Ce blog ne commente pas l’actualité mais la mort de Pierre Mauroy me rappelle au souvenir de mon ami Hervé, trop tôt disparu.
Hervé était un pilier de la section locale du PS. Il était au parti, simplement, naturellement, par profonde conviction de la nécéssité d'une société plus juste. Il adhérait à ce socialisme populaire avec son ancrage local et ses racines ouvrières.
En 1986, sous l’impulsion de Mitterrand, eurent lieu des élections au système proportionnel départemental. Le PS avait propulsé Dominique Strauss-Kahn en Haute-Savoie, parachutage donc. Sauf que nous les savoyard, on avait notre grand homme, Robert Borel, alors maire d’Annemasse. Du coup, un grand nombre de militants et de sympathisants se retrouvèrent en rupture avec le parti, derrière Robert Borrel.
J’avoue que pour moi, c’était sans état d’âme. Mon âme militante, je l’avais perdu, avant 81, dans une réunion de section où certains parlaient d’entreprises qui devaient cracher au bassinet* lorsque l’on serait au pouvoir.
Campagne 86 donc, on annonce que Pierre Mauroy va venir à Annemasse pour soutenir la liste PS conduite par Strauss-Kahn. Nous, les soutiens de Borrel, décidons d’aller un peu perturber le meeting à Château Rouge.
Nous faisons voiture commune avec Hervé. Durant le trajet, je le sens un peu réticent. Il n’était pas bavard le bougre mais il finit quand même par m’expliquer qu’aller chahuter Mauroy était pour lui quelque chose de bien difficile. En quelques mots, il me fait comprendre ce que Mauroy représente pour lui. Pas seulement le premier premier-ministre du quinquennat mais aussi un homme simple, profondément de gauche, humaniste… bref tout ce que vous pouvez lire aujourd’hui dans la presse.
Nous sommes quand même entrés dans Château Rouge. Moi, iconoclaste et toujours frondeur, quand Mauroy est entré, j’ai vociféré mon désaccord pour ce soutien au parachuté. Hervé est resté plus discret au fond de la salle. Nous avons tous fini à l’auditorium ou Robert nous a parlé de ses intentions. Borrel a été élu, exclu du parti, il a siégé deux ans avec les sans étiquette. Aujourd'hui, à presque 80 ans, il continue d'oeuvrer au service du territoire, il est président de l'ARC, la partie française du Grand Genève.
DSK, élu lui aussi, jurant qu’il serait savoyard à vie, est parti deux ans plus tard pour Sarcelles et de nouvelles aventures.
Hervé, si ton âme bonne et simple erre quelque part, ce que je ne crois guère, je t’envoie mes amitiés socialistes.
* Cracher au bassinet veut dire donner de l’argent à contrecœur.