Une expertise « rétroactive »

Publié le 01 juin 2013 par Jlhuss

Il est possible après tout d’être juge et d’avoir des amis médecins. Il est même possible qu’à l’occasion d’une telle amitié, une appréciation professionnelle très positive soit apposée sur ce médecin de connaissance. Faudrait-il écarter systématiquement tout « professionnel de qualité » parce qu’il est votre ami ?
En revanche le bât commence à blesser quand les pratiques du dit médecin se révèlent pour le moins bizarres.

Que dire en effet d’une expertise menée au petit matin chez une personne âgée à peine réveillée ou que l’on réveille ? Que dire d’un entretien préalable d’une demi-heure sans aucuns témoins autres que le juge et que le médecin ami. Les autres experts ne pouvant intervenir que plus tardivement ?
Peu importe en effet que le médecin en question soit le témoin de mariage du juge, la procédure d’exclusion préalable des autres experts est suffisamment choquante pour ne pas en rajouter. Futilité ... Voyons ! Une collègue du juge Gentil déclare ne pas craindre l’annulation de l’expertise et affirme que la proximité entre le juge et l'experte médicale "ne pose aucun problème déontologique". Dont acte …
Le médecin expert, témoin de mariage du juge demande un dépassement d’honoraires pour cette expertise matinale, peut-être en raison de difficultés toutes particulières ou d’un horaire trop matinal dans la force de l'âge ?

Anecdote que tout cela, mais en revanche comment  faire remonter la validité de cette expertise « manu militari » à l’année 2006 ? C’est bien pour un « état de faiblesse » de Madame Bettencourt en  2006, avant la campagne de 2007, que Nicolas Sarkozy est mis en examen pour abus de faiblesse justement. Il est normal de se poser la question de savoir comment un expert, même « incorruptible » et en dépassement d'honoraires peut préjuger de l’état de la patiente qu’il expertise 5 ans plus tôt ? Fabuleux  … Non ?
Quand on ajoute qu’une IRM pratiquée bien antérieurement objectiverait des capacités « neuronales » parfaitement normales de Liliane Bettencourt et que ce document consultable, objectif, dont l’interprétation peut être contradictoire a été refusée dans le dossier, on se prend tout de même à se poser quelques questions sur la parfaite objectivité de cette instruction, à charge et à décharge rappelons-le. Curieux également le refus d’une contre-expertise qui de toute manière ne pourrait statuer que sur l’état présent de Madame Bettencourt et en aucune manière sur celui de 2006. Rappelons enfin qu'en 2006 le mari de Liliane, ami de François Mitterrand,  était vivant et gérait les affaires de la famille.

La période que nous vivons pourrait déstabiliser certains, les ébranler dans leurs certitudes. Elle est au contraire très riche d’une libération encore ténue des langues, de la presse, d’une remise en cause de la justice et de ses procédés quelquefois surprenants. Personne n’échappe désormais à la « fouille ». Pour l’exercice de la démocratie c’est un plus qui exige du citoyen qu’il diversifie ses informations, pour exercer correctement son devoir de choix.

Une bien belle et bonne époque !