Dans la nuit, la liberté nous écoute de Maximilien Le Roy (Bande dessinée sur la guerre d’Indochine, 2011)

Dans ce nouvel ouvrage, Maximilien Le Roy met en image le livre autobiographique d’Albert Clavier « De l’Indochine coloniale au Vietnam libre ».
La vie d’Albert Clavier a été mouvementée. À 16 ans, pendant la Seconde Guerre mondiale, son frère aîné est arrêté par les Allemands. Par précaution, il doit fuir. Malgré lui, ce sera sa première participation à une lutte contre une forme d’oppression.
On retrouve ensuite Albert quelques années plus tard, en 1947, comme soldat de l’armée française. Les Boches kaputt, la France décide de remettre de l’ordre en Indochine où le Vietnam a proclamé son indépendance en septembre 1945. Sur le trajet le menant en Asie, le bateau des fraîches recrues fait escale à Djibouti. C’est une grande désillusion pour Albert. Il y découvre la réalité des colonies : la misère ambiante ainsi que le comportement des blancs vis-à-vis des autochtones, c'est-à-dire loin de l’œuvre civilisatrice décrite dans les manuels scolaires.
Albert se dit alors qu’il est mal tombé et qu’ailleurs ça doit être différent. Mais de toute évidence au Vietnam la situation n’est pas distincte. Par-dessus tout, la vie chez les bidasses, ce n’est pas son truc.
Albert va réussir à obtenir un poste qui l’éloignera du front et lui laissera plus de liberté. Malgré les interdictions, il va se promener au large de la base militaire où il fera la connaissance de Bat, un Vietnamien.
Des liens d’amitié se tissent et Bat révèle à Albert qu’il fait partie du Vietminh (groupe paramilitaire luttant pour l’indépendance du Vietnam et dirigé par Hô Chi Minh). Le comportement de l’armée française et le discours de Bat provoquent un volte-face chez Albert. Il quitte les rangs de l’armée française et se range du côté de la résistance vietnamienne sans pour autant participer directement aux combats. Ce revirement lui vaudra d’être condamné à mort par la France.
Une histoire hors du commun d’un homme qui, pour ne pas renier ses idées, décide de passer à l’ennemi, dans l’anonymat et être considéré comme un traître par sa patrie. Beaucoup de courage lui a dû être nécessaire pour prendre cette décision.
Après la guerre, Albert Clavier se mariera là-bas avec une Vietnamienne, mais son statut de déserteur de l’armée porté comme un fardeau l’oblige à se séparer de sa femme. Amnistié, il revient en France en 1966, loin de sa famille. Il meurt en mars 2011, avant la parution de cette bande dessinée à laquelle il avait participé.
Très belle histoire sur l’histoire hors du commun de cet homme, illustrée par des photos d'Albert et de sa famille en fin de page, ainsi que d'une interview de Alain Ruscio historien spécialiste du Vietnam.