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Enquête exclusive : Joe Cocker est-il un gros escroc ?

Publié le 29 mai 2013 par Storiagiovanna @StoriaGiovanna

joe-cocker_contactJoe Cocker traîne sa voix rauque empreinte de blues depuis plus de cinquante ans. Mais, chose surprenante, il ne vient pas de Nashville, Tennessee, mais bien de Sheffield, Angleterre toute froide (comme Zucchero vient d’Italie, mon Dieu, c’est pas vrai). Mais, depuis le début de sa carrière, Joe Cocker traîne quand même une grosse casserole derrière lui : en effet, tel un candidat de la Nouvelle Star en manque de notoriété, notre ami ne semble casser la baraque qu’en reprenant des titres.

Déjà, quand un artiste reprend un titre popularisé par un autre, on le taxe pour son manque de créativité, ce qui revient à demander en quoi il est utile artistiquement. Néanmoins, il existe d’excellentes reprises, bien meilleures que la chanson originale :

… par exemple.

Non, le problème de Joe Cocker, c’est qu’on n’a l’impression qu’il ne sait faire QUE des reprises, et que, par conséquent, il est incapable de se mesurer à un univers personnel qui serait pourtant riche, étant donné son potentiel vocal impressionnant. Je vous rassure tout de suite : ceci est tout à fait fantaisiste. En effet, Joe a prouvé, durant sa carrière, qu’il était capable de chanter des chansons originales :

Oui, Night Calls ne fait peut-être pas partie des grands standards des années 1990, mais avouez quand même que ceci est une chanson originale et que, là-dessus, le Jojo, il en impose. C’est tout ce qui compte. Mais il a fait ça, aussi :

Et pour moi, You are so beautiful, particulièrement chanté par Jojo, c’est juste l’une des plus belles déclarations d’amour qui soit. Je dirais même que, s’il fallait réduire l’œuvre originale de Joe Cocker à une seule chanson, ce serait celle-ci. C’est ce que je chante et ce que je dédie à ma mère, à ma sœur et à la Siamoise. Par contre, il a enfin fait ça :

Je considère N’oubliez jamais comme une erreur de vieillesse, à l’image du Where are we now? qui a marqué le retour de David Bowie. En effet, mon Jojo, qu’est-ce que t’es allé prendre un accordéon, deux-trois mots dans la langue de Molière et Catherine Deneuve, là ? T’as eu une commande pour RFM, ou bien ?

Enfin, ce que l’on peut reconnaître à Joe Cocker, c’est que ses reprises donnent envie de redécouvrir les morceaux originaux. J’ai en effet découvert tous les titres suivants grâce à ces reprises. Je dirais même plus qu’il a su parfois sublimé la chanson au point que complètement occulter les interprètes originaux dans certains cas. Ce que je vous propose, c’est de faire une battle en 4 rounds pour savoir si Joe Cocker a le pouvoir de surclasser les versions originales :

1 – With a Little Help From My Friends

La VO : The Beatles, 1967

Présent sur l’album Sergent Pepper…, ce morceau, selon moi, n’est pas un morceau majeur des Fab Four, mais un morceau de base du Swingin’ London comme on aurait pour le retrouver sur les premiers albums du groupe. Je dirais même plus que, l’ayant découvert des années après la version de Joe Cocker, je trouve ce morceau fade et facilement oubliable. C’est dommage, Sergent Pepper… étant quand même sur d’autres points un album d’une modernité folle pour l’époque.

La reprise : 1968

C’est avec cette reprise, spécifiquement, que Joe Cocker commence à marquer les esprits, et de quelle manière, à Woodstock ! Il a justement fait d’un morceau insignifiant le point d’orgue de toute la génération du Flower Power. Cette montée d’orgue au début, cette explosion qui suit à la lead, ce retour au calme, et cette voix qui transperce jusqu’aux cœurs de pierre… Cette reprise est tellement chargée émotionnellement – même si la Siamoise vient de me rappeler que Cocker était camé jusqu’à l’os quand il l’a interprétée à Woodstock, merci de m’enlever la beauté de cette version… – que je pense que c’est ce que l’on retiendra éternellement dans l’Histoire.

