Magazine Culture

Pourquoi le non-dualisme peut-il ressembler au fascisme ?

Publié le 05 juin 2013 par Anargala

La non-dualité est un concept formé par exclusion de la dualité. Parler de "non-dualité", c'est dire "non" à la dualité. Or la dualité, c'est poser une chose en excluant tout ce qui n'est pas elle. Donc la non-dualité est l'exclusion de l'exclusion, encore une exclusion. Dire "non" au "non", c'est encore dire "non"... Donc la non-dualité fait partie de la dualité.
C'est pourquoi Abhinavagupta proposent une non-dualité ultime qui ne serait pas l'exclusion de la dualité, mais la reconnaissance en toute circonstance que la dualité est la manifestation d'un fond d'unité - la conscience qui lit ces lignes (ou pas).
La dualité est manifestation de la non-dualité. La reconnaissance de la non-dualité n'annule pas la dualité, mais la transfigure, la transforme, la transmute, comme on voudra.
Donc il y a une unité - appelons-la "conscience" - qui est par-delà Bien et Mal. Mais elle n'est pas neutre. Elle est bonne. Comment est-ce possible ? Parce que le Mal fait partie d'un Bien plus vaste, de même que l'inconscience est une façon pour la conscience de prendre conscience d'elle-même, de même que l'aliénation est une forme de liberté sauvage et que l'ignorance est une connaissance incomplète.
A la suite de ce que j'ai dis iciet , je ne puis que confirmer que ce genre de discours peut servir à justifier les pires horreurs.
Pour autant, ce discours, et surtout, l'expérience qui le nourrit - sont-ils horribles ? Pas du tout. Simplement, il y a des choses qui sont belles dans un contexte et qui deviennent laides dans un autre. Pour prendre un exemple trivial, faire l'amour est beau, mais vouloir le faire avec un enfant - ou le lui montrer - conduit à une forme de laideur. De même, la "non-dualité ultime" est belle et bonne pour l'individu. Mais elle deviendrait une atroce tyrannie si elle devenait la doctrine d'un peuple ou d'un Etat. Un exemple analogue est celui du stoïcisme : belle morale qui fait de nécessité vertu, elle devient totalitarisme abominable si l'on en fait une doctrine politique.
Donc, non seulement il y a une différence entre une expérience impersonnelle infra-rationnelle et une autre, trans-rationnelle, mais encore il y a une différence entre une doctrine si elle est adressée à un individu en son intimité ou à un groupe. Ce qui est vertu à une échelle devient vice à une autre. C'est ainsi qu'un discours impersonnel est beau et bon s'il s'adresse à un individu et émane d'une expérience, et mauvais et laid s'il émane d'une institution (d'une entreprise, d'une secte, voire, d'une Église) ou d'un État, ce "plus froid des monstres froids". 
Il en va de même pour tous les discours mystiques et radicaux. C'est aussi pourquoi je pense qu'il est bon de toujours envisager les religions et les philosophies comme expressions d'une expérience - tout en gardant un œil sur ce qui peut se passer si ces expériences deviennent vérités d’Évangiles pour "guider le peuple" ou accroître la compétitivité.
Pourquoi le non-dualisme peut-il ressembler au fascisme ?
Voilà pourquoi un même discours impersonnel et non-dualiste peut sembler foudroyant ou effroyable.

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Anargala 10656 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine