La France est traversée par des confrontations plus ou moins violentes. Chaque semaine en donne une nouvelle illustration, souvent imprévisible.
Chaque semaine, certains y résistent, d'autres les attisent.
Cela fait 318 semaines que cela dure.
Famille de gauche
Dimanche, Hollande "tranche" dans la soirée sur l'épineuse question: qui paiera le redressement de la branche famille de la Sécu ? Le lendemain, Jean-Marc Ayrault dévoile un dispositif plus complet que prévu: 275.000 places d'accueil d'enfants supplémentaires, majoration de 50% du Complément familial et de 25% de l'allocation de soutien scolaire pour 400.000 ménages les moins riches, création de nouvelles aides à la CAF; et ... un abaissement du quotient familial à 1.500 euros par enfant. Les allocations familiales ne sont pas touchées. La droite hurle au "matraquage" fiscal. La gauche de la gauche est plus troublée, presque favorable. L'espace de quelques heures, le débat politique s'éclaircit; ça nous change des disputes (légitimes) sur les retraites, l'ANI ou l'autoentreprenariat.
Il faut juste consacrer quelque temps à rappeler quelques chiffres sur la réalité des classes moyennes et la moyenne des revenus dans ce pays. L'effort demandé frappe moins de 20% des familles aux plus hauts revenus.
Mardi, Hollande est à Marseille. Il livre une interview à un quotidien local désormais propriété de Bernard Tapie, avoue ses regrets. La chose est à peine remarquée. Mercredi, il tient son conseil des ministres. Aurélie Filippetti présente un premier projet de loi audiovisuelle. Le CSA sera réduit de deux membres - ceux désignés par le président de la République. Les présidents de l'audiovisuel public ne seront plus nommés par l'Elysée. Juste avant, elle inaugure les Assises de l'audiovisuel. Et balance encore contre Amazon, multinationale de la distribution délocalisée qui est accusée de tous les maux de nos industries culturelles. Mais le sujet n'intéresse pas. Son collègue de la Mer, Frédéric Cuvillier clôt des Assises du Littoral dont personne n'a entendu parlé. Même indifférence. La démarche est à la concertation, mais cela ne suffit pas.
Japon
Jeudi et vendredi, Hollande est au Japon. Il cause nucléaire. Luc Oursel, PDG d'Areva, est du voyage. Il s'épanche sur le site de l'Elysée. Cela agace ses partenaires écologistes. Nous n'en sommes pas aux caricatures sarkozyennes post-Fukushima, mais le symbole est désagréable pour les opposants à l'atome. Le réseau Sortir du nucléaire estime "inacceptable que le gouvernement français apporte son soutien aux projets de relance du nucléaire du gouvernement japonais, au mépris du peuple japonais qui veut dire adieu à cette technologie de mort." Hollande voyage trop. Il commet un court lapsus qui amuse la galerie.
Au Japon, le vrai sujet n'est pas le nucléaire, mais de sortir d'un quinquennat d'indifférence et de mépris. Trop loin, le Japon n'a jamais intéressé la diplomatie sarkozyste. Pire, Jacques Chirac était si fasciné par la culture nippone qu'il fallait bien que Nicolas Sarkozy la déteste ou l'ignore, dans son obsession de rupture.
Bref, à Tokyo, Hollande vient réparer, structurer, consolider. Les grandes manoeuvres du libre-échange reprennent. Un nouveau "round" de négociations commerciales internationales sous l'égide de l'OMC a débuté. Hollande applaudit la politique dite des "trois flèches" mise en oeuvre par le nouveau gouvernement japonais de Shinzo Abe: "largesses budgétaire, souplesse monétaire et stratégie de croissance". "La parabole des trois flèches a fait le tour du monde". Le chroniqueur politique du Figaro préfère commenter les smokings et robes de soirée du dîner impérial.
Hollande voyage beaucoup mais il dépense moins que Sarkozy. En 2012, l'Elysée a rendu 6 des 109 millions d'euros de son budget.
Autre bonne nouvelle sur le front budgétaire: la suppression de quelques niches fiscales décidées l'été dernier - comme l'exonération de charges sociales et d'impôts des heures supplémentaires - a permis de réduire nos déficits sociaux. Les résultats sont tombés, factuels et incontestables. La Sécu a réduit son déficit de 3 milliards d'euros par rapport à 2011. Mais le trou reste large, 17 milliards.
