Forme poétique venue du Japon, le haïku semble, malgré sa brièveté et son apparente simplicité, inépuisable. Trois exemples aujourd’hui, trois fois sept haïkus.
Hubert Haddad a publié, en même temps que Le peintre d’éventail, Les Haïkus du peintre d’éventail. En voici quelques uns :
un sang rêvé accompagne
le chasseur bredouille
La bête à bon Dieu
ornant l’oreille de l’âne
un instant de gloire
Son sac lourd et vide
en pavois il le promène
du rien au néant
Deux papillons blancs
applaudissent la lumière
vive chair du jour
Secret de famille
des soupirs en héritage
et nul traître mot
Rien n’est sans raison
à part cette pomme verte
que je ne sais peindre
La rose des vents
ni rose ni même fleur
au vent n’est plus rien
Alain Bensoussan, avec L’orpailleur, publie un recueil de poèmes érotiques où le trait vif donne à la chair une saveur qu’il faut faire durer en bouche.
dépeuplée de ta présence
Cafard sur le mur
N’advienne le temps
qui nous coupera en deux
Où nuit sera jour
Un brin après l’autre
tisserand et tapissière
S’étreignent en tresse
J’ai tour de magie
pour me glisser jusqu’à toi
Lapin en chapeau
Le printemps est là
dans l’Eden les crocus lèvent
La tête et nous narguent
Dressant crête ergot
queue en panache le coq
Proclame le jour
Mes doigts sur ton corps
dessinent toutes les femmes
Toute flamme tue
Invité à présenter cette forme poétique à l’ouverture d’une exposition de peinture et d'aquarelles (j'ai, à cette occasion, qualifié ces artistes d'« haïkuarellistes »), j’ai moi-même écrit un haïku par jour pendant la semaine qui a précédé.
Acrobates et danseurs
Le sable applaudit
La vitre du train
emporte l’arbre immobile
Demeure le nid
Au creux de la main
ou sur le bout de la langue
Poème secret
Froide était la pluie
et l’hiver semblait sans fin
Les bourgeons hésitent
Des mots et des rires
au fond de la librairie
Ecrits d’atelier
Oubliée sans doute
par un chien ou par son maître
Ma chance au pied gauche
Toute une pluie d’or
dégringole des nuages
Guette l’arc-en-ciel