Who wins?

Joe. Tu peux tellement pas test. C’est comme si on te demandait de comparer le riz au lait La Laitière (Beatles) et celui de ta grand-mère (Cocker). Duquel tu te souviens le plus ? De celui de ta grand-mère, c’est bien ce qu’il me semble. Ben cette chanson, c’est pareil.

2 – You Can Leave Your Hat On

La VO : Randy Newman, 1972

Présent sur l’album Sail Away, le morceau passe particulièrement inaperçu contrairement à la chanson-titre qui fut un grand succès.

La reprise : 1986

Joe Cocker a spécifiquement enregistré cette reprise pour 9 semaines et demie, pour ensuite l’intégrer sur son album Cocker. Depuis, ce titre est devenu un tel poncif du dessapage que même Tom Jones s’est permis de la reprendre pour la version de The Full Monty.

Who wins?

Joe. Je ne connais tellement pas la version de Randy Newman – je n’ai même pas pris la peine de l’écouter pour préparer cet article. La version de Joe surpasse tellement tout qu’elle ne saurait désormais être égalée ou surpassée.

3 – Unchain my heart

La VO : Ray Charles, 1962

Après des années 1950 tournées vers le jazz et le rythm’n’blues, Ray Charles veut se tourner vers la pop et l’auditorat blanc au début des années 1960. Dans cette optique, il compose cette chanson qui lui ouvre, avec toutes les chansons écrites à cette période, les portes d’une large notoriété. Même si les inspirations restent tout de même r’n’b, cette chanson symbolise son évolution de l’époque qui lui a permis de rester, même après sa mort, un des plus grands artistes du XXe siècle.

La reprise : 1987

Un an seulement après son précédent fait d’armes, Joe ose reprendre ce qui est alors devenu un standard du r’n’b. Le résultat : une actualisation de la chanson sur le plan de l’orchestration, mais pas de la voix. Et je dirais même, pour la première fois, Joe n’éclate pas l’interprète original sur son terrain, mais il me semble qu’il était un des seuls à pouvoir reprendre cette chanson sans se casser la gueule.

Who wins?

Match nul. Je dirais que la version de Ray Charles a un peu mal vieilli, même si elle reste quand même énormissime. Il faut dire qu’encore une fois, je n’ai eu la curiosité de la découvrir que parce que Joe Cocker en a fait une bonne reprise. Malgré tout, comme je le disais précédemment, la reprise est chouette, mais pas au point d’occulter totalement l’originale.

4 – Summer in the city

La VO : Lovin’ Spoonful, 1966

Publiée en pleine période de gloire du groupe, cette petite pépite fait selon moi partie des documents d’archives sonores de cette période du milieu des années 1960 aux Etats-Unis qu’on appelle le Summer of Love et qui connaîtra son point d’orgue à Woodstock. Pour vous dire la haute estime que j’ai de ce morceau, et même de l’œuvre malheureusement pas si pléthorique de Lovin’ Spoonful.

La reprise : 1994

Plus down tempo et pop que l’originale, avec même quelques passages reggae dans la rythmique, c’est ma première approche du morceau. J’aimais bien, à l’époque – au milieu des années 1990, ça a eu son petit succès –, mais maintenant que j’ai découvert l’original, je la trouve un peu mollassonne.

Who wins?

Lovin’ Spoonful. Même si je dirais que la version de Joe Cocker est loin de démériter encore une fois. Mais la version originale est un tel kif, en même temps…

A l’image du génie d’Eric Claption, Joe Cocker a su allégrement pompé dans le répertoire de cette deuxième moitié du XXe siècle non seulement pour faire de belles chansons, mais aussi et surtout pour ouvrir l’appétit des auditeurs et rendre justice aux versions originales. En cela, je tire mon chapeau à la carrière de ce grand monsieur qui tient la route.



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