La publication en librairie, même à l’occasion d’une réédition, d’un texte de Guy Dupré (né en 1928) est toujours un événement littéraire. Car cet écrivain, dont l’œuvre se limite à quelques titres, compte parmi les plus importants de sa génération. A l’heure où la scène éditoriale continue de proposer des « autofictions » pénibles, suintantes de bons sentiments comme de mauvaises confidences et, le plus souvent, écrites avec les pieds, il est réjouissant de savourer l’écriture somptueuse – l’épithète n’est pas usurpée – de Guy Dupré.
Dans Les Manœuvres d’automne (Bartillat, collection Omnia, 248 p., 13 €) l’auteur livre des fragments de souvenirs, non à la manière d’un mémorialiste, mais par touches successives ; à travers une étonnante galerie de portraits, il sème pour ses lecteurs de petits cailloux autobiographiques ciselés comme des pierres précieuses. Les figures de Sunsiaré de Larcône (et, donc, de Roger Nimier), de Maurice Barrès, d’Anna de Noailles, de l’énigmatique « Louise de Prusse », de Milosz, de Maxime Weygand, de Maurice Rostand, de Charles de Gaulle, de François Mitterrand ou de Julien Gracq sont ainsi évoquées, parmi d’autres.
Peu d’auteurs, de nos jours, sauraient tenir la plume d’une main aussi magique que Guy Dupré.
Illustration : Sunsiaré de Larcône, photographies.