’accoutumance. Enfin bref, on est rarement généreux avec qui veut nous prendre.
Surprise, elle lança : Mais voyons! Je ne veux rien leur prendre! Je répliquai : Vraiment? Alors pourquoi insistes-tu autant? Elle réfléchit : J’insiste… parce que… je veux qu’elles soient mes amies! Je veux qu’elles m’aiment! Je m’ennuie tellement, toute seule à la maison!
Une petite marée monta sur la berge de ses prunelles.
D’un ton réconfortant, j’expliquai : Quand on ressent une immense soif d’amour, on réagit en cherchant la personne qui la comblera. La forme peut varier : ami, enfant, conjoint, etc. Dès qu’on la trouve, on en devient accro!
Elle épongea ses larmes. Je poursuivis : Ferme les yeux. Elle m’obéit. Doucement, je lui dis : Cesse de courir après ce que tu crois que tu n’as pas. Les autres ne peuvent t’apporter ce que tu as déjà. Sens-tu ton cœur qui bat? C’est la fontaine qui te relie à la source d’amour infini.Instant de silence. Moment de conscience.
Son visage perdit quelques plis. Elle me sourit : Jusqu’ici, j’avais peur d’être dépendante de mon conjoint, de mon fiston et même de… toi! Maintenant, c’est différent.
Je le sens, mon puits d’amour. Je viens de me rappeler qu’il est ici depuis toujours.
Pour célébrer sa joie, elle me fit un clin d’œil en chantant : À ma claire fontaine, m’en allant me désaltérer, j’ai trouvé mon eau si belle que je m’y suis prélassée. Il y a longtemps que je m’aime, jamais plus je ne l’oublierai!