Tueurs de maman (T1)

Quand cinq adolescentes, au contexte familial difficile, s’amusent à commander sur le net des punitions pour leur mère…

Scénario de Zidrou, dessin de Ers. Public conseillé : Enfants (10-12 ans minimum)

Style : Thriller Paru chez Dupuis, le 3 mai 2013 Share

L’Histoire

Toronto Mazde, une jeune fille métisse vient arrive en cours d’année dans un nouveau collège. Elle est aussitôt intégrée dans le club secret des « nonnettes ». Le point commun des membres (Béatriz, Marie, Valentine, Kom Piu) : vivre père à la maison.
Les adolescentes se réunissent dans une cachette secrète (une chapelle désaffectée) pour « refaire le monde » et se plaindre de leurs mères respectives. Pour Toronto, c’est l’homosexualité de sa mère, Kom Piu la musulmane ne supporte pas le port du voile, Valentine a honte de l’obésité maternelle, Marie aspire à plus de liberté. Quand à Béatriz, handicapée de naissance, ses griefs sont infinis…
Lors d’une séance, les filles tombent sur le site « Castigo », qui propose de châtier les personnes de son choix contre rémunération. Prenant cela pour une blague, elles se défoulent en imaginant les sanctions que leurs mères « méritent »..

LA nouvelle série pour ado’

Zidrou, le scénariste à suivre (La peau de l’ours, Le beau Voyage, Folies Bergère, Le client…) revient avec une nouvelle série. C’est un thriller moderne et sans concession, porté par le dessin semi-réaliste de Ers (Hell School, Les démons d’Alexia) qui place la barre haut. Car « Tueurs de Maman » joue dans la même cour que la méga-série « Seuls » de Ers et Velhmann.
Tout comme cette série (qui a su trouver un large public), Zidrou et Ers font le pari de proposer un vrai thriller angoissant et dense, à destination d’un public adolescent. C’est tout le savoir-faire de Zidrou qui est en jeu.
Fin observateur, Zidrou invente des personnages d’une crédibilité incroyable. Dialogues, ton, questionnement, problèmes d’âge et de condition, Zidrou sait trouver les mots pour sonner « juste ». Refusant tout archétypes, il compose des portraits de jeunes filles modernes et complexes dans leurs rapports avec le monde contemporain.

De l’humain et de la structure

Derrière la fiction, Zidrou évoque avec délicatesse les problèmes inhérent à l’adolescence. Conditions sociales, reconnaissance par les adultes, autonomie, acceptation de la différence, il brosse un portrait de société assez noir, mais décrit avec humanité et tolérance.
« Tueurs de maman » s’interroge aussi sur la responsabilité de nos actes. Qui sont les coupables ? Les donneurs d’ordre ou la main qui exécute ? Internet permet-il de se dé-responsabiliser ? A moins que ce soit le groupe qui soit responsable des actes de chacun ? Les remords effacent-ils les actes ?
Autant de questions que « Tueurs de maman » nous oblige à nous poser. Zidrou, fin psychologue, ne donne pas de réponse « absolue ». Il nous rappelle que nos actes portent à conséquence et que le groupe n’est pas toujours de bon conseil.
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Coté construction, Zidrou assure une structure classique et bien huilée. Après l’exposition de l’intrigue et des personnages, la tension monte avec le premier châtiment. L’apparition du « justicier », vêtu d’un costume comique, nous déstabilise jusqu’à la punition. La peur s’installe alors quand les jeunes filles s’aperçoivent que la machine ne peut plus être arrêtée. La tension monte d’un cran à chaque punition (de plus en plus brutale) jusqu’à un dénouement carrément atroce.

Le dessin

Graphiquement, le style de Ers déjà très au point sur ses précédentes séries, est assez classique. Son trait semiréaliste conserve la bonne distance par rapport à l’aspect dramatique des situations. L’encrage, école « Marcinelle », est parfaitement maîtrisé et l’ensemble est d’une fluidité exemplaire. Avec cette qualité de dessin, nul doute que « ‘Tueurs de maman » trouvera aussi un lectorat adulte, avide de thrillers.
Détail étonnant, la couverture est extrêmement sobre. Fond noir, un seul personnage qui vous regarde et pas de mentions des auteurs… Vous avez dit bizarre ?
Même si le but de cette approche radicale permet d’attirer l’attention d’un acheteur potentiel, je la trouve peu engageante et peu vendeuse…

Pour résumer

Zidrou et Ers tentent de créer la série événement qui parle « DE » et « POUR » un public adolescent.
« Tueur de maman » entraîne ses personnages et ses lecteurs dans un thriller réaliste, contemporain et angoissant. Un genre et un public que peu de série tentent de mélanger. Centré sur l’humain, Zidrou dresse un portrait criant de vérité de six adolescentes en recherche d’identité et de reconnaissance. Son thriller efficace, servi par le dessin nickel de Ers, vous divertira tout en vous faisant réfléchir sur la responsabilité de vos actes.