Dans un précédent billet, je prophétisais qu'il faudrait peu de temps avant qu'un producteur français ne lance sa propre chaîne en ligne, en se finançant directement auprès de ses spectateurs.
Ce n'est évidement pas du nouveau, la polémique concernant la fin de son émission "hertzienne" a fait rage pendant cet été. Mais un intéressant interview, paru cette semaine dans le supplément Télé-Ciné du nouvel Observateur (Édition du samedi 13 au vendredi 19 octobre 2007, p.20) , vient nous donner des précisions sur cette tentative française d' "hyper-télévision" :
- "L'émission de 52 minutes telles que vous l'avez connue, c'est fini. Mais l'esprit et le champ de recherche demeurent. Nous devons inventer d'autres formats : des contenus écrits, des vidéos, des débats de cinq à douze minutes."
Programmes courts ou très courts, contenus complémentaires sur d'autres médias, une discussion permanente avec les spectateurs par le biais d'un blog, d'un forum ou d'un chat... L'hyper-télévision passera de toute manière par ces trois éléments. L'interview ne précise pas si les contenus vidéos seront téléchargeables et "transportables" (sur mon mobile, ma console portable), mais Schneidermann aimant pousser ses logiques à fond, celà ne m'étonnerait guère...
- "Pour ne pas s'engager dans un galère (note : financière, suppose-t-on), il nous fallait un minimum de 15 000 abonnés, nous les avons dépassés. A 50 000, ce serait quasiment une chaîne."
Le chiffre est intéressant, et il est rare que les promoteurs de ce genre d'initiative affichent des objectifs ou des résultats. Plus intéressant encore, la perspective de transformer une émission "multimédia" (au sens propre) en une "hyper-chaîne", ultra thématique, sans publicité et avec le seul financement des spectateurs. Ce serait une première en France (et à l'étranger ? Je vais me documenter...).
Reste deux ou trois défis de taille à cette aventure dans laquelle Schneidermann s'engage :
- Le temps. Après un démarrage en fanfare, combien de temps les internautes suivront et soutiendront l'initiative ? Ou pour poser la question de manière positive, de quelle manière Schneidermann et son équipe arriveront-il à renouveler leur audience, à la diversifier - et donc à continuer à bénéficier d'une source de financement ? J'ai bien une dizaine d'idées là-dessus... mais désolé, je les garde pour moi ! (Sait-on jamais : Schneidermann pourrait venir toquer à ma porte pour prendre un thé et discuter de cette idée ces idées ! Verveine ou Earl Grey, Daniel ?)
- La responsabilité éditoriale par rapport des abonnés. L'animateur le dit lui-même dans l'interview : "Nous sommes définitivement des emmerdeurs." Lorsque d'autres emmerdeurs parmi ses abonnés pointerons des incohérences, des défauts, se plaindront de la partialité dans le choix des sujets ou leur traitement, quelle sera la responsabilité éditoriale de l'équipe de www.arretssurimage.net vis-à-vis de ses abonnés ? Laisser dire ? Répondre ? Mettre en place, comme ces dernières années sur France 5, un espace de "médiation" avec les spectateurs (les tensions sur le plateau entre Schneidermann et Chloé Delaume m'auraient presque rendu cette dernière sympathique...) ? Comment modérer un abonné tenant des propos utiles aux débats mais diffamants ou à la limite de la légalité ?
- Le rapport aux abonnés dans le choix et le traitement des sujets. Un abonné ne sera jamais un actionnaire - et heureusement... Mais si la majorité d'entre eux réclament un type de contenu particulier, le traitement d'un sujet spécifique, ou ne s'intéressent plus aux propos de tel journaliste de l'équipe ? Lorsque l'on se repose, financièrement, uniquement sur ses abonnés, combien de fois peut-on se permettre de leur dire "Non" ?
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