C’est aujourd’hui dimanche, d’Aurélie Fredy

Par Goliath @Cayla_Jerome

Un jour pas comme les autres, fermer sa porte et recommencer sa vie ailleurs : que ceux n’y ont jamais songé jettent la première pierre ! Une histoire tristement banale de nos jours où un bon tiers des ménages se volatilisent pour un rien, un autre compagnon, ou simplement la dureté de la vie…

Dans toutes les séparations il y a deux cas à prendre en considération.

Le premier est celui par qui vient l’idée même de s’en aller vers d’autres cieux. Il le vit généralement relativement bien, sachant ceux n’ayant pas suivi encore au chaud dans la fratrie. Le besoin d’oxygène, d’ouverture et de réalisation de soi prévaut sur toutes les autres considérations : il en va pour lui d’une continuité de vie, c’est une renaissance. Rester équivalait à une petite mort, un renoncement suicidaire, une gangrène inéluctable rongeant l’esprit. Un mal qu’il faut avoir vécu pour le saisir bien. Le renoncement permanent, l’abandon de soi jusqu’au mépris de l’intime, bouleverse l’ordre des priorités établies. Seul compte alors pour la rédemption personnelle l’envol en terre inconnue, quels que fussent les dégâts collatéraux.

Le second le respirera beaucoup moins bien, car si l’un est mal les deux sont concernés, mais celui-ci s’en arrange. Pour sa défense, il regarde le positif de la situation : les rares atouts comblent les vides. La fragilité devient une colonne vertébrale offrant un simulacre de stabilité. Le départ de l’autre devient une forme de trahison inouïe, une amputation touchant autant la cellule familiale que l’ego. Le ressenti est terrible. L’imaginaire n’a d’autre recours que de sublimer la relation passée, d’autant plus que l’éloignement estompe le souvenir en augmentant le sentiment du regret.

Désormais, ils respireront à l’inverse d’autrefois, ce n’est plus le même qui soupir en cherchant son air… Ce qu’en pensent les autres est le dernier des soucis que nourrissent les ex époux. Un équilibre naturel reviendra avec le temps… La nature n’aimant pas le vide, chacun  s’octroiera un rôle dans ce nouveau planisphère, mais nul n’en sortira indemne. Les psychologues disent facilement que l’on grandi par ses échecs et ses frustrations ; cela est vrai, mais laisse des cicatrices parfois indélébiles. La vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille !

Sous une forme quasi épistolaire des réflexions de chacun, Aurélie Fredy conduit le lecteur dans le perçu profond de chaque personne de la famille. Les colères, le déni, les espérances sont admirablement décrits ; de même, l’évolution de la perception individuelle se distille au long du roman, laissant s’exprimer le chemin parcouru de chaque individu. L’ensemble forme une jolie fresque telle que la vivent près de la moitié de nos concitoyens ! Un roman intéressant, se gardant de sombrer dans le pathos, édifiant pour les candidats au départ, presque rassurant pour ceux cherchant leur envol.

4éme de couverture

Paris 1957, les femmes mariées étouffent souvent sous le joug des convenances. Jeanne, 32 ans, mère de cinq enfants, s’enlise dans un mariage qui sclérose sa vie.
Un matin, elle décidera de tout abandonner… sans se soucier des répercussions.
Une saga sur trois générations, où Nicole, une des filles de Jeanne, va se construire en l’absence d’affection maternelle.

L’auteur

Crédit photo (Editions Elan Sud)

De l’architecture à l’écriture, il y a un pont. L’auteure, ingénieur en bâtiment, l’a franchi depuis bien longtemps.
Témoin de son époque, comme nous le sommes tous, Aurélie Frédy taquine la plume depuis quelques années déjà. Nouvelles et autres textes ont vu ou verront le jour prochainement.

Dans la collection élan d’elles, par choix de l’éditeur, ce roman a été primé en 2013 par le jury du Prix « Première chance à l’écriture ».