Le chef d’orchestre de l’Opéra Bastille, mort en direct, sur scène! Il a fui dans les coulisses pendant de longues minutes en proie à de drôles d’hallucination avant d’expirer devant un public ébahi venu assister à la première de La Flute Enchantée, de Mozart. On fait bien sûr appel au fin limier le plus célèbre de Paris, le commissaire Guillaume Suitaume. Accompagné de la pure et sculpturale Purdey Prune, il découvre vite que la loge du maestro a été victime d’une fouille en règle. Que cherchait le meurtrier? Peut-être le contenu des recherches de la victime, concernant les liens qu’entretenait Mozart avec les Francs-maçons. Le célèbre compositeur serait-il détenteur d’un secret dangereux sur les Francs-maçons? Le vol de la partition originale de La Flute Enchantée, laissant un nouveau cadavre, confirme que quelqu’un cherche à percer les secrets laissés par le musicien. Le commissaire Suitaume reçoit alors une lettre d’un cabinet de voyance: Irma Bienrgardais, medium de son état, affirme être harcelé par l’esprit tourmenté de Mozart lui-même, affirmant qu’il a été assassiné et que ce crime ne fut jamais puni. Mais pourquoi cette affaire refait-elle surface maintenant?
Encore une fois, les enquêtes du commissaires Suitaume nous régalent d’inventivité et de bouffonnerie. Le livre s’ouvre sur le délire hallucinatoire du futur mort aussi loufoque qu’hilarant. Incapables de s’entendre, les Francs-maçons que l’on croise dans le livre semblent compter un bon nombre d’imbéciles incapables de se rappeler des codes d’une organisation aussi soigneusement agencée. L’identité des personnages clés, comme le medium ou la chanteuse, sont l’occasion de retournement de situation improbables mais réussis. C’est à se demander comment le commissaire Suitaume parvient à garder son flegme viking devant tant de bazar.
Et pourtant, son sang-froid va être mis à rude épreuve car la divine Purdey Prune, toujours aussi belle et impassible, semble fendre le masque et les situations compromettantes entre le commissaire et son assistante se font plus explicites, au point que l’auteur s’autorise un ralenti littéraire, soit quatre page entière de description, hésitation et tentation qui durent en réalité quatre secondes. Mais l’enquête d’abord!
Faire de Mozart un fantôme un tantinet déjanté, et descendre de son piédestal la franc-maçonnerie qui suscite autant d’interrogations que d’admiration, cela fait du bien. Pourtant, on est loin d’avoir là une intrigue au rabais, puisqu’on nous réexplique, avec force calembours, l’origine et les principes de cette association et surtout, ses prétentions politiques. Soigneusement ancré sur l’actualité, ce roman en profite donc pour épingler les manigances séculaires qui visent, dans l’ombre, à porter au pouvoir des individus choisis. Comme d’habitude, la plume de Gordon Zola sait autant nous faire hurler de rire que s’adresser à notre fond de conscience. Du rire intelligent, voilà qui me plaît, même si c’est parfois un peu complexe et que je ne suis pas sûre d’avoir réussi à tout comprendre.
La note de Mélu:
Encore de quoi bien rire! Rien que le titre de cet article devrait vous mettre l’eau à la bouche (ah! je m’y mets!).
Un mot sur l’auteur: Gordon Zola est un auteur spécialisé dans le roman comique. On lui doit notamment la série des aventures de Saint-Tin et de son ami Lou, et les enquêtes de Guillaume Suitaume. D’autres de ses oeuvres sur Ma Bouquinerie: