L’heure a sonné de m’offrir une lecture réconfortante. Avec Mylène Gilbert-Dumas, j’ai l’assurance de trouver de l’espoir en l’être humain, même le plus borné finit par s’ouvrir à la vie. Cette fois-ci, c’est Adélaïde, que la vie forcera à sortir ses ailes. Elle n’a de jeune que sa vingtaine puisque dans sa tête comme dans son cœur, elle vit en personne âgée traumatisée par tout. Absolument tout, et particulièrement l’amour. Rien de plus bouleversant que l’amour.
Elle habite un vieil édifice dans le quartier St-Jean Batiste à Québec, sa mère au premier, elle et sa petite fille de sept ans au deuxième, un ami au troisième. Ils sont tous fauchés, même s’ils travaillent. Adélaïde, en tant que mère monoparentale est obligé de travailler dans un bureau de comptable qu’elle déteste. Le seul moment de la journée où elle sort des sentiers étroits de sa vie sans envergure, c’est le soir quand elle dessine. Son projet, auquel elle croit plus ou moins, est rendre à terme sa bande dessinée. Sa petite fille Marjolaine est un bout en train et sa grand-mère également. Cette dernière, tireuse de cartes assez populaire est pourvue d’un esprit allumé, moderne. Les rôles sont inversés avec sa fille, c’est elle qui a la jeunesse de caractère. Arrivera dans ce trio tissé serré, un nouveau personnage. Un étranger. Un homme qui parle anglais louera une chambre et viendra bouleverser les habitudes de tous et chacun.
Même si l’histoire tourne autour d’Adélaïde, la petite Marjolaine prendra beaucoup de place. Je n’ai pas eu de difficulté à croire à la vivacité de cet enfant. Le ton est juste, équilibré, sautillant de vie. L’homme étranger est mystérieux, la barrière de la langue tangible. J’ai eu un peu plus de difficulté à cerner la grand-maman que j’imaginais beaucoup trop âgée au début. Sa libido dans le plafond aurait pourtant dû m’aiguiller ! L’homme du troisième, un musicien bohème est amoureux d’Adélaïde.
Celle-ci a une peur viscérale de l’inconnu et, pourtant, par obligation, elle en accueillera un entre ses murs. C’est intéressant, sans être trépident. Beaucoup de quotidien, de petits riens qui prennent à la longue leurs sens. C’est une histoire qui se passe à la troisième vitesse, dans la lenteur et la réflexion, nous donnant le temps de l’assimiler à sa pleine mesure. La lecture a quelque chose de réconfortant. C’est limite cependant, un peu moins de rebondissements et l’intérêt aurait pu basculer. Le fil de l’intrigue étant ténu, parlons plutôt de roman d’ambiance, à la Michel Tremblay. L’idéal est de s’en imprégner et ne pas attendre ce que cette histoire ne donnera pas, des palpitations cardiaques.
C’est le troisième roman de Mylène Gilbert-Dumas, depuis qu’elle a délaissé les romans historiques et elle devient experte dans le développement de personnages barricadés dans leurs limites, dont le caractère progresse vers sur la route de la libération. Adélaïde est emprisonnée, de quelle manière arrivera-t-elle à pousser les barreaux pour respirer de l’air frais s’accordant avec sa jeunesse ? Si vous voulez une réponse, venez-la rencontrer et, au bout de la ligne, peut-être que c’est vous que vous rencontrerez.