Du côté des impôts, les rentrées fiscales stagnent.
Un cabinet d'audit confirme ce que l'on savait: la France est moins attractive pour les investisseurs étrangers depuis... 2002. Le nombre de projets d'implantation a même décroché en 2010.
Confrontation (1)
Un étudiant meurt après une rixe avec des skinheads d'extrême droite, dans le Nord de Paris. Clément Méric, son nom devient symbole. On se lance dans d'effroyables comparaisons - extrême gauche contre extrême droite. On lit Mélenchon enjoindre ses supporteurs de se "tenir à distance" du PS lors des hommages au jeune homme. On reste sans voix. A quelques rares exceptions près, la gauche - c'est-à-dire ses militants et sympathisants - est heureusement plus rassemblée dans l'hommage au militant tué. Jean-Marc Ayrault, à la tribune de l'Assemblée, annonce vouloir "tailler en pièces les groupuscules d'extrême droite".
Serge Ayoub, alias "Batskin", s'épanche devant les caméras, il a peur: "c'est de la légitime défense, celui qui est mort est l'agresseur". Mais le même skinhead en chef explique qu'il ne connaît aucun des auteurs présumés de la rixe. On cherche le cas d'un Skin mort ou tabassé sous les coups de gauchistes. On cherche, mais on ne trouve pas. Il n'y en a pas. Le jour de fête de Jeanne d'Arc, Batskin aime défiler le bras tendu de noir vêtu. Sur iTélé, il porte une veste. Il bafouille qu'il ne connaît pas les agresseurs, qu'il leur a téléphoné, qu'ils ne sont pas agresseurs. Cherchez l'erreur.
L'autopsie révèlerait que Méric est mort des coups et non d'une chute.
Frigide Barjot récuse que cet accès de violence soit un dramatique épilogue des manifestations contre le mariage gay. Elle porte plainte contre Pierre Bergé qui l'accuse imprudemment.
Quelques autres fascistes espèrent un putsch militaire, rien que ça. Une revue dénommée Arsenal évoque le "combat" en coulisses de quelques hauts gradés contre le cabinet jugé "franc-maçon" du ministre de la Défense. On croit cauchemarder. Quelques-uns de ces prétendus félons seraient encore poste, jusqu'à .... l'Elysée, tel Benoît Puga, chef d'état-major particulier du président de la République. Son frère est membre de l'horrible Civitas.
Dans le pays basque, à Arcangues, un maire et ses adjoints nous font honte. Ils préviennent qu'ils ne marieront aucun couple homosexuel. Il explique: "je suis avant tout un bon Français. Cette loi est illégitime." Ce maire est illégitime.
Depuis 6 ans déjà, le FBI a un accès total aux fichiers de Google, Yahoo, Skype et autres Facebook. Obama assume. Big Brother est parmi nous.
Nous étions prévenus.
Confrontation (2)
Nicolas Sarkozy parle chez Goldman Sachs. Cette causerie sur le sort du monde lui rapporte 100.000 dollars, payé pour un gars qui dénonçait les "banksters" tout en plombant les comptes du pays de 600 milliards d'euros de dette. Il dit qu'il veut revenir en France. Le jugement de sa demande d'annulation de sa mise en examen dans l'affaire Bettencourt est reporté à juillet. Douze avocats tentent de torpiller la procédure après la révélation que l'un des expert médicaux ayant déclaré Liliane Bettencourt fragile était témoin de mariage du juge. Cet expert n'était pas seul. Qui peut croire que Liliane Bettencourt n'est pas en état de faiblesse ?
Encore une affaire Guéant . Le Point publie un curieux email envoyé par l'ami Claude, alors secrétaire général de l'Elysée, à un oligarque russe lui demandant de faire des affaires avec son gendre afin de réchauffer les relations franco-russes.
On reste sans voix. Ces gens-là s'imaginent serviteur de l'Etat. Il faudra décorer le dissident UMP de Boulogne Billancourt qui, en juin 2012, a fait échec à la candidature Guéant pour les législatives.
François Fillon ose la confrontation: "Je l’ai suivi loyalement comme Premier ministre, on a un caractère différent, une vision différente de l’avenir". Comment croire qu'il ne se couchera pas si Sarko revient dans le jeu ? Il s'est couché 5 années durant. Jeudi, sur France 2, il croit que les municipales se jouent à un tour.
Pierre Mauroy décède. "Socialiste loyal", écrit même le Figaro.
Hommage.