Après l’excellent album Cinq mille kilomètres par seconde, récompensé par le Fauve du meilleur album au festival d’Angoulême 2011, Manuele Fior se distingue à nouveau avec ce one-shot sélectionné pour le Prix des Libraires 2013.
Si le récit débute par un accident de la circulation, ponctué de visions pour le moins insolites, il repose surtout sur la rencontre entre Raniero, psychologue dans la cinquantaine, et Dora, une jeune patiente de trente ans sa cadette. Victime d’un accident de voiture et d’un passage à tabac à son domicile, cet homme qui partage de surcroît sa vie avec une femme qui est sur le point de le quitter traverse donc une période particulièrement difficile au moment où il rencontre cette patiente qui affirme être en contact télépathique avec des extraterrestres. L’auteur invite donc à suivre la remise en question de cet homme dont la vie se retrouve totalement chamboulée.
Cette histoire qui mêle science-fiction et romance se déroule en 2048, dans une Italie victime d’une profonde mutation sociale. Le lecteur se retrouve ainsi dans un récit d’anticipation où les voitures sont électriques et téléguidées, mais surtout dans un contexte futuriste où les jeunes se sont rangés sous la bannière d’une « nouvelle convention » prônant la « non exclusivité émotive et sexuelle». Cette remise en question de notre société, saupoudrée d’une légère dose de phénomènes paranormaux contribue à plonger l’ensemble dans une ambiance intrigante et prenante. Ce manque de repères au sein d’une société qui a tourné le dos à ses traditions peut s’avérer déstabilisant, mais pousse également cet homme à s’ouvrir à de nouvelles choses, à embrasser l’inconnu et l’inconnue… Il est donc question d’amour, de conflit générationnel et même du sens de la vie.
Visuellement, Manuele Fior délaisse les aquarelles lumineuses de Cinq mille kilomètres par seconde au profit d’un trait charbonneux et d’un graphisme noir et blanc mêlant lavis et fusain. Reposant sur un jeu d’ombres et de lumière parfaitement maîtrisé, cette mise en images crée une atmosphère onirique qui se place au diapason du scénario.
Invitant à la réflexion et au partage des sentiments, cette œuvre en constant décalage avec la réalité risque d’en déstabiliser plus d’un.
Ils en parlent également : Jérôme, Cristie, Mo’, Lunch, Zaelle
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