En Europe, Mme Merkel et M. Hollande s’entendent. Et si c’était pour faire l’envers de ce qu’il faut ? (« Une bon accord verrait l’Allemagne approuver une union bancaire qui met en commun au moins une partie des risques de la zone euro, et la France accepter la nécessité de libéraliser son économie, renforcer le marché unique et abandonner les barrières au commerce international. ») Effectivement, l’union bancaire européenne partirait sur des bases fragiles. Pour qu’elle puisse se construire, la BCE devra faire preuve de talent, et probablement de pas mal de chance. Si elle réussit, les moyens dont elle aurait eu besoin dès le départ lui seront donnés progressivement. Si elle rate, la seule institution crédible de la zone euro sera discréditée. (Vue la complexité des règles à faire évoluer, c'était peut-être la seule façon de procéder, me dis-je.) En Allemagne, une succession de scandales élimine l’un après l’autre les successeurs possibles de Mme Merkel. Le président hongrois « recrée le modèle de gouvernement communiste ». Des sanctions européennes pourraient être contreproductives. Il est préférable d’attendre que la crise abatte son gouvernement.
Ailleurs, la poigne de fer de M. Erdogan serait à l’origine du mécontentement turc. Comme souvent, il pourrait périr par ce qui a fait son succès, et celui de son pays. « Polariser le pays est dans sa nature. Si cela continue, une décennie de stabilité économique et politique sous l’AKP pourrait en arriver à une fin pitoyable, voire tragique. » Bashar el Asad, grâce à l’aide iranienne, et du Hezbollah, a pris l’avantage sur ses opposants. En Libye, le chaos ruine les espoirs des pétroliers. L’économie brésilienne ne va pas très bien. La volonté de sa présidente d’améliorer le sort de son peuple en « relançant la croissance en augmentant les dépenses publiques et le salaire minimum » ne semble plus fonctionner. Crise et ralentissement chinois ont atteint les exportations du pays. Et l’action de Mme Roussef est gênée par les mauvaises relations qu’elle entretient avec le secteur privé et les partis politiques brésiliens.
Une étude montre que les dirigeants se croient aimés, alors que leurs subordonnés construisent des coalitions qui leur sont hostiles. Ils tendent aussi à ne plus utiliser que les compétences qui les ont fait réussir, et à perdre leur capacité à décoder le comportement d'autrui. Mais, ils sont surtout coupés de la réalité. Ce qui les empêche de s’adapter. Curieusement, The Economist rejoint Hannah Arendt en pensant que la qualité première du leader doit être le « jugement